Surfant sur la personnalité de son réalisateur (celui qui a fait AMERICAN HISTORY X), DETACHMENT nous arrive bardé de ses qualités indé’ bien senties – casting haut de gamme, scénario tragico-existentielle, image inspirée – pour en découdre avec le système éducatif américain et le salut des âmes de ses soldats du premier rang, les profs.
Et pourquoi pas. Les essais précédents étaient plutôt à reléguer au rang de films sur la violence ou la misère sociale, sans forcément s’intéresser au corps enseignant. Adrien Brody campe donc un professeur remplaçant débarquant pour quelques semaines dans un collège difficile, alors que sa vie n’a que peu d’échappatoires ; studio minuscule, père hospitalisé, désir d’écrire sans y arriver.. On voit clairement la vocation ratée, et cet artiste solitaire tenté de redonner un sens à sa vie. Notamment en enseignant un peu en marge, en essayant de trouver la lumière dans chacun de ses élèves, ce qui renvoie à l’image assez répétitive depuis le CERCLE DES POETES DISPARUS, à savoir un idéaliste en face d’un système. Bon, ici il est aussi dépressif. L’idéaliste, pas le système (quoique..).
Tony Kaye brode par dessus ça un film résolument moderne (on pourrait croire qu’il vient de découvrir la vidéo, à tenter de multiples choses côté image – mais c’est ce qui offre un film visuellement intéressant, car différent selon les séquences), mais qui tombe rapidement dans la névrose de son personnage, inlassablement en train de s’enfoncer malgré les preuves évidentes qu’il pourrait tenter quelque chose pour se construire. On se laisse un peu avoir par ce côté nombriliste et défaitiste jusqu’au bout. Si une lueur d’espoir arrive en fin de film, on en serait presque à ne plus vouloir voir le personnage se relever… Mais c’est un autre film. Malgré son casting de rêve (mention à Cranston et Hendricks, les guests de l’année), DETACHMENT ne parvient pas à passer au-dessus des poncifs du genre (suicide d’adolescents perturbés, merci), et se retrouve très vite catalogué à la catégorie sans espoir. Dommage pour un film plutôt bien fait, c’est son ambiance trop persistante qui plombe le tout..