Une voiture brûlée après les heurts du samedi 28 janvier 2012 à Dakar, au Sénégal. © Seyllou/AFP
L'opposition et la société civile sénégalaises faisaient front dimanche contre le chef de l'Etat Abdoulaye Wade dans l'attente d'une décision du Conseil constitutionnel sur les recours contre la validation de sa candidature à un troisième mandat à la présidentielle de février.
L'opposition et la société civile sénégalaises faisaient front dimanche contre le chef de l'Etat Abdoulaye Wade dans l'attente d'une décision du Conseil constitutionnel sur les recours contre la validation de sa candidature à un troisième mandat à la présidentielle de février.Après les graves violences (un policier tué) qui se sont produites dans la nuit de vendredi à samedi à la suite de l'annonce de la validation de la candidature de M. Wade, 85 ans, au pouvoir depuis douze ans, le calme était revenu à Dakar et en province. Le Mouvement du 23 juin (M23, opposition politique et société civile), qui a appelé à "la résistance" contre cette candidature "n'a pas prévu de manifestation avant mardi", a déclaré à l'AFP un de ses dirigents, Abdoul Aziz Diop.
Militant reconnu et respecté pour la défense des droits de l'homme en Afrique, Alioune Tine, coordinateur du M23, arrêté samedi comme des dizaines d'autres militants du mouvement, était toujours entendu dimanche par la police à Dakar sur son rôle présumé dans ces violences. Uni et déterminé, le M23 attend les arrêts du Conseil constitutionnel sur les recours en annulation de la candidature Wade déposés par sept candidats d'opposition qui la jugent non conforme à la Constitution, affirmant qu'élu en 2000, réélu en 2007, M. Wade a épuisé ses deux mandats légaux.
Le camp du chef de l'Etat récuse cet argument, arguant de réformes de la Constitution en 2001 et 2008 qui lui permettraient de se représenter. Le président sortant a également saisi le Conseil pour obtenir l'invalidation de la candidature de trois de ses opposants, d'anciens proches. Il s'agit de deux de ses ex-Premier ministres, Macky Sall et Idrissa Seck, et de son ancien ministre des Affaires étrangères, Cheikh Tidiane Gadio, auxquels il est demandé de produire un document prouvant qu’ils sont en règle avec l’administration fiscale.
Autre recours, celui du chanteur Youssou Ndour qui récuse l'invalidation de sa candidature par le Conseil, au motif qu'il n'a pas présenté un nombre suffisant de signatures valides pour le soutenir.
Sous pression
Une source proche du Conseil a indiqué à l'AFP qu'il ne fallait pas s'attendre à une décision avant lundi ou mardi. Les cinq "sages" du Conseil - tous nommés par Wade - sont sous pression de l'Union européenne (UE) et de la France qui demandent qu'ils statuent "de manière claire et impartiale sur les réclamations".
C'est pourquoi les membres du Conseil "doivent motiver très précisément chacune de leur décision sur les recours, ce qui demande un travail d'enquête", indique la source proche du Conseil, ajoutant: "Vu la situation, il faut que chacun sache pourquoi telle ou telle candidature est validée ou invalidée".
Cet interlocuteur a précisé que le travail d'enquête doit notamment porter sur "des candidats qui pourraient avoir une double nationalité, la loi stipulant que chaque candidat doit être exclusivement de nationalité sénégalaise". Des ambassades doivent donc être contactées, a-t-il ajouté. "La décision du Conseil ira toujours dans le sens voulu par le pouvoir", a affirmé Abdoul Aziz Diop, et l'annonce de la confirmation de la candidature de M. Wade ou de l'invalidation de celle d'un opposant initialement retenue, risque de déclencher de nouvelles réactions de violence.
Sans citer directement le président Wade, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a estimé devant le sommet de l'Union africaine (UA) à Addis Abeba que les révolutions arabes avaient été "à la fois une source d'inspiration, mais aussi un rappel que les dirigeants doivent écouter leur peuple".
A Dakar, des organisations de défense des droits de l'homme ont appelé "à la préservation de la paix sociale et de nos acquis démocratiques" au Sénégal, jusqu'alors considéré comme un modèle en Afrique, invitant "à la retenue de part et d'autre".