Ce billet est un peu spécial. De fait, il sert de réponse à un commentaire envoyé par un lecteur, ce que je fais rarement, du moins ainsi. Il s'agissait en fait de mon billet concernant la façon dont Mme Lapix avait renvoyé Mme Le Pen dans les cordes (à lire ici). C'est visiblement un aficionado du parti d'extrême-droite qui m'a répondu. Je n'ai rien à dire sur la forme, la réponse étant relativement courtoise, fait assez rare dans ce courant d'opinion pour être noté. Je passe pour l'instant sur le contenu réel du message, j'y reviendrai en fin de billet, pour m'attarder sur ce qui est sous-entendu, c'est à dire la politique en matière de sécurité publique.
Je pense, à l'instar du commentateur, qu'il est assez juste d'affirmer que gauche et droite ont échoué dans ce domaine. La gauche par excès d'angèlisme, la droite par idéologie et populisme. Pour autant, je considère qu'il est péremptoire de suivre la logique du commentaire et de considérer que le FN serait compétent là où les autres ne le serait pas.
La meilleure preuve en est que depuis qu'il est au pouvoir, c'est une bonne partie du programme sécuritaire de Mr Le Pen en 2007 que Nicolas Sarkozy applique. Le durcissement de la politique d'immigration, la suppression de l'ordonnance de 1945 sur les mineurs délinquants, la création d'un ministère de l'immigration, la mise en avant de l'identité nationale, la création de peines planchers, la remise en cause de la justice, tout cela et bien d'autres joyeusetés (la liste serait trop longue), fait partie intégrante, et depuis longtemps du corpus idéologique de l'extrême-droite, seule la remise en cause de l'abolition de la peine de mort a échappé au grand retour en arrière effectué par l'UMP. Or, que constate-t-on ? Que rien, absolument rien ne fonctionne, l'insécurité, même avec des chiffres faussés, augmente, ainsi que son corollaire, le sentiment d'insécurité.
Certes, on pourrait me rétorquer deux arguments. Le premier serait que la baisse des effectifs imposée par la politique actuelle à empêché toute amélioration substantielle. C'est oublier qu'entre 2002 et 2007, les mêmes effectifs ont fortement augmenté, sans résultats significatifs, si ce n'est ceux liés à la communication de celui qui sera le futur président en 2007.
Le second argument consisterait à dire que si cela n'a pas fonctionné, c'est parce que Mr Sarkozy n'est pas allé assez loin. Il est vrai que le président ayant largement pillé les idées de son père, Mme Le Pen a donc décidé de faire dans la surenchère. Comment peut-on expliquer que ce qui a dégradé la situation marchera mieux si on le fait de façon plus radicale ? Soyons pragmatique, ce qui ne marche pas, ne marche pas. Point barre.
Ce n'est pas par plus de répression que passe la solution. Certes, il en faut malheureusement, mais elle ne doit pas consister le seule volet d'une politique sécuritaire. La prévention doit redevenir une priorité des forces de police. Mais cela ne peut suffire, l'aspect social de l'insécurité doit être traité. Pourquoi est-elle plus fréquente dans les quartiers populaires (ou du moins différente, parce que la délinquance des cols blancs, ça existe aussi) ? Il faut traiter les causes de l'insécurité pour que celle-ci baisse. A-t-on déjà vu un plombier ne faire qu'évacuer l'eau qui fuit sans s'occuper de colmater la fuite ? Mais peut-être Mme Le Pen n'a pas de problèmes de fuite chez elle ?
Pour terminer, je voudrais revenir sur le contenu du billet, dont voici le texte :
"Avant de dire que le programme de Mme Lepen ne tient pas la route,...il faut souligner là ou les programmes des "ennemis-amis" droite-gauche nous mis dans la situation dans laquelle nous sommes! Je ne parle pas du reste,...le drapeau national qui sert de torche anus, la Marseillaise huée et sifflée, les flics, les pompiers, les chauffeurs de bus et de rames de métro,...caillassés et les groupes de rap qui insultent le pays avec la complicité des associations contre le racisme!...on ne pourra pas dire que l'on ne savait pas!!!"
Je me contenterai de rappeler à cette personne que depuis qu'elle existe la Marseillaise a toujours été sifflée, qu'à de multiples reprises dans l'histoire de notre pays, le drapeau national a été brûlé, que la police n'a jamais fait non plus l'objet d'un amour immodéré de la part d'une grande majorité de citoyens. Quant aux paroles des groupes de rap, je renvoie à Brassens, Brel, Ferré sans aller jusqu'à Bruant ou Couté qui allaient 10 000 fois plus loin dans le rejet de l'autorité et leur haine de la police. Pourtant, il ne viendrait à personne l'idée saugrenue de les interdire.
Toutefois, la grande différence entre ces évènements d'autrefois et ceux d'aujourd'hui, c'est l'ultramédiatisation actuelle qui déforme notre objectivité et influe notre jugement. D'autant plus que rien n'indique une recrudescence du sentiment anti-français, mais seulement un malaise profond de la part d'une population qui cherche une place dans la société qu'on s'obstine à lui refuser.