L’économie mondiale a récemment subit deux crashs financiers suite à l’implosion de bulles spéculatives. En une décennie ces crises, celle d’internet au début des années 2000 puis celle des subprimes à partir de 2007, ont déstabilisées notre économie. Bien que prédire avec certitude l’origine de la prochaine bulle financière ne soit pas possible, repérer des indices permettant d’envisager des scénarii possibles est pertinent. C’est ce que nous allons essayer de faire ici en s’attardant sur les denrées alimentaires.
Le besoin mondial en denrées alimentaires ne peut pas subitement s’effondrer puisque la demande est soit fixée soit corrélé à la croissance de population. Il y a plusieurs facteurs qui peuvent en affecter la production (de céréales principalement). Parmi eux, les plus importantes sont les conditions climatiques et la question de l’énergie.
Les deux plus grands producteurs mondiaux de céréales sont la Chine (19,38% de la production mondiale en 2009) et les Etats-Unis (16,84%), (source FAO). D’après le China Meteorological Administration (l’équivalent de Météo France), l’Empire du Milieu a été victime de nombreuses catastrophes climatiques entre 2010-2011. De sévères inondations suivies d’une extrême sécheresse ont en effet touché ce pays l’année dernière. On peut certainement s’attendre à ce que ces mauvaises conditions climatiques affectent durement les prochaines récoltes dans la mesure où ces désastres ont principalement déstabilisé les régions productrices de blé. Plus grave, la sécheresse de 2011 qui ravagea le Sud-Ouest des Etats-Unis fût si intense que les dégâts engendrés pourraient s’élever à 8 Milliards de Dollars en perte de bétails et de récolte. Les conséquences seraient d’autant plus désastreuses que les Etats-Unis constituent le premier exportateur de céréales au monde (12,5% des exportations mondiales en 2010 selon une étude menée par le centre de recherche Xerfi). De plus, afin de réduire sa dépendance étrangère en pétrole et de limiter le réchauffement climatique dû à la consommation des énergies fossiles, des pays tels que les Etats-Unis, le Brésil ou même l’Union Européenne encouragent la culture de biocarburant par des incitations financières. De ce fait, l’US Department of Agriculture (Ministère Américain de l’agriculture), estime que 31% des récoltes de maïs seront d’ici 2016 utilisées pour la production de bio-énergie. SI l’on considère alors que les Etats-Unis sont également le premier pays exportateur de maïs au monde, (53,8% d’après l’US Grains Council), cela engendrerait une chute de près de 16,7% des exportations mondiales. Par conséquent, de maigres récoltes sont attendues dans les prochaines années, ce qui conduirait à une drastique augmentation des prix de ces denrées alimentaires. Le coût des transports devrait lui aussi croître avec la raréfaction des énergies fossiles. Ce qui entraînerait une nouvelle augmentation, cette fois des coûts de production. Ainsi, un récent sondage conduit par le cabinet Grant Thornton et publié dans le Financial Times montre que 41% des professionnels de l’alimentation et de la boisson pensent augmenter leurs prix dans les 12 prochains mois. Et au fur et à mesure que les prix augmentent, les investisseurs continuent à être attirés par l’appât du gain facile. Selon la banque Barclays, les investissements dans le marché de l’agriculture ont ainsi plus que doublés en passant de 45 Milliards de Dollars en 2006 à plus de 100 Milliards en 2011.
Pour conclure, le marché des denrées alimentaires s’attend à une augmentation générale de ses prix, ainsi qu’à des difficultés à satisfaire la demande croissante. En conséquence, les investisseurs sont et seront de plus en plus friand de ce secteur de l’économie, ce qui tirera encore les prix vers le haut. Ce cercle vicieux entrainera une inflation démesurée du secteur et donnera probablement lieu à la prochaine bulle financière dans quelques années.
Etienne VACCARO-Grange