MegaUpload aurait pu renverser les majors légalement

Publié le 28 janvier 2012 par Copeau @Contrepoints

Il n’a jamais vu la lumière du jour pour des raisons évidentes. Mais le site MegaBox faisait l’objet d’une théorie conspirationniste grandissante expliquant la fermeture si soudaine de MegaUpload. Théorie que le truculent h16 appuie après avoir réalisé une interview inédite qui confirme le sérieux du projet MegaBox et corrobore les soupçons sur son implication dans la procédure de fermeture. Un rappel des faits s’impose.

C’est nourri par un public profondément suspicieux et cherchant à comprendre exactement comment des agences basées aux États-Unis comme le FBI, le DOJ et le MPAA peuvent éteindre des serveurs d’outremer sous prétexte que quelques serveurs se trouvaient en Virginie, avec peu ou pas d’avertissement, sans passer par la procédure classique, et alors que le projet SOPA allait être suspendu ce 20 janvier, que les rumeurs se sont répandues.

Ça ne provient pas de Deep Throat ; ce n’est pas une révélation d’Anonymous. C’est plutôt une idée qui a commencé à gagner les esprits il y a quelques jours, peut-être sur Reddit, qui sait. Mais depuis lors ça gagne en expansion sur Twitter, les forums, Google+, et maintenant, des endroits comme TechCrunch et Forbes. Parce que la cause ne serait pas le partage illicite de fichiers, la violation de droits d’auteur ou le blanchiment d’argent dont MegaUpload est suspecté, selon ces internautes, mais un géant despotique effrayé par un compétiteur changeant les règles du jeu.

Juste avant noël, MegaUpload lança la bêta de MegaBox avec 7digital, Gracenote, Rovi et Amazon MP3 comme partenaires. MegaBox était une combinaison lecteur, boutique, et plateforme DIY pour les artistes émergents.

Nous prenons la distribution de la musique très au sérieux, donc nous avons conclu un partenariat avec le meilleur de l’industrie !

indiquait-il.

Ça ne signifie pas pour autant que les partenariats étaient formels. Il est en effet possible d’intégrer des liens Amazon MP3 sans que la compagnie le sache.

Les premiers essais semblaient indiquer que ce nouveau produit de la société MegaUpload se positionnerait facilement comme un leader de la musique en ligne concurrençant directement des groupes comme Universal Music ou iTunes.

Dans une interview du webzine Torrentfreak, Kim Dotcom, directeur de MegaUpload, confiait :

 Ils ne comprennent pas que les jours d’arnaques sont finis. Les artistes sont mieux éduqués que jamais au sujet de comment ils se font avoir et comment les gros labels ne se préoccupent que d’eux-mêmes.

Plus qu’un simple concurrent, MegaBox aurait totalement changé les règles du jeu, mettant à genoux les majors grâce à un seul chiffre : 90!

C’est le pourcentage des gains que ce système de téléchargement et d’écoute légal aurait reversé aux artistes. Dotcom décrit son projet de la sorte :

 Nous avons une solution appelée MegaKey qui permettrait aux artistes de gagner un revenu provenant d’utilisateurs qui téléchargeraient leur musique même gratuitement. [...] Le business model de MegaKey a été testé sur plus d’un million d’utilisateurs et il fonctionne !

Ce système permettait, durant certaines heures dans la journée, d’avoir un accès au téléchargement gratuit et, en dehors de ces heures, un compte premium MegaKey, comparable au compte premium MegaUpload, permettait le téléchargement en rémunérant les artistes. La lecture restait libre et une amélioration de leur régie publicitaire devait permettre de récupérer les gains durant ces heures libres et cette écoute gratuite. Ainsi, l’artiste était rémunéré directement, sans passage par les majors, en s’y affiliant ou indirectement via les partenaires de MegaBox. À titre comparatif, selon le site informationisbeautiful, un album iTunes vendu $9,99 rapporte $6,29 au label et $0,94 à l’artiste.

Intéressés, des rappeurs connus avaient adopté le système MegaKey et gagnaient déjà de l’argent comme le rappeur Will.I.Am qui avait montré son soutien auparavant pour le site de téléchargement en enregistrant une chanson avec P.Diddy, Estelle, Alicia Keys, Mary J. Blige, Snoop Dog, Kanye West, Chris Brown et bien d’autres. Cette chanson fut rapidement retirée de tous les sites de streaming par Universal. MegaUpload avait alors fait valoir le caractère illégal de ce retrait et cette chanson était rapidement revenue sur la toile.

On ne peut que déplorer l’inertie triomphante du partage du savoir et la mauvaise rémunération des artistes qui en découle quand les gouvernements offrent aux guildes modernes un pouvoir de nuisance aussi important. Il n’y a alors plus rien d’étonnant à ce qu’ils n’hésitent pas à balayer d’un revers de la main tout concurrent sérieux prêt à changer les règles qu’ils ont établi. Le plus effrayant est de voir ce dont le gouvernement américain est capable sans SOPA ni PIPA et de contempler l’ombre d’ACTA qui assombrira bientôt en Europe les chefs-d’œuvre les plus brillants et nous fera régresser en ce qui concerne l’accès à l’inspiration, l’information et le divertissement.

Pour les curieux, voici ci-dessous l’acte d’accusation formulé à l’encontre de MegaUpload.

L’acte d’accusation contre Megaupload