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H&M cherche bras droit uniquement

Par Raoulvolfoni

La vie de fumeur est compliquée. Comme tous, le fumeur a froid aux mains en hiver et cherche donc à s’en protéger. Il existe pour ça une formidable invention appelée gants. Malheureusement, ce produit est incompatible avec les desiderata du fumeur : avoir chaud aux mains et fumer (ceux qui ont déjà essayé de fumer une clope avec des gants en laine savent de quoi je parle).

La laine ça garde comme disait ma grand-mère. Il faut donc trouver une alternative et, comme la mode est bien faite, les mitaines reviennent au goût du jour. Un article magique puisque la laine s’efface pour laisser les doigts libres de se nicotiner tranquillement et le reste de la main est protégé (le revers de la médaille est que les doigts récupèrent également tous les miasmes et autres micro gouttes d’urine laissées par les gens indélicats sur les portes des toilettes publiques).

Toujours adepte du dépenser moins pour avoir plus (et travailler plus, cela va de soi jusqu’en mai de cette année), je me dirige donc vers mon H&M favori (même dans ma province il y a 2 H&M, j’ai donc la possibilité d’avoir un favori (étrange ce mot favori qui au féminin s’écrit favorite et ne prend pas de T au masculin)).

Après avoir parcouru les deux tiers du magasin exclusivement dédiés à la femme, j’arrive dans le minuscule espace pour nous, les hommes qui le valons bien aussi, repère instantanément le bac à gants (l’expérience du commerce et aussi parce que c’est généralement près des bonnets). Je fouille. Après quelques minutes de recherches me permettant de découvrir toute une gamme d’antivols, papiers et plus si affinités, je tombe sur LA perle rare : des mitaines en laine noire doublée polaire à 3€.

Et 3€ c’est pas cher.

Méfiant que je suis, je les essaie bien que la taille unique soit marquée en évidence (on ne me la fait pas, je sais parfaitement que H&M est suédois et que ces gars là ne font pas exactement le même format que moi; je suis méfiant du taillant). Les mitaines me vont comme un gant (mais pour fumeur donc) mis à part un petit défaut de maille. Le jeune assembleur chinois de 8 ans et demi a du mélanger deux bobines et quelques mailles sont marrons.

Point dépité et un peu aussi parce que j’ai du temps, je me replonge dans le fameux bac en quête d’une autre paire … que je trouve quelques minutes plus tard MIRACLE. Toujours méfiant (envers les suédois et les chinois du coup), j’essaie. La main droite me va parfaitement et la gauche me va comme la droite à la main droite. Y a un os. La paire est constituée de 2 mains droites.

Je suis un client respectueux et me refuse à défaire les paires en craquant les petits liens pour en constituer une parfaite. Je me dirige donc confiant vers la caisse et montre mes trouvailles à la personne en faction (il n’y a pas de caissières/caissiers chez H&M, uniquement des gens en faction, l’oeil suspicieux, le sourire toujours laissé dans les transports en commun et les traits aussi tirés qu’un élastique de Michel Sardou). Ma requête exposée, je m’attends à ce que la « factionnaire » délie les trucs, encaisse et me libère. Point du tout. Elle fait appel à sa responsable, l’affaire est trop sérieuse.

La chef arrive, d’un pas lent mais les bras très agités (comme si son corps avait 2 rythmes ou comme si elle voulait imiter ces grands trucs qui brassent de l’air), doté du regard maison et du sourire qui va avec. La transcription de ma requête faite, elle me dévisage, consterné et me répond que non, ce n’est pas possible, on ne peut pas délier des paires Monsieur, nous avons un réglement chez H&M. Un peu décontenancé par la réponse, je lui fait reformuler afin de bien prendre la mesure de l’énormité de la situation (en réalité je lui dit que son raisonnement est totalement absurde, que le client à 2 mains droites possède déjà une paire de mitaines dont il est très satisfait et qu’en conséquence elle va se retrouver avec un produit défectueux et un client mécontent). Rien à faire, la chef campe sur ses positions. C’est d’ailleurs facile pour elle puisque seul le haut de son corps est animé.

Désabusé mais fumeur et frigorifié des mains, je prends malgré tout la paire de mitaines avec le joli liseret marron et quitte le magasin maugréant qu’il n’était désormais plus mon favori (pan dans tes dents la pénitentiaire).

Telle est la politique de l’enseigne H&M, tellement certaine de ses parts de marché qu’elle en oublie les bases du commerce qui s’appellent la relation client. Cette épique aventure aurait pu arriver dans n’importe quel magasin mais il faut avouer que H&M avec ses recrutements hasardeux, sa politique d’accueil pénitentiaire et ses règlements dont la génése a depuis longtemps été oubliée se positionne clairement comme un acteur majeur de la distribution spécialisée en connerie.

Les équipes d’H&M c’est comme les cons finalement, ça ose tout et c’est même à ça qu’on les reconnait.


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