La coproduction polono-germano-canadienne In Darkness [Dans l'obscurité], réalisée par la Polonaise Agnieszka Holland, figure parmi les cinq œuvres non anglo-saxonnes nominées aux Oscars dans la catégorie Meilleur film étranger, se félicite l’hebdomadaire Newsweek Polska.
« Il raconte la destinée d’une petite fille juive sauvée par Leopold Socha, égoutier à Lvov, une ville située aujourd’hui en Ukraine. Chiger – c’est son nom – est toujours vivante. C’est sa biographie [inédite en français] qui a servi de trame au scénario d’Agnieszka Holland« , explique le journal.
La petite Krysia avait huit ans à l’époque où elle a dû se cacher avec sa famille et une douzaine d’autres personnes dans les égouts pendant quatorze mois. « Agnieszka Holland pensait probablement que plus personne d’entre nous n’était en vie, mais j’ai appris par hasard qu’elle tournait ce film. J’ai appelé le producteur en lui disant d’une voix tremblante que j’étais dans ces égouts », raconte Krystyna Chiger.
« Ce film est vrai. Je m’y suis reconnue. C’est alors que sont revenus les souvenirs, les odeurs. Tout. A vrai dire, j’ai pleuré durant toute la projection, bien que la version que j’aie vue n’était pas achevée – la musique n’était pas montée. C’était un grand moment, des grandes émotions. Je ne me souviens pas bien de tout dans ce film, mais je me suis certainement sentie comme si je m’étais à nouveau retrouvée dans ce lieu… »
« Vous êtes incapable d’imaginer comment nous avons pu survivre, n’est-ce pas ? Cela dépasse aussi l’imagination de mon propre fils. Et de mes petits-enfants adolescents », rassure-t-elle. « Mais j’ai toujours su que ce que j’ai vécu ne devait pas déterminer ma vie, que je devais vivre normalement. On me demande souvent si j’ai suivi une thérapie, si j’ai pris des médicaments pour m’en sortir. Ils n’arrivent pas à croire que je me suis débrouillée sans les spécialistes. »
Au moment où elle a dû descendre dans la cachette, la petite Krystyna portait des sandales d’été. « Les rats se baladaient sur nos pieds. Heureusement, Leopold Socha m’a donné plus tard des chaussures en caoutchouc. Les rats étaient nos compagnons. Nous avons joué avec eux. Non, ils n’ont jamais mordu personne. Apparemment, ils ont eu pitié de nous. Pourtant, ils se baladaient sur nous pendant que nous dormions… »
Le pull vert qu’elle portait dans les égouts est aujourd’hui exposé au musée de l’Holocauste, à Washington. « Il est en très bon état, ils l’ont probablement un peu retapé », plaisante-t-elle. « Je ne me réjouis pas parce que le monde va connaître mon histoire personnelle. Je perçois ce film plutôt comme une histoire plus générale du peuple juif, de ce que nous avons vécu », dit Mme Chiger. « C’est la guerre qui a provoqué ce genre de situations extrêmes. Plus de soixante ans ont passé depuis et il faut le raconter aux générations futures », estime-t-elle.
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