Si Abdellatif Zeraïdi affectionne les bords de l'eau qu'il peint avec nuance et délicatesse, sa vie n'est pas un long fleuve tranquille. A l'âge de 27 ans il quitte son Maroc natal où il avait commencé des études aux Beaux-Arts de Tétounane, pour les poursuivre à Dijon dans un style moins académique, où l'art contemporain a sa place. Il s'installe en suite en Italie pendant quatre ans pour sa profession, puis au Luxembourg une dizaine d'année durant.
Le voilà de retour en France depuis deux ans. Lorsqu'on lui a proposé de montrer son travail à la cour des chaînes il s'est jeté à l'eau même s'il n'était possible d'exposer que pour peu de temps, il faut se dépêcher pour aller voir comment cet homme, avec un style qui évoque l'impressionnisme, transcende ce qu'il observe et le marque de sa patte, allant au-delà des apparences. Quand il peint les reflets aquatiques, tantôt clairs tantôt obscurs, il produit une peinture abstraite pleine de sens. Le sens, une notion très importante pour cet artiste qui aime aller dans la profondeur des choses, ce qui explique son attirance pour ce qui a vécu: il guette et traduit les empreintes du temps dans les paysages comme dans les visages, avec une même veine. Paysages d'Alsace, vues de Mulhouse, souvenirs du Maroc se côtoient alors, et ce qui pourrait faire un contraste surprenant est relié par la sensibilité tangible d'Abdellatif Zeraïdi. Un passionné, qui dit fort justement: « Le modèle, n'est qu'un modèle que l'on modèle. » Sa manière à lui de façonner vaut le détour. Car il a l'art et la manière.
Catherine Ruff
Journal « L'Alsace » Mulhouse, Mardi 20 Novembre 2007