Patricia MACDONALD – Une nuit, sur la mer : 7-/10
Voilà un roman simple, par moments même un peu lisse, et pourtant efficace !
Oui, c’est possible !
C’est l’un des points qui m’étonnent toujours chez l’auteur. Son écriture n’est pas très profonde, ni même particulièrement fine, et pourtant elle parvient à amener son intrigue, de créer du suspense et de dépasser certaines des autres « reines du crime » pour nous livrer un polar sympathique qui remplit sans effort son rôle de distraction agréable.
Mais tout d’abord, l’intrigue :
Shelby, la quarantaine à peine dépassée, est une femme forte, qui en dépit des cartes difficiles distribuées par la vie a réussi et est aujourd’hui indépendante et sûre d’elle : malgré une mère alcoolique et un enfant né alors qu’elle n’était encore qu’une adolescente, elle est parvenue, à force de travail et de volonté, à réussir sa vie.
Le centre de a vie, le centre de ses pensées, son amour et sa force restera toujours sa fille Chloe et son petit-fils Jeremy. Chloe s’efforce d’être parfaite en tout, et pour lui faire un cadeau qui lui permettra de se détendre, Shelby lui offre, ainsi qu’à son époux Rob, une croisière d’une semaine. Pendant ce temps, elle s’occupera de Jeremy.
Or, alors qu’ils ne sont partis que depuis quelques jours, Shelby reçoit la pire des nouvelles : sa fille a disparu en mer. Elle se serait soûlée et aurait basculée par-dessus le balcon de sa cabine. Le temps que l’on fouille le paquebot de croisière, il a été impossible de la retrouver. Shelby se rend sur place, insiste à ce que l’on prolonge les recherches, mais il lui faudra bien se rendre à l’évidence, Chloe est morte, noyée en pleine mer.
Sa vie s’effondre, mais rapidement elle est assaillie de doutes : sa fille ne peut pas avoir bu ! On lui affirme qu’elle était alcoolique, qu’elle assistait même à des réunions des Alcooliques Anonymes, mais Shelby ne parvient pas à s’y résoudre, même en voyant les images de la vidéosurveillance du navire qui montrent une Chloe ivre.
Les doutes de Shelby sont entretenus par une forte croyance en sa fille, puis renforcées par quelques détails étonnants. Mais pourquoi aurait-on voulu faire du mal à Chloe, pour quel motif ? Même en cherchant Shelby ne parvient pas à l’imaginer. Et pourtant, elle reste persuadée que la mort de Chloe n’est pas accidentelle.
Alors ?:
L’intrigue est sympathique, et après un début un peu balbutiant elle nous conduit doucement et avec adresse vers des secrets insoupçonnés.
On sent que l’auteur a l’habitude, heureusement, puisque son écriture, elle, est assez lisse et dépourvue de réelle couleur.
Dès le début on constate cette étonnante situation : les descriptions sont par moments caricaturaux, parfois même maladroites et forcées, et pourtant on adhère et on entre dans l’histoire, c’est presque miraculeux.
Je vais vous donner un tout petit exemple, la description de personnages croisés par Shelby. Non, ce n’est pas mal, mais c’est assez plat et convenu, mais jugez-en par vous-même ; dans cet extrait, Shelby croise une passagère du paquebot :
… Une femme l’arrêta. Sèche comme une brindille, elle avait des cheveux bruns et ternes, des yeux rayonnant de bonté. Elle portait un corsage à ramages, une jupe évasée bleu clair et des tennis immaculés. Un homme en chemisette à carreaux, qui aurait pu être son jumeau, se tenait près d’elle et regardait Shelby avec sollicitude …
Oui, je sais, rien à redire, mais c’est ce type de description qui traverse le roman, que ce soit pour dépeindre une chambre, des voisins … c’est d’une simplicité extrême.
Et pourtant, l’ensemble fonctionne !
Autant un chanteur peut devenir célébrissime sans avoir de véritable voix, juste parce qu’il a du charisme, où juste parce qu’il est doué pour créer des mélodies entraînantes, autant un écrivain qui n’a pas de véritable don d’écriture littéraire peut nous livrer des romans vraiment agréables à lire ! C’est clairement là le talent de Patricia MacDonald, qui parvient à nous dérouler son intrigue de façon crédible.
On entre dans l’histoire, malgré qulques instants un peu flottants en début du roman, et on est pris dans l’engrenage, souhaitant connaître l’identité de celui/celle qui se cache derrière tout, on veut découvrir pourquoi il/elle en voulait à Chloe, qui était pourtant une jeune femme qui n’avait fait de mal à personne et se débattait seule dans son mal-être.
Le côté « action » de la fin est un peu tiré par les cheveux, mais ce n’est qu’une petite séquence et on l’oublie aussitôt.
Une nuit, sur la mer est un polar agréable à lire que je conseille à ceux qui aiment les polars qui ne sont pas trop profondes ni trop complexes.
C’est, je dirais, un « Mary-Higgins-Clark amélioré » - car Patricia MacDonald n’a pas besoin de recourir à des coïncidences ridicules pour rendre son histoire crédible ou la faire fonctionner. Elle y parvient sans artifices et avec fluidité.
Un polar simple et efficace, sans véritable profondeur mais sans aucun doute réussi.