Nicolas Sarkozy a fini par obtenir ce qu’il voulait: une guerre - à terme - avec l’Iran, tout en déclarant à son habitude le contraire. Les nouvelles sanctions économiques qu’il avait annoncées en présentant ses voeux au corps diplomatique et son appel du 21 janvier pour l’adoption d’«un régime de sanctions beaucoup plus fort, beaucoup plus décisif », se sont traduits par la décision de l’Union européenne d’imposer un embargo pétrolier à l’Iran et de geler les avoirs de sa banque centrale. Les seuls pays à applaudir sont Israël et les Etats-Unis. Vers une nouvelle guerreSergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, a déclaré que ces décisions «n'ont rien à voir avec la volonté d'assurer le régime de non-prolifération de l'arme nucléaire. Cela se fait dans le but d'exercer une action destructrice sur l'économie iranienne et la situation de la population». J’ajouterai que cet embargo n’a pas été décrété, selon Sarkozy, pour éviter «un déchaînement militaire et le chaos au Proche-Orient», il y conduit. Nous sommes aux prémisses d’une nouvelle agression occidentale, avec en toile de fond une guerre confessionnelle opposant les sunnites aux chiites, dont les seuls vainqueurs seront les colons sionistes en Palestine et les pays de l’Otan.Je ne suis pas un partisan du régime des mollahs et ne l’ai jamais été ; ce qui ne veut pas dire que je ne reconnais pas les mérites de la diplomatie iranienne quand c’est nécessaire. Je ne suis pas non plus pour la course au nucléaire au Proche-Orient, et suis donc contre une éventuelle bombe iranienne à partir du moment où toute la région serait dénucléarisée. Toute la région, cela veut dire : y compris Israël, qui détient plus d’une centaine de têtes nucléaires et dispose des missiles pour les transporter. On nous refait le coup des armes de destruction massive qui a permis de justifier l’agression de 2003 contre l’Irak. Une de ses conséquences désastreuses, et peut-être voulue, a été de livrer ce pays aux Iraniens pour passer à la phase actuelle du plan de remodelage du Proche-Orient. En clair, je souhaite le renversement du régime de Téhéran… mais par le peuple iranien. Des multinationales en quête de jackpot pétrolierComme cela a été le cas en Irak - je l’ai vécu - l’embargo va martyriser la population. Si Israël bombarde un site nucléaire – j’étais à Bagdad 15 jours après l’attaque de Tammouz - l’ayatollah Khamenei en sortira renforcé. Personne ne peut prédire les conséquences d’une agression contre l’Iran, si ce n’est la mort de centaines de milliers de civiles, des milliers de réfugiés, la destruction des structures sociales du pays et la montée en flèche du ressentiment et de la haine des musulmans envers les Occidentaux… tout cela pour conquérir une position géostratégique face à la Chine, et pour satisfaire des multinationales en quête de jackpot pétrolier.L’embargo décidé par l’Union européenne vise également le régime baasiste syrien et le Hezbollah libanais. En asséchant les finances de l’Iran, l’apprenti sorcier Sarkozy et ses alliés croient qu’ils les mettront à genoux. C’est oublier, comme l’a dit Mahmoud Ahmadinejad sur la chaîne américaine ABC, que «tout pays se privant de l’accès au marché énergétique iranien verra bientôt sa place prise par d’autres». Il y a suffisamment d’armes au Proche-Orient pour déclencher - «peut-être, hélas», comme dit Sarkozy - une conflagration mondiale. Excusez du peu.