Le jour même, l'UMP distribuait 6 millions de tracts pour défendre son bilan... pour rien.
Le Monarque était boudeur, agacé, horripilé.
Au point de saborder l'opération de communication de ses fidèles.
Sarkozy déprime-t-il ?
On adore ces propos « OFF », ce « OFF » qui n'est que « IN » tant il a vocation, dans l'esprit de son auteur, d'être répété, amplifié, commenté. Depuis bientôt deux ans qu'il s'est imposé une fausse distance avec la gestion quotidienne des affaires dans sa grande opération de présidentialisation, Nicolas Sarkozy a même usé et abusé de ce faux « OFF ». C'est toujours en coulisses qu'il critique François Hollande ou confie ce qu'il pense, toujours devant des témoins avec l'ambition d'être relayé. Petit déjeuner de la majorité (le mardi), déjeuners mensuels avec les députés et les sénateurs UMP, point politique du lundi matin, etc, les occasions ne manquent pas de lâcher ces fausses confidences stratégiques.
Enervé d'être loin quand François Hollande réussissait le lancement de sa campagne, il a donc lâché des confidences sur un éventuel retrait. «Un homme politique qui est creux en off, c’est qu’il est nul » a-t-il confié. Avant de continuer sur une vraie bourde politique.
« En cas d'échec, j'arrête la politique. Oui, c'est une certitude.
Je suis avocat, j'ai toujours eu un cabinet et je suis passionné de tas de choses. En tout cas, je changerai de vie complètement, vous n'entendrez plus parler de moi !
Je peux voyager, prendre des responsabilités, commencer mes semaines le mardi et les finir le jeudi soir ! Franchement, ça ne me fait pas peur .
De toute façon, je suis au bout. Dans tous les cas, pour la première fois de ma vie, je suis confronté à la fin de ma carrière.
L’aiguille, il faut savoir la retirer progressivement.»Il apparaissait presque méprisant à l'encontre des Français, comme un enfant capricieux de n'être pas compris à défaut d'être aimé.
Il paraît qu'il cite Pascal, qu'il est davantage soucieux de « la trace qu'il laissera » dans le futur, écrivaient Arnaud Leparmentier et Vanessa Schneider mardi 24 janvier.
Ce mardi, il y avait de quoi déprimer.
L'agence Standard and Poor's venait de dégrader la note de trois banques françaises et de la Caisse des dépôts. A Bruxelles, la Commission promettait une récession modéréeé à la zone euro pour le premier semestre de cette année. Le soir, le ministre du Travail anticipait de mauvais chiffres du chômage en décembre, qui devaient être publié ce mercredi matin.
Un ami de Carla Bruni-Sarkozy, Michel Kazatchkine a démissionné de ses fonctions de directeur français du Fonds mondial contre le Sida, la tuberculose et le paludisme. Son institution avait été accusée début janvier par Frédéric Martel dans une enquête pour l'hebdomadaire Marianne d'avoir financé pour quelque 2,7 millions de dollars une campagne de lutte contre le Sida via des sociétés d'un conseiller de l'épouse du chef de l'Etat. Le mandat de Michel Kazatchkine n'expirait que dans deux ans, mais un audit du Fond, à l'automne dernier, aurait provoqué cette démission anticipée, ce que l'intéressé dément.
Pourtant, le Monarque aurait pu se satisfaire de quelques nouveaux soutiens centristes. Dix parlementaires du parti d'Hervé Morin se sont publiquement exprimés en faveur de Sarkozy. L'opération, un lâchage attendu puisque les services élyséens avaient menacé les dissidents potentiels de représailles électorales pour le scrutin législatif de juin prochain, a fait choux blanc. L'attention médiatique était toute entière concentrée sur l'Aveu présidentiel de la crainte d'un échec.
Mardi après-midi, son ministre des Affaires Etrangères Alain Juppé s'est exclamé: « J’ai vu Nicolas Sarkozy ce matin pendant une heure et demie il ne m’a pas donné du tout ce sentiment. Il a l’air totalement décidé à aller vers la victoire ».
Décidé à aller vers la victoire ?
Donc, il est candidat... ou bien.
En meeting à Marseille
Ces confidences de Nicolas Sarkozy ne trompent plus grand monde. Sarkozy livrait peut-être ses états d'âme mais il voulait se rassurer, conjurer le mauvais sort d'une mauvaise séquence.
Au petit déjeuner de la majorité, le Monarque s'en est encore pris à François Hollande, qu'il accusa de s'être « livré à une attaque absolument sans précédent contre les classes moyennes ». On ne sait pas à quoi il faisait référence, puisque le candidat socialiste, dimanche dernier au Bourget, est plutôt resté sur d'autres terrains. Ces critiques hors sol ne font plus mouche.
Nicolas Sarkozy est ensuite parti au Mucem de Marseille, en avion présidentiel. Nombre d'élus locaux d'opposition boycottèrent le rendez-vous. Ces voeux, cette fois-ci destinés au monde de la culture, s'apparentent de plus en plus à de simples meeting électoraux. Ce n'est en soi pas grave, il suffit d'assumer.
Nicolas Sarkozy n'a d'ailleurs pas dit autre chose sinon défendre son bilan et attaquer, sans évidemment le nommer, François Hollande.
Contre ce dernier, il dénonça l'abrogation d'HADOPI, accusant la gauche de « vouloir réserver à la culture le même modèle que la finance ».
« Je suis proprement sidéré d'entendre certains dire que la loi Hadopi doit être abrogée. Mais rassurez-vous : on l'abroge d'abord et après, bien après, on verra, on prendra le temps de dégager une solution consensuelle. Bref, on nous demande de pratiquer un désarmement unilatéral à l'égard du piratage. »Il caricaturait la chose, François Hollande ayant pris soin de préciser qu'il voulait remplacer Hadopi, et non pas abandonner toute forme de répression contre le piratage numérique des oeuvres. Il démontra surtout qu'il était le grand inspirateur des railleries publiques et ad nominem que ses sbires - Jean-François Copé en tête - balançaient sans courtoisie à l'encontre de François Hollande depuis des semaines. « Si j'ai compris, il faudrait renoncer pour la pire des raisons, c'est qu'il y a un risque de faire de la peine aux jeunes. C'est simplement la facilité, toujours la facilité, encore la facilité. Dire oui, puis oui, puis oui et encore oui, parce que pour dire non il faut un minimum de courage. »
En matière d'annonces, il fut avare d'idées. Nous étions sidérés. Il paraît que les meilleures de ses propositions seront pour dimanche. Le temps sarkozyen n'est plus celui de la réalité du temps présent.
Trois jours après la présentation du programme du candidat socialiste, Nicolas Sarkozy a choisi de s'imposer sur les chaînes d'information iTélé et BFM-TV (« parce qu'il préfère des experts » aurait expliqué l'un de ses conseillers à un journaliste). Toujours informé à la première source, le Figaro croyait savoir que le Monarque parlerait chômage, logement et compétitivité... Quelle surprise !
Au monde de la Culture, il se félicita d'Hadopi, de la progression « de 21 % de 2007 à 2012 » du budget du ministère de Frédéric Mitterrand (alors qu'il ne s'agissait que d'une grossière manipulation comptable...). Il tonna de sa grosse voix pour tout et parfois n'importe quoi, comme sur la rénovation des cathédrales (« Qu’on ne vienne pas me dire que cela vient heurter le principe de laïcité. On peut entrer dans un cathédrale sans être militant ») ou contre la crise: « La réponse de la France à la crise, c’est la culture »...
A la fin du discours, une jeune femme parvint à lui lancer: « Combien coûte ce genre d’événement, c’est honteux ! », avant d'être expulsée par la police. Une anecdote que seul le journaliste du Monde releva.
Nicolas Sarkozy est candidat, mais ce mardi, il voulait jouer au « retenez-moi-sinon-je-m'en-vais ».