Résumé : Le jeune Hugo (Asa Butterfield), est un orphelin qui vit incognito dans les murs de la Gare Montparnasse, de laquelle il s’occupe de remonter les horloges. Lorsqu’il ne tente pas d’échapper au terrible chef de gare (Sacha Baron Cohen), Hugo collecte des rouages et autres morceaux d’horlogerie pour réparer un automate sur lequel son père (Jude Law) travaillait avant de mourir, persuadé que celui-ci cache un message de son défunt père…
Le dernier opus de Martin Scorsese est encore un exemple frappant d’un film vendu n’importe comment et qui du coup n’a pas su trouver son public. Présenté comme un énième film d’aventures pour gosses, Hugo Cabret est en fait bien plus que cela, et s’adresse finalement plus aux adultes qu’aux jeunes enfants. Car avec ce film, Scorsese ne propose ni plus ni moins que sa déclaration d’amour ultime au septième art et à la magie de celui-ci.
En revisitant la carrière et la vie du cinéaste Georges Méliès sous forme d’une enquête ludique, Scorsese paie son tribut à l’inventeur des effets spéciaux, mais surtout aux univers merveilleux que celui-ci a su créer. Pour ce faire, il recrée un Paris fantasmé et magique des années 30 et le merveilleux décor de la gare Montparnasse, magnifiée par la photographie somptueuse de Robert Richardson (Shutter Island, Kill Bill). Dès la scène d’ouverture, la caméra de Scorsese virevolte dans ce décor fantastique, en explorant les moindres recoins dans une 3D impressionnante de profondeur. Car loin d’être un simple gimmick, la 3D prend ici tout son sens, Scorsese utilisant cet outil pour impliquer le spectateur et tenter de lui faire revivre de grands moments cinématographiques, en reprenant par exemple la célèbre séquence de L’Arrivee d’un Train en Gare de la Ciotat. Autant par son histoire, évoquant avec fidélité la vie et la carrière de Méliès, que par sa forme (lorsqu’Hugo se remémore les jours heureux passes avec son père, un entend une bobine tourner dans un projecteur et les rouages de l’horloge donne l’impression de voir ladite bobine sur le visage du héros), Hugo Cabret est truffé de détails et allusions au pouvoir et à l’histoire du septième art. Outre la reconstitution minutieuse des tournages des films de Méliès, sont aussi évoqués le cinéma de Tati et de Charlie Chaplin (l’hilarant tout autant que tragique personnage du chef de gare incarné par Sacha Baron Cohen), les récits de Charles Dickens (David Copperfield notamment), voire aussi Cinéma Paradiso pour la transmission de génération en génération de la passion du cinéma.
Hugo Cabret est aussi un magnifique voyage initiatique brassant des thèmes aussi adultes que le deuil et le fait de se trouver un but dans la vie et une place dans le monde. Le casting est tout simplement parfait, du jeune Asa Butterfield très touchant en orphelin solitaire à Helene McCrory dans le très beau rôle de la femme de Méliès, en passant par un Christopher Lee impérial, enfin dans un rôle positif de plus de deux minutes. Mais c’est surtout Ben Kingsley qui remporte le morceau. On croyait l’acteur perdu depuis qu’il enchainait les rôles de bad guys au rabais dans des productions sans âme (Prince of Persia, Un Coup de Tonnerre), mais avec le rôle de Georges Méliès il prouve qu’il est toujours le grand acteur qui a donné au cinéma tant de personnages marquants.
Il est cependant certain que les personnes venues découvrir un énième Narnia ne pourront que se sentir floutées, tant le film n’a rien à voir avec les sagas fantastiques récentes. Le rythme est assez lent, tout particulièrement en début de film, les moments de comédie peu nombreux (et souvent liés aux apparitions de Sacha Baron Cohen) et le mystère au cœur de l’enquête assez peu surprenant. Cependant, Hugo Cabret ravira tout fan de cinéma par sa sensibilité, la beauté de ses images, la virtuosité de sa réalisation et son hommage sincère au tout premier magicien du septième art.
Note : 8.5/10
USA, 2011
Réalisation: Martin Scorsese
Scénario: John Logan
Avec: Asa Butterfield, Chloe Grace Moretz, Ben Kingsley, Sacha Baron Cohen, Christopher Lee, Helen McCrory, Emily Mortimer, Jude Law, Ray Winstone