Un soir en Sardaigne, Julien rencontre Matéo. C’est le coup de foudre, pour ces deux jeunes hommes, pourtant résolument hétérosexuels au départ, et même pères de familles. Mais presque aussitôt, ils se perdent de vue, pour se retrouver bien plus tard, par un de ces purs hasards de l’existence…
Cette aventure très gay a marqué Julien. Il est retourné à sa vie pépère mais pense encore à Matéo. Ce dernier rencontre Nathalie. Bien plus tard, une jolie femme, Véronique, achète à Julien un appareil photo. Elle oublie de signer le chèque, ce qui donne à Julien une occasion de la revoir. Mais qu’a donc Véronique de si particulier pour attirer ce garçon qui pourrait être son fils ? Elle ne lui est pas étrangère. Véronique a connu autrefois Serge, le père de Julien. Elle l’aimait d’un amour platonique, dans une relation tantôt amicale, tantôt amoureuse. Serge, lui, avait une femme et deux enfants, qu’il n’a jamais quittés, si ce n’est par le suicide. Il laisse deux veuves, sa femme Elsa, et Véronique, toutes deux pleines d’amertume envers cet homme qui a fui en laissant pour seul message une diatribe virulente. Mais si elles savaient vraiment ce qui s’est passé ! Par une suite d’événements particuliers, la vérité finira pas éclater.
C’est une belle surprise, que ce roman paru chez un petit éditeur débutant : A5 éditions. On pense souvent qu’un bon roman finit forcément par connaitre une bonne distribution chez un grand éditeur, mais force est de constater que nombre de bons bouquins sont auto-édités ou édités dans de petites structures… Le monde de l’édition semble hermétique aux nouveaux talents, mais dès qu’une célébrité désire publier, fût-ce une star du porno, les portes s’ouvrent toutes grandes !
Je dois louer la qualité d’écriture, qui est assez aboutie, avec une syntaxe juste et une grammaire quasi-irréprochable. Les lignes se suivent avec délice et fluidité. Pour autant, l’écriture n’est pas commune, et possède bien une signature. Ensuite, je rendrai grâce au talent de conteuse de l’auteur, et à sa façon de développer toute une structure romanesque, dense et, complexe, qui m’a rappelé Guy des Cars, grand romancier populaire, dans un style plus vif… Il faut presque s’accrocher pour suivre cette épopée amoureuse qui se développe sur des branches parallèles et avec de nombreuses intrications (dans mon résumé j’ai omis de parler des autres personnages – ils sont une dizaine au total). On ne s’ennuie pas une seconde. L’auteure évite adroitement les clichés (je pense notamment au milieu Gay). Toutefois la façon de traiter l’histoire est assez classique… avec quelques ingrédients originaux. Juste un bémol tout de même : la chance fait un peu trop bien les choses ; les personnages se perdent de vue et se retrouvent de façon presque magique (le monde est petit il est vrai…)
Voici donc une lecture que je conseille aux amateurs de sagas romanesques (ainsi défini sur la quatrième de couv’). Un auteur à suivre, et qui mérite une digne place dans une bibliothèque de qualité !
« Le hasard ou sa volonté de revoir le petit Mathieu devenu grand. Une boite de nuit qui se trouvait sur sa route et qu’il n’avait jamais remarquée. Une boite très spéciale. Des néons clignotants bleus et roses l’attiraient comme un appel onirique. Il n’avait plus remis un pied dans « ces boites à débauche » comme il les intitulait depuis sa rencontre avec Matéo. Son coeur se mit à battre dans un mouvement désordonné, descendant jusqu’à ses chevilles qui flageolaient. Il se promit de ne pas s’attarder, juste le temps d’apercevoir Mathieu, son demi-frère. Il repartirait aussitôt.
À l’intérieur, la musique battait son plein. Les ombres qui se déhanchaient sur la piste étaient mitraillées par les facettes d’une boule suspendue au plafond, tournoyant d’un mouvement lascif. Des filles et des garçons assez jeunes, phosphorescents. Des filles avec des filles. Des garçons avec des garçons. Des garçons frêles aux cheveux longs qui ressemblaient à des filles. Des filles aux cheveux très courts et aux épaules larges de catcheuses. »
Un soir d’été en Sardaigne – Annette Lellouche. A5 éditions
Date de parution : 29/11/2011