Le candidat Bayrou trépigne depuis 5 ans, cette fois-ci c’est la bonne d’après son plan de carrière. Mais au fait, qu’est-ce que le candidat Bayrou a à dire à la France ?
Son programme tient en trois axes : produire (en France), instruire (les jeunes), construire (une démocratie digne de ce nom). La particularité de ces trois axes, c’est qu’ils ne sont pas clivants : tout le monde est d’accord pour renforcer la production en France, miser sur l’éducation, et redonner à l’exercice du pouvoir et de la démocratie plus de dignité et de transparence.
Trois défis consensuels pour gouverner de manière rassemblée, au-dessus des partis traditionnels, en restant dans l’idéologie dominante (néolibéralisme plus ou moins régulé), et sans affirmer de véritable projet de société.
Un peu léger, non ? Produire en France mais sans changer les règles européennes sur la concurrence libre et non faussée, donner la priorité absolue à la lutte contre la dette et donc repartir pour un tour d’austérité (de toute façon, on y est déjà), et puis pas un mot sur la correction des inégalités de richesses de plus en plus fortes dans notre pays… bref, on brasse beaucoup d’air, mais pour changer quoi finalement ? N’est-ce pas un sarkozysme light et rassembleur que nous propose Bayrou ?
Par exemple, il y a un sujet sur lequel on aimerait beaucoup l’entendre. Bayrou joue tout le temps sur deux registres assez opposés :
- Un, l’engagement européen de longue date, auquel il croit sincèrement. Il a toujours été convaincu par l’avenir européen de la France, et souhaite avancer vers plus d’intégration européenne, de grands projets européens, de fédéralisme, etc
- Deux, le rappel systématique de ses origines paysannes, « les pieds sur terre », le terroir et l’authenticité, mais aussi la défense des petits, des oubliés, des exclus. Bref, la défense de la France d’en bas, avec une petite odeur de populisme que ne renierait pas Marine Le Pen.
Comment concilier ces deux aspects a priori contradictoires ? C’est là qu’on aimerait entendre Bayrou, car il y aurait certainement des fils intéressants à tirer : quelle place des territoires (et des terroirs) en Europe ? Comment articuler ancrage local avec une économie qui ne connaît plus de frontières ? Quelle démocratie locale à l’heure du transfert à l’Europe de nombreuses compétences nationales ? Bref, comment penser le territoire, la proximité et l’habitant dans un monde de mouvement permanent ?
Voilà des sujets concrets, qui concernent la vie quotidienne, l’organisation des territoires, le fonctionnement de la démocratie, bref, la société, et sur lesquels on aimerait entendre une vision et des propositions. Bayrou gagnerait certainement à sortir de son ronron abstrait et consensuel.