Da3i jamâlouki youchi3
Parmi les trésors que recèle l’enfance, il est des pépites sur lesquelles on tombe au détour d’un événement impromptu et qui nous procurent une joie équivalente à une jouissance cérébrale. Ma tante Najla par exemple, la sœur de ma grand-mère maternelle, originaire de 7aret 7reik dans la banlieue de Beyrouth, venait nous voir régulièrement à Ras el Nabe3 lorsque nous n’allions pas nous-mêmes chez elle. Elle avait toujours quelque chose pour nous gâter, des cornets de na33oumé (pois-chiches pilés avec du sucre), du sekkar nabet (bonbons de sucre non raffiné) ou du Ghazl el banât (du filage de jeunes filles comme on appelle chez nous la barbe à papa). Toujours des douceurs en somme. Mais on atteignait des sommets lorsqu’elle nous installait sur une natte autour d’elle et qu’elle décortiquait des grenades du jardin. Elle égrenait pour nous ce fruit totalement inconvenable et de temps en temps nous tendait un « dîk » (un coq), un bloc de graines encore agglutinées autour d’une peau intérieure jaune et amer. On pouvait mordre dedans pour en faire couler le jus dans la bouche, sur le menton et les doigts. Depuis ce temps, je sais qu’éclater et égrener une grenade pour quelqu’un est un pur geste d’amour.Le même geste accompli par Joao César Monteiro dans les « Noces de Dieu » pour montrer à Joana, une de ses « petites amoureuses », la manière idéale de déguster ce qui pour certains est la vraie pomme d’Adam et Eve. Tout cela pour dire qu’une étoile filante de la galaxie cinéma, un collectionneur de poils pubiens féminins est de retour de l’au-delà, ramené par la revue Trafic. Dans le numéro quatre-vingt consacré à vingt films pour les vingt ans de la revue, Marcos Uzal évoque, lui, le « Bassin de J.W. » et reprend la définition que donne Serge Daney des « mauvais sujets » qui apprécient « La comédie de Dieu » ou les « Souvenirs de la maison jaune » (l’asile psychiatrique de Lisbonne) : des cinéphiles incompréhensibles, socialement imprésentables et médiatiquement aberrants
PS : Toujours à propos de cinéma, la joie procurée par « Beirut Hotel » de Danielle Arbid. Enfin un vrai film arabe moderne, réalisé par une vraie cinéaste, avec de vraies images et interdit à Beyrouth comme il se doit sous le prétexte hypocrite et fallacieux qu’il évoque l’affaire Hariri, alors qu’il s’agit tout simplement d’un polar d’amour racontant l’histoire d’une femme arabe libre. En diffusant ce film, Arte a en tout cas prouvé à ces censeurs que leur avenir était désormais derrière eux. PS: Pur hasard du collage, cf ci-dessous Max Bucaille