L’annonce est tombée en grande pompe hier: le FBI a fermé la plateforme de téléchargement/stockage Megaupload et arrêté les principaux responsables du site pour violation du droit d’auteur et blanchiment d’argent. Une action qui a immédiatement fissuré le monde du web en deux clans: les institutions défendant leur business et les internautes, criant à la violation des libertés individuelles.
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Il y aura un avant et après Megaupload. Pas que le piratage/téléchargement illégal vienne d’en prendre un sacré coup derrière les oreilles, non. On peut d’ores et déjà vous dire, vous, consommateurs d’albums/séries/films gratuit, qu’il existera toujours un moyen de vous goinfrer. Sachez par exemple que Megaupload n’est pas la seule plateforme sur le marché et que Rapidshare, Fileserve, Mediafire, Hotfile et consorts sont toujours en vie. Souvenez vous d’une époque pas si lointaine où les autorités s’en étaient pris à Napster, puisà Emule et Limewire. Le téléchargement a su rebondir et nul doute qu’il saura encore le faire très rapidement, tant le temps de réaction des « défenseurs du droit d’auteur » est d’un ridicule accablant.
Non, cette fermeture vient poser le débat des libertés individuelles sur l’Internet. Bien sûr on est pas des idiots finis et on sait que l’utilité première de MU était le streaming et le téléchargement illégal. Mais il ne faut pas oublier qu’il était également un outil de stockage de fichiers partiellement payant, utilisé par des millions d’utilisateurs. Quid de leurs informations personnelles ? De leur abonnement ?
Vient aussi se poser la question juridique. Peut-on permettre à l’autorité d’un seul pays de fermer un site consulté mondialement et, qui plus est, basé à Hong-Kong ? On sait qu’Internet est un problème majeur sur les questions de Droit puisqu’il met aux prises droit national et international. C’est pour cette raison qu’il est extrêmement difficile de mettre à mal de tels sites. Si le blanchiment d’argent est un motif légitime d’arrestation, il n’en demeure pas moins qu’il doit être pris par tout les pays concernés et non pas par une autorité, aussi puissante soit-elle.
Cette cabale contre Megaupload n’est que le résultat d’une décision prise par le FBI et différents gouvernements sous l’influence des grandes compagnies de musique (Universal, Sony, ..) et de cinéma (Warner) pour mettre fin au téléchargement illégal. Une histoire de gros sous, ni plus ni moins, menée par des gens incompétents en la matière et qui n’ont que la peur sur les internautes pour véritablement solutionner le problème. Pas forcément suffisant.
Surtout que c’est un problème d’une hypocrisie sans nom. Palme d’or au cinéma. Les puissants maitres du grand écran viennent pleurer une perte d’argent « colossale ». Mais n’est-ce pas Avatar, sorti en 2010 donc en pleine période de téléchargement, qui possède le plus grand nombre de spectateurs et la plus grande rentrée d’argent de tout les temps ? Les records de recettes ne sont-il pas régulièrement battus (Spiderman, Twilight, Harry Potter)? Même topo en France où il a fallu attendre quarante ans pour que deux films français (Bienvenue chez les Ch’tis et Intouchables) viennent détroner la Grande Vadrouille..
Pour l’industrie de la musique, la donne est différente. Oui, il y a une crise du CD, c’est un fait. Mais s’il est forcément dû aux téléchargements illégaux, il l’est tout aussi bien par l’arrivée du format MP3 (même si les deux sont étroitement liés). Les plateformes Virgin ou Itunes sont en jolie forme financière et battent sans cesse des records de vente, pour un contenu payant! Alors où est le fond du problème ?
Les grandes stars existent toujours aujourd’hui, sont toujours plus riches et certaines le doivent à Internet et ses consommateurs (Lady Gaga, Justin Bieber par exemple). Alors si elles ne font plus autant d’argent par la vente d’album, la marge est compensée par les concerts, les interviews ou les vidéos.
Les vrais touchés par le téléchargement au final sont les artistes indépendants. Mais il ne faut pas oublier que 95% d’entre eux n’existeraient pas sans le net et le téléchargement! Car le bouche à oreille, les blogs, les réseaux sociaux font la publicité de ces artistes et sans la possibilité de les écouter gratuitement, difficile de croire que la grande majorité dépasserait un mois d’existence. L’homme est matérialiste par nature, donc s’il aime véritablement un produit, il ira l’acheter après l’avoir tester sur le net. Et c’est sûrement ça le problème. Les grandes compagnies voient d’un mauvais oeil cette liberté culturelle où chacun peut se faire son avis avant d’acheter le produit. C’est vrai qu’il était bien plus simple à l’époque de contrôler et de faire consommer le client sans qu’il n’y retrouve à redire. On préfère toujours ses moutons sages à la brebis trop souvent égarée.
C’est ce combat contre la liberté de chaque internaute/citoyen qui est aujourd’hui défendu par la communauté web. Plusieurs signes de manifestation ont déjà éclaté: la page facebook du FBI est devenu plus infesté que les rues de Naples, le mot Megaupload est le plus utilisé sur Twitter, des discussions sans fin se construisent sur les réseaux sociaux.
Mais la plus grande action jusqu’à présent est à mettre à l’actif des Anonymous. Ce collectif socio-ultra-libertéraire de « hackers » a mis une énorme quenelle (pour reprendre une expression chère au plus grand comique français de tous les temps) et déjà piraté les sites du FBI, d’Universal, de Sony, de la RIAA, d’Hadopi, de la Maison-Blanche et bien d’autres encore pour donner lieu à la première cyberguerre mondiale. Ce n’est sûrement qu’un début (des deux côtés) mais nul doute que ce 19 janvier 2012 marque un énorme tournant dans l’Histoire d’Internet.