Voeux après voeux, il s'ensable dans une posture de candidat si voyante qu'elle gêne ses proches. Et en même il ne peut s'empêcher de répéter jusqu'à la nausée combien il travaille et travaillera jusqu'à la dernière minute.
Un type qui ne cesse de rabâcher qu'il bosse, ça finit par devenir suspect. « J’ai bien compris que j’étais là pour cinq ans. (...) je travaillerai jusqu’à la dernière minute de mon mandat. » Ou encore: « quand on diffère une décision difficile, on doit la prendre plus tard, trop tard, et avec plus de souffrances ».
Candidat, il l'est évidemment. Inquiet, il l'est tout autant. Sinon, comment s'expliquer qu'il puisse évoquer Vilvoorde. En 2001, on avait beaucoup reproché à Lionel Jospin son aveu d'impuissance devant la fermeture de l'usine Renault de Vilvoorde. Nicolas Sarkozy sait parfaitement qu'il suffit d'un clic de souris pour remonter la liste de ses échecs industriels. Pourtant, comme par un réflexe proprement masochiste, il s'est laissé emporter par son obstination à tacler l'opposition, et surtout François Hollande. Jeudi, il se moqua donc, sans le citer, de Lionel Jospin: « je ne serai jamais l’homme d’un nouveau Vilvoorde ».
Effectivement, Nicolas Sarkozy est l'homme de Gandrange. Il y a même des stèles en Lorraine, au nom de ses promesses non tenues à Gandrange. On se souvient qu'il y était venu, en février 2008, quelques jours avant son mariage avec Carla Bruni, frimer sur ses promesses et sa nouvelle fiancée. un peu plus tard, il expliqua qu'il avait obtenu des garanties du milliardaire Mittal, qui venait de racheter l'installation. Sans attendre la crise, Mittal décida de fermer l'implantation et, en mars 2009, l'aciérie de Gandrange fermait donc ses portes.
A Lyon, Sarkozy eut pourtant de grands mots : « la France doit rester une terre de production ». Ou encore: « Nous prendrons des décisions fortes ». Lesquelles ? On ne sait pas. Nicolas Sarkozy est indécis. Il hésite. La TVA sociale fait peur dans son camp. Certains députés aimeraient être réélus en juin prochain.
Nicolas Sarkozy n'eut même pas un mot de soutien pour les personnels de Lejaby, dont la dernière usine française, implantée à quelques dizaines de kilomètres de là à Yssingeaux en Haute Loire va fermer après la reprise du fabricant de lingeries par un consortium étranger. Quel bel exemple de la politique industrielle sarkozyenne ! L'Etat a « laissé prendre le contrôle du groupe Lejaby par un fond de pension italien et l'arrêt des productions en France. C'est inacceptable et c'est lexemple de l'échec du sommet social », ont dénoncé les ouvriers de l'entreprise.
A Lyon, il a presque exprimé tout haut ce qu'il lâchait tout bas à ses confidents pour qu'ils le répètent ensuite... «À partir du moment où cette agence disait du mal de la France, pour un certain nombre, ça ne pouvait être que la vérité, puisque c'était une critique de la France et peut-être de son gouvernement. On a vu un spectacle parfois indécent, pour ceux qui aiment leur pays, d'hommes et de femmes donnant le sentiment de se réjouir de ce que venait de décider cette agence ».
« Tout d'un coup, une agence de notation, Standard & Poor's, devenait la référence absolue de tous ceux qui, jusqu'à présent, soit l'ignoraient, soit la critiquaient ». Il a fustigé « un affolement peut-être sans précédent dans une partie du monde politique et du monde médiatique ». Effectivement, on s'affole. Nicolas Sarkozy est toujours président, et il n'a suffit que de 5 années de sa présidence pour que la France perde sa note de crédit auprès des marchés internationaux. En 5 ans de présidence, la dette publique a été augmenté de 630 milliards d'euros. On s'affole donc puisque Nicolas Sarkozy a été dégradé la semaine dernière, et la France avec.
A l'Elysée, on s'inquiétait. Le champion ne décolle pas dans les sondage. Pire, l'écart se resserre avec Marine Le Pen, semaine après semaine. On murmure qu'on aimerait qu'il se présente plus tôt, dès la fin du mois. Le candidat inavoué a déjà choisi son agence Web. Mais Nicolas Sarkozy est persuadé de sa campagne.
Jeudi soir, il a fait savoir, au Figaro, qu'il tenait son cap. Il se présentera le plus tard possible, en mars. Trouillard ou hypocrite, mais jusqu'au bout. On se rassure avec des comparaisons avec 1988 ou 1995, du siècle dernier. On fait parler des « visiteurs du soir » : « La perte du triple A n'a pas laissé de trace dans l'opinion. Les sondages sont relativement stables ». Un ministre qualifié d'influent a renchéri auprès de l'accrédité du Figaro: «Sarkozy se mettra à nu devant les Français, il dira avec humilité qu'il n'a pas tout réussi, mettra en perspective ce qui a marché, et proposera un chemin pour la suite. Il mettra tout sur la table d'un coup. Sur ce temps très court, il ira à la rencontre des Français. Plus il le fait tard, plus il a des chances que ce message soit retenu. Pour l'instant, il doit continuer à capitaliser sur le fait qu'il travaille.»
Pour ses vieux voeux aux forces économiques, Nicolas Sarkozy était crispé. Il n'avait pas grand chose à dire. Il se répéta, donc. Son incroyable sommet de crise, mercredi, a fait flop. Donc Sarkozy répéta. Il était en roue libre. La règle d'or ? « N’y aurait-il donc pas d’hommes et de femmes raisonnables » en France ?
Même l'agence Standard and Poor's s'en fiche de cette règle d'or si opportunément sarkozyste...Contre cette agence, Sarkozy dérapa à nouveau. Pour quelqu'un qui s'affirme président responsable, le dérapage était grave. Notre Monarque surinterpréta l'avis de l'agence Moody's. Il le savait, mais il dérapa quand même. est-ce bien responsable: « A partir du moment où cette agence [Standard & Poor‘s] disait du mal de la France, pour un certain nombre, cela ne pouvait être que la vérité […] C’était vendredi. Lundi, une autre agence, deux fois plus importante, a dit le contraire ». Moody's n'a jamais dit le contraire. L'agence a simplement dit qu'elle ne changeait pas sa notation et qu'elle maintenait son observation de la France pour les mois à venir: « Il faut se garder d’aller lire au-delà du texte », a même confirmé auJDD.fr une source proche de Moody’s.
Nicolas Sarkozy le savait parfaitement. Mais il a préféré raconter n'importe quoi.
La veille, il avait accepté de dépenser 0,2% du budget de l'Etat, 430 petits millions d'euros pour ses « mesures fortes et décisives » contre le chômage. L'Unedic venait justement d'annoncer qu'elle anticipait 214.200 chômeurs supplémentaires en 2012, et la barre des 3 millions qui serait franchie... « On n’a pas tout essayé » , a-t-il martelé. Pourquoi découvre-t-il son incompétence à moins de 100 jours d'une éventuelle sanction électorale ?
Il répéta ce qu'il avait dit la veille, mercredi, pour conclure son micro-sommet de crise. La pauvre Nadine Morano, ministre de l'apprentissage, reçut encore une salve de réprimandes: « il n’y a chez nous deux fois moins de jeunes en alternance ». Il eut une idée, sur le tard, « régionaliser le Fonds stratégique d’investissement ».
Une idée, sur le tard.
Ami sarkozyste, où es-tu ? Es-tu impatient ?