Une clause "anti KDP Select" dans le contrat d'Apple

Par Eguillot

Apple a fait parvenir aux (auto)éditeurs d'ebooks présents sur l'iTunes Store, il y a quelque temps, une véritable clause "anti KDP Select". C'est en tout cas comme cela que je l'interprète. KDP Select est une opération promotionnelle des ebooks chez Amazon, qui permet de mieux vendre, en contrepartie de quoi vous leur cédez l'exclusivité sur la vente des ebooks concernés pour trois mois. Pour contrecarrer ce dispositif marketing, Apple, dans cette modification de contrat, donne pour obligation aux auteurs de distribuer chez Apple tous les ebooks développés sous une forme autre que l'epub, en citant l'exemple du PDF. Apple se réservant la possibilité de convertir les fichiers concernés, à son propre coût, en format epub.

Une formule assez habile, qui évite à Apple, en prenant le PDF comme exemple, l'utilisation du terme "PRC" ou "fichier mobi" qui sont les types de fichiers présents sur l'un des principaux concurrents, le Kindle d'Amazon. On sait que de nombreux auteurs autopubliés intéressés par KDP Select ne veulent pas prendre la peine de retirer leurs ebooks de la concurrence, mais préfèrent appliquer KDP Select pour des oeuvres inédites. Cette clause vise à les empêcher de faire cela : à partir du moment où vous mettez des ebooks chez Apple, il faut y mettre tout votre catalogue, y compris vos nouvelles parutions, sous peine de rupture de contrat. Ce qui vous empêche de facto d'opter pour KDP Select

Personnellement, j'ai signé cette clause d'Apple : j'entends "jouer le jeu" avec chacun des partenaires en présence. Je trouve cela assez significatif du duel que se livrent ces deux acteurs, mais aussi, de l'intérêt que peut susciter la vente d'ebooks pour Apple. Apple, qui vient de développer son applicatif ibooks 2.0, qui permet d'intégrer certaines fonctionnalités comme la 3D pour des ebooks enrichis.

Bon. Pour vous dire le fond de ma pensée, j'ai beau être un auteur de SFFF, je suis avant tout un littéraire. Je ne crois guère aux ebooks enrichis. De même, je pense que les vrais lecteurs de romans se retrouveront davantage sur Kindle, Bookeen, Sony ou Kobo que sur iPad. Il faut être réaliste, Steve Jobs a privilégié les "gadgets multifonctions qui en jettent" aux véritables appareils de lecture. De son vivant, lui-même pensait la lecture en déclin, et il ne s'en est pas caché lors d'une interview. C'est vrai qu'au premier abord, une liseuse de type Bookeen fait sans doute pâle figure devant un iPad. Mais un lecteur sur Bookeen sera au moins autant immergé, si le livre est passionnant, qu'un utilisateur d'iPad. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : il y a des lecteurs sur iPad, de vrais passionnés de littérature. On ne saurait oublier, pourtant, qu'iBooks 2 n'est pas la seule application présente. Il y en a des dizaines de milliers d'autres, plus de 100 000 ! Cette apparente force d'Apple est aussi sa plus grande faiblesse dans la course à l'ebook. Pour une bonne et simple raison : la dispersion. Etre lecteur demande un certain effort, il faut rester concentré sur son sujet, sans avoir la tentation d'aller surfer ou d'écouter de la musique.