En cette période de crise environnementale et de remise en question du capitalisme néolibéral, le concept de transition écologique connaît un succès croissant parmi les candidats au trône présidentiel. Nous nous intéressons ici aux approches proposées par le Front de Gauche, EELV et Cap21.
Le Front de Gauche affiche une conviction écologique toute neuve, que son programme articule avec des thèmes plus traditionnels (partage des richesses, contrôle des banques, etc.). Le chapitre 3 du programme est intitulé « planification écologique », ce qui n’est pas innocent : il s’agit bien pour l’Etat de revenir en force dans trois domaines clés : l’énergie, les transports et l’eau… ou comment faire d’une pierre deux coups en remettant la main sur des leviers largement libéralisés depuis 2 ou 3 décennies.
Au-delà de ce chapitre spécifique, la notion de transition écologique est régulièrement citée dans les propositions, mais de manière un peu secondaire, comme un pense-bête. La priorité c’est l’humain (cf. le titre du programme), c’est de réguler, de planifier, de créer de l’emploi… ah oui, et de manière durable, hein. Et en privilégiant les circuits courts.
La transition écologique s’avère donc comme un concept bien pratique pour participer à la lutte contre le capitalisme et ses effets nocifs.
Chez EELV, la simple lecture du sommaire du projet (ben oui il fait 103 pages, qui peut lire un tel pavé ?) met en évidence une inversion des priorités. C’est la libération de la dépendance aux énergies fossiles (et au nucléaire) qui est évoquée en premier ; l’eau, la santé, l’agriculture et l’alimentation sont « au cœur du projet » ; l’économie doit devenir plus écologique et davantage au service des habitants. Enfin, le passage à la VIème République est cité comme l’outil permettant la transition vers une société écologique.
Alors bien sûr, la question sociale prend également une place très importante dans le projet des Verts : une éducation « émancipatrice », une société plus ouverte et plus égalitaire, et la solidarité à toutes les échelles (du local au planétaire). On passe sur le détail des mesures pour retenir l’essentiel : le projet EELV, bien davantage que celui du Front de Gauche, est structuré par la transition écologique, avec certes un deuxième pilier conséquent : une société plus humaine, plus solidaire et égalitaire.Tiens d’ailleurs, écologie rime-t-elle forcément avec cette conception d’une société plus juste et égalitaire ?
Allons voir du côté de la candidate Corinne Lepage, avec son étiquette de centre-droit et son micro-parti Cap21. Malheureusement, son site de campagne annonce, dans un post datant d’octobre, que le programme ne sera connu que « fin janvier / début février ». Référons nous alors aux éléments de programme annoncés sur le site de Cap21, qui devraient constituer la base de celui de la candidate.
Intéressons-nous surtout au volet social du projet de Cap21, intitulé « le pacte social ». Nécessité de repenser le droit du travail et le droit social, qui s’appuient sur une forte intervention de l’Etat. Le contexte a changé, et il faut désormais mettre en place de nouvelles formes de solidarités et de régulation : développement des logiques d’accords collectifs et de la responsabilité sociale de l’entreprise, recentrage de la solidarité nationale sur quelques domaines clés (le reste relevant des entreprises), développement de l’économie sociale.
Tout ça est un peu sommaire, on en saura probablement plus dans les prochaines semaines.
Cap21 défend donc une conception plus libérale de l’écologie, qui paraît assez largement éloignée de celle d’EELV et encore plus du Front de Gauche. Les différences ne sont pas minimes : rôle de la puissance publique, rôle des citoyens, régulation du marché et des capitaux, etc.
Dans ces trois conceptions de l’écologie et de la société, on sent cependant assez bien qu’EELV penche bien davantage vers le Front de Gauche que vers Cap21. Ce qui n’est pas forcément évident quand on écoute la candidate Eva Joly (rapprochement avec Mélenchon mais aussi appels du pied à Bayrou).