Dans le passé, le journaliste Chris Hedges a travaillé pour le NPR, le New York Times et le Christian Science Monitor. Dans sa dernière tâche en date, il fait équipe avec une improbable paire: deux avocats qui vont l’aider à défier le président des Etats-Unis.
Le président Barack Obama est la cible de poursuites judiciaires suite à une plainte déposée par le gagnant du prix Pullitzer, Hedges; dont la raison lui semble bien plus qu’évidente. La décision de traîner en justice le commandant en chef des armées est une réponse à la signature le 31 Décembre par Obama du National Defense Authorization Act (NDAA), une loi qui permet la détention militaire pour une durée indéfinie de tout citoyen américain dans des centres de torture hors du pays, comme à Guantanamo Bay par exemple.
Obama fit un amendement en signant la loi lors du réveillon du nouvel an, insistant sur le fait que bien que la loi lui donne le pouvoir de détenir indéfiniment ses propres citoyens sans autre forme de procès, cela ne veut pas dire qu’il le fera. De manière spécifique, Obama a écrit que son gouvernement “n’autorisera pas la détention militaire indéfinie sans procès de ses citoyens”. Sous une autre législation, quoi qu’il en soit, le gouvernement va obtenir le droit de suspendre la citoyenneté de tout Américain si la loi sur l’Expatriation de l’Ennemi rejoins le NDAA au rang des lois atroces approuvées par le président.
“Une fois de plus, vous devez être accusé de soutenir les hostilités, ce qui peut-être défini comme bon lui semble par le gouvernement. Ensuite le gouvernement peut vous enlever votre nationalité et vous faire appliquer la section spécifique du NDAA sans autre forme de procès”, a écrit de cette loi le journaliste Stephen Foster Jr plus tôt ce mois-ci.
Dans un post publié Lundi sur TruthDig.com, Hedges annonce ses efforts pour amener Obama devant une cour de justice et dit que son équipe d’avocat défiera le président sur la légalité de la loi d’autorisation pour l’emploi de la force brute militaire, ce qui est prévu par le NDAA.
Dans son explication, Hedges dit que la signature de cette loi signale “une giffle monumentale et catastrophique aux libertés civiles”.
“J’ai passé pas mal d’années dans des pays où l’armée avait le pouvoir d’arrêter et de détenir des citoyens sans accusations”, écrit Hedges. “J’ai été dans certaines de ces prisons. J’ai des amis et de collègues qui ont “disparus” dans les goulags militaires. Je connais les conséquences de donner l’autorisation d’exercer le maintien de l’ordre et la politique de sécurité interne à l’armée de quelque nation que cela soit. Et même si ma bataille peut sembler être une bataille à la Don Quichotte, elle se doit néanmoins d’être combattue si nous devons garder l’espoir de soutirer ce pays du fascisme corporatiste dans lequel il a sombré.”
Comme d’autres opposants au NDAA, Hedges s’attaque dans ses explications au verbiage creux et vague qui aide à créer un scenario sans fin pour que le gouvernement soit capable de se saisir de quiconque aux Etats-Unis et de le mettre derrière des barreaux. En revanche, la législation permet aux autorités de poursuivre quiconque elles jugeront opportun en utilisant la loi. E tant que correspondant international et journaliste de renommée mondiale, Hedges a voyagé aux quatre coins du monde et dit qu’il a été dans des situations quelque peu difficles voire dangereuses. Sous la loi du NDAA, il pourrait très bien être considéré comme un criminel de guerre aux yeux de l’Amérique.
Sous la loi du NDAA, l’armée peut placer en détention indéfinie “quiconque a fait partie ou a soutenu substantiellement Al Qaïda, les Talibans ou les forces associées et qui est engagé dans des hostilités contre les Etats-Unis.” Comme Hedges et d’autres le font remarquer, des groupes tels que “des forces associées” ne sont jamais définis, le terme “soutien substantiel” n’est également pas défini.
“J’ai mangé un nombre incalculable de fois avec des gens de pays classifiés comme terroristes”, écrit Hedges; “mais cela ne fait pas de moi un terroriste”. Quoi qu’il en soit, toute affiliation avec de tels groupes ayant ce label peut amener les autorités à sauter sur les conclusions.
Tout le monde, du candidat à la présidence Ron Paul jusqu’à l’Americain Civil Liberties Union (ACLU), a questionné les intentions d’Obama en signant cette loi, mais la mise en demeure judiciaire est la première procédure légale à l’encontre du président.
Quelles que soient les intentions du président à faire du NDAA une loi, a écrit le directeur exécutif de l’ACLU Anthony Romero, “l’action d’Obama est une tâche sur son héritage, car il sera à jamais connu comme le président qui a signé en loi la détention indéfinie sans autre forme de procès.”
Hedges croit savoir quelles sont ces intentions.
“Je suspecte que le but réel de cette loi est de museler les mouvements internes qui menacent l’état corporatiste”, dit Hedges, “La définition d’un terroriste est déjà tellement polymorphe sous le Patriot Act, que cela qualifie sûrement plusieurs millions de citoyens américains à être sujets à une enquête, si pas de facto détenus”. Quand cette nouvelle législation sera mise en commun avec le NDAA, le résultat pourrait être catastrophique.
“Je suspecte que cela a été voté à cause de la grosse industrie, qui voyant les troubles sociaux dans les rues, sachant que cela va devenir bien pire, s’inquiète que le mouvement d’occupation ne s’étende et ne croit plus en la police pour la protéger.” Conclut Hedges. “Ils veulent être en mesure de faire appel à l’armée et maintenant… ils le peuvent.”
Source : Mondialisation.ca