La tentation brune de l’arc en ciel

Publié le 18 janvier 2012 par Chezfab

Je suis mal à l’aise ces derniers temps. Mal à l’aise parce que je suis « membre de fait » d’une communauté appeler LGBTI ou Queer. Je me retrouve à l’observer (par goût) et ce que je constate ne m’amuse pas.

Mais que se passe-t-il dans la tête de pas mal de personnes ces temps-ci ? Pourquoi lis-je ou entends-je de plus en plus cette assertion que je pensais inimaginable ? Oui, depuis quelques mois maintenant, le vote Le Pen n’est plus tabou au sein de la « communauté ». Pire, il semble y prendre un poids bien au-delà du raisonnable.

Tout commence pour moi par des discussions, au départ sans fond politique, sur les réseaux sociaux (oui on a beau se dire que c’est de la merde, c’est prenant quand même). Ca part dans tous les sens ce genre de discussions, mais ces derniers temps, fréquemment, le dérapage est là très vite. Généralement, cela démarre avec une remarque sur « les musulmans ». Puis sur un supposé « intégrisme fort » pour se terminer par « moi, de toute façon, je pense qu’en 2012 je vote Le Pen, c’est la seule qui veut protéger les pd ». Oui je résume, en forçant très peu le trait ceci dit.

Qu’est ce qui peut pousser une minorité souvent mise à mal dans l’histoire comme au présent à accepter de voter, d’adhérer à des idées, contre elle-même ? C’est un peu le réflexe de l’ouvrier blanc contre le basané… Un oubli de classe ou de lutte commune au profit d’un égoïsme mal placé.

D’ailleurs, on voit même apparaitre sur Facebook des groupes du genre « les gays avec Marine » ou autre… C’est dire !

Il faut avoir la mémoire courte pour ne pas se souvenir des propos et écrits du parti de Le Pen père et filles. De la discrimination homophobe en passant par le rejet des séropositifs, la propagation de rumeurs infondées mais destructrices à propos de la propagation du SIDA, la haine viscérale affichée au moment du PACS. Tout cela serait oublié, du passé ? Il faut une grande candeur pour le croire !

En fait, la force de Le Pen, bien aidée par le gouvernement en place et certaines personnes de « gauche », c’est d’avoir réussi à instrumentaliser le fantasme autour des « musulmans » et d’avoir désigné avec force un ennemi intérieur au nom de la « laïcité » (autre mot qu’elle dévoie chaque jour). En s’appuyant là-dessus, elle peut dresser les opprimés les uns contre les autres. Au profit d’une seule chose : sa soif de pouvoir et de nuisance.

Faisant d’ailleurs oublier un peu vite que, globalement, toutes les religions rejettent les homosexuel(le)s et transgenres… Pratique quand on sait que le FHaine est un nid à catholiques intégristes !

Mais je suis dubitatif néanmoins sur la part que cela semble prendre dans le milieu gay (pour faire un raccourci).

Combien de temps a-t-on dû se battre pour obtenir la reconnaissance de nos morts sous les fascismes et autres barbaries dans le monde, pour qu’aujourd’hui on ose porter un parti dont la plupart des membres réécrivent l’histoire ? Combien de combats pour la reconnaissance des droits des malades pour aller vers un parti qui les méprise ? Combien de luttes encore à mener pour l’égalité des droits pour aller vers un parti qui nous promet une ségrégation bien propre ? Combien d’années de combat pour ne plus être vus comme des malades mentaux pour aller vers un parti où l’homosexualité est vue comme déviance ?

Bien que la proportion soit inférieure dans le milieu gay qu’ailleurs il ne faut pas nier que l’augmentation des envies de vote pour Le Pen est en augmentation. Et cela ne peut que nous interpeler.

Chaque fois qu’un groupe, plus ou moins important, oublie la lecture de classe et d’oppression qui le concerne, il finit par voter ou adhérer aux pires idées, des idées contre lui-même, et qui, in fine, arrivent au pire.

Aujourd’hui, le virage à droite de la société est palpable, les idées merdeuses du FHaine se propagent, mais pire que tout, même certains de ceux qui devraient avoir le reflexe de combattre ces idées, ne serait-ce que par la « place » que leur octroie la société, se retrouvent à agir contre eux.

Certes, une sexualité ne fait pas le un vote, mais l’ostracisme qui entoure cette sexualité en question devrait pousser à penser autrement son rapport au monde. Ce n’est surement pas en opprimant d’autres minorités que l’on ira mieux.

Décidément, le fascisme c’est la gangrène, on l’élimine ou on en crève.