Magazine Afrique

Les Algériens font la politique autrement

Publié le 18 janvier 2012 par Amroune Layachi

Les Algériens font la politique autrement

environ 97% d'Algériens n'adhèrent à aucun parti et 84,5% ne s'intéressent pas aux questions politiques.

Selon une enquête réalisée par un groupe de recherche algérien pour le compte d'Arab Barometer, un organisme de recherche constitué d'universitaires américains et de chercheurs arabes, 52% des Algériens n'accordent aucune confiance aux partis politiques. Scandaleux! Selon la même enquête, près de 97% n'adhèrent à aucun parti, 84,5% ne s'intéressent pas à la politique et 60% veulent des lois respectueuses de la charia. Désastreux du fait que les dizaines de partis existant depuis plus de 20 ans n'ont réussi à faire adhérer que 3% des Algériens à leurs structures. Cependant, cela ne signifie pas que les Algériens ne font pas de la politique. Bien plus, ils la font autrement et au quotidien.
Pour eux, couper la route, brûler un pneu, fermer une APC, participer à un rassemblement ou toute autre action de protestation est un acte politique. Le décor est planté depuis plus d'un an où les mouvements de protestation sont signalés chaque jour. C'est dire autant d'actes politiques qui s'accomplissent dans la rue.


«Je n'ai jamais adhéré à un parti et je ne suis pas prêt à le faire. Mais la politique je la fais au quotidien et chaque action de protestation à laquelle je participe, je la considère comme un acte politique», souligne Fateh, étudiant en 3e années de médecine.


Pourquoi donc les Algériens n'adhérent pas aux partis? «Premièrement, il y a la défaillance de la classe politique, d'où la méfiance des citoyens qui boudent les partis. Ensuite, il y a la diabolisation de la participation à la vie politique, exercée par le pouvoir, oubliant que chaque mouvement de protestation est un acte politique», explique un politologue, citant la crise de confiance, la défaillance de la classe politique et son manque de crédibilité, la diabolisation de la pratique politique, la peur et le mensonge, souligne notre source.


Comment est matérialisée cette diabolisation?


«Aux enseignants, on demande de ne pas se structurer dans des partis politiques car ce n'est pas leur mission. Aux médecins, on dit la même chose. Aux journalistes, on dit qu'il est incompatible de faire la politique et le journalisme en même temps. Aux syndicalistes et aux gens du mouvement associatif, on fait croire que la politique n'est pas leur terrain de prédilection», explique le même politologue. Résultat: les catégories professionnelles sont peu ou ne sont pas du tout encadrées politiquement. Elles votent quand on le leur demande et c'est généralement l'administration qui décide à leur place.


Cette politique semble porter ses fruits. A un président d'une association culturelle en Kabylie maritime, on a réclamé la démission. La raison invoquée est qu'il était membre d'un parti politique. «C'est avant tout un problème de discipline, mais la politique du pouvoir de dresser un fossé entre le politique et la société et de tout pervertir a payé. C'est pourquoi, il faut militer sur le double plan pour rétablir les choses», souligne Dahmane Laker, président de cette association. Il y a aussi la peur des fonctionnaires d'adhérer aux partis de l'opposition démocratique. C'est une source de s'attirer les foudres de l'administration. «Adhérer à un parti comme le RCD, qui est radical dans toutes ses positions, est un risque pour un fonctionnaire dans une administration publique», a argué le même politologue. Notre interlocuteur ajoute un facteur qui est, à ses yeux, le plus préjudiciable: la crise de confiance envers les institutions, y compris les partis politiques.


Abane Ramdane disait qu'il n'y a de réussite qu'à partir de la vérité. Or, les gouvernants algériens ont tout le temps caché la vérité allant jusqu'à falsifier l'histoire. Résultat: les partis au pouvoir sont vomis par le peuple qui ne croit plus à la démocratie. Les partis démocratiques sont de plus en plus isolés et divisés. La solution, les Algériens imprégnés pour la majorité des préceptes religieux la voient dans les lois divines.
Selon l'enquête d'Arab Barometer, 60% des Algériens veulent l'application de la charia. «A leurs yeux, il n'y a que la charia qui peut endiguer les inégalités sociales cultivées par le pouvoir depuis 1962», estime le politologue, rappelant que l'Ecole algérienne n'enseigne que la charia aux écoliers.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Amroune Layachi 398 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte