Hanna est une jeune australienne, restauratrice de manuscrits anciens. En 1996, elle est en mission à Sarajevo où on lui a confié la célèbre Haggadah, un manuscrit hébreu très ancien et très précieux, aux enluminures de toute beauté, créé dans l’Espagne médiévale et qu’un musulman bosniaque, directeur de musée, vient de sauver des bombardements de la ville.
Peu à peu Hanna se passionne pour son travail et n’a de cesse de retrouver l’histoire de l’ ouvrage sacré. Grâce à de minuscules indices qu’elles recueillent et fait analyser, elle parvient, étape après étape, à remonter les siècles jusqu’à l’époque de sa création, à Séville, en 1480. Elle fait revivre ainsi des moments historiques tragiques où le livre a failli disparaître. Tous sont liés à des lieux célèbres et à des personnages de communautés très variées et de toutes sortes de conditions sociales. Tous ont des personnalités fortes, odieuses ou émouvantes mais le destin de la Haggadah est entre leurs mains à un moment critique de leur vie et c’est ce qui nous est raconté en alternance avec la vie d’Hanna, la chercheuse dont le destin familial n’est d’ailleurs pas le moins banal, prise entre sa mère, une brillante chirurgienne du cerveau avec laquelle elle ne peut s’entendre et un père qu’elle n’a pas connu et dont elle ne saura la véritable identité que très tard, révélation qui transforme sa vie.
C’est romanesque à souhait et je me suis suffisamment bien identifiée à l’héroïne dès le départ pour aimer la retrouver après les plongées dans le passé qui m’ont également envoûtée tant l’imagination de la romancière fait des merveilles en s’appuyant sur des recherches et des détails historiques, d’une grande précision
C’est ainsi que je me suis sentie menacée tour à tour par les nazis en 1940, la censure vénitienne et ses autodafés en 1609, la cruelle inquisition, à Taragonne, en 1492, au moment de l’expulsion des juifs espagnols pour revenir en Australie et à Sarajevo avec les problèmes de ce début de siècle.
C’est une sorte d’odyssée autour d’une œuvre d’art qui est avant tout un objet sacré et c’est très habilement mené. J'ai été embarquée dans cette histoire de la première à la dernière page avec un énorme plaisir et un grand intérêt pour les évocations historiques d’un grand réalisme.
C’est un de ces grands romans plein de souffle et de vues généreuses, comme je les aime. On y parle de tout avec beaucoup de rythme et une grande ampleur de vue. La lectrice en moi aime quand l’auteur sait lui tenir fermement la bride pour le mener où il veut, même très loin, au gré de sa fantaisie à lui, l’artiste.
C'est aussi un livre plein d'humanité, une leçon de tolérance et d'humilité par une romancière dont c'est le 3ème roman.
Geraldine Brooks. "Née en Australie, elle vit aujourd'hui aux États-Unis, sur l'île de Vineyard (Massachusetts). Correspondante de guerre pendant quatorze ans, elle a couvert des combats en Bosnie, en Somalie et au Moyen-Orient. Une incarcération dans les geôles nigériennes la pousse à abandonner le journalisme. Son premier roman paraît en 2003. Elle reçoit le Prix Pulitzer avec le suivant « March », en 2006." Le Livre d'Hanna figure toujours sur les listes des meilleures ventes aux États-Unis depuis sa parution en 2008."
Dédicace du roman: "Pour les bibliothécaires"«Là où on brûle les livres, on finit par brûler les hommes.» Heinrich Heine
Le livre d’Hanna de Geraldine Brooks. Traduit de l’américain par Anne Rabinovitch (Éditions de Noyelles, 2008, 416 p) Titre original: People of the book