Lundi 16 Janvier 2012
Excès de zèle d'une employée de Free Mobile, résultat de la galvanisation du personnel par un président Gourou, simple méconnaissance du web 2.0 et du Community Management, ou pure inconscience qui confère à la connerie ? Une employée infiltre à visage découvert la page Facebook de Bouygues Télécom, se fait démasquer et réitère peu de temps après sur celle de SFR.
Acte 1 : La Troll de Free Mobile infiltre la page Facebook de Bouygues Télécom
Une employée, Emmanuelle B., fait le buzz sur le web en publiant, mercredi 11 janvier, un commentaire sur la page Facebook de Bouygues Telecom. « Si comme moi vous êtes engagés pour encore un certain temps auprès de votre opérateur, réduisez au max l'abonnement et prenez un autre numéro chez Free... ».
Pas très clean comme méthode de promotion de l'offre de Free Mobile. Emmanuelle B. est-elle vraiment abonnée chez SFR ? (On n'a pas pu le vérifier, mais vous verrez plus loin dans cette note qu'elle est aussi abonnée chez Bouygues Télécom. Il ne manque qu'Orange :) ! )
Le fair play du Community Manager de Bouygues Télécom
En réponse, Tanuy, le Community Manager de Bouygues Telecom, se montre de son côté Fairplay fairplay : « Hello Emmanuelle, bienvenue sur notre page super ouverte ! Rrrrooooh, c'est moche ça on me dit que vous travaillez chez Free, pas très fair de venir recruter sur notre page ;) Allez on est sympa, on garde votre post... ».
La Troll de Free Mobile persiste et signe...
L'affaire aurait pu s'arrêter là. Mais, prise les doigts dans le pot de confiture, Emmanuelle B. en rajoute : « Qu'est-ce qui est moche?? Je travaille chez Free oui et alors ? Franchement, au vu des commentaires sur votre page, vous croyez vraiment qu'ils ont besoin de moi pour recruter ??... »
Pourquoi Free Mobile troll-t-il ses concurrents ?
Justement, si Free Mobile est si sûr de son offre, pourquoi en rajouter dans ce concert de louanges inconsidérées qui domine actuellement le buzz sur les réseaux sociaux ? Les journalistes, dont le métier et l'éthique supposent en principe de procéder à des vérifications et recoupements, qui osent émettre des objections ont bien du mal à se faire entendre.
La vérité, c'est qu'il faut aller vite. Xavier Niel a fixé un objectif ambitieux pour Free Mobile : conquérir un quart des 65 millions d'abonnés au téléphone mobile en France. Casseur de prix, son modèle économique impose de réduire les coûts. Pour le marketing, il mise sur la communication virale, le buzz, pour conquérir ses clients sans bourse délier (ou presque). Il est donc essentiel de pousser l'avantage au maximum, avant que les premiers avis négatifs se fassent entendre sur le net. Et ils ne manqueront pas d'arriver une fois les premières factures reçues (basée sur un forfait à 19,99 €, la facture Free Mobile peut s'avérer exhorbitante en cas de hors forfait, par exemple à l'occasion d'un voyage à l'étranger) ou lorsque fleuriront les plaintes d'abonnés qui se seront frottés au service client de Free Mobile.
Si Xavier Niel est en désaccord avec ces pratiques de promotion de l'offre de Free Mobile, il lui reste toujours la possibilité de désavouer publiquement son employée et de la sanctionner. Qui ne dit mot consent.
Bis repetita : la Troll de Free Mobile infiltre la page Facebook de SFR
Bien que démasquée sur le page Facebook de Bouygues Télécom, la Troll de Free Mobile récidive huit heures plus tard chez un autre concurrent sur la page SFR Live Concert :
« AUCUN AUTRE MOYEN D'EXPRESSION :
SFR :
"- Pour changer de forfait : bim réengage...ment de 12 mois minimum,
- Pour passer au Carré mini à 10€, bim 150 € de frais de migration"
- Le plus petit forfait proposé sans réengagement ni frais : 4h + 40 sms pour 34 € !!!
...et tout ça sans nouveau téléphone hein !!
...Est-ce pour me remercier de mes 11 ans de fidélité ?
Après le foutage de gueule vous donnez dans la prise d'otage ! C'est ça votre riposte ??????!!!!
NB : pour passer du prélèvement automatique à un autre mode de paiement, frais 1,50 € mensuels »
Méfiante, la Community Manager de SFR lui demande si elle est cliente SFR ou salariée de Free.
Emmanuelle B ne se démonte pas. La Troll de Free Mobile, qui prétendait 8 heures plus tôt être cliente de Bouygues Télécom répond sans se démonter : « Pensez-vous que les deux soient incompatibles ? Je parle ici en tant qu'abonnée SFR depuis 11 ans, je ne fais pas de discours corporate ou alors tout le monde en fait ;) »
C'en est trop ! Les internautes commence à réagir. Une internaute publie alors le commentaire suivant sur la page SFR Live Concert :« C'est pour ça Emmanuelle que vous allez AUSSI écrire le même genre de message sur la fanpage de Bouygues. MAIS BIEN SUR ».
Pour ma part je trouve assez malsain les excès du buzz qui accompagne l'annonce de l'offre de Free Mobile. Traiter les autres opérateurs de "voleurs" oubliant les investissements colossaux qu'ils ont du consentir pour déployer les différentes génération de réseaux mobiles en France, ou le prix exhorbitant acquitté par Orange et SFR pour obtenir leur licence 3G, ou encore ce qu'il leur en coûte d'avoir mis en place des services clients efficaces et un réseau de points de vente de proximité, est en réalité exagéré. Rappelons que Free Mobile ne couvre qu'un tiers du territoire avec son propre réseau. Pour les reste, il loue des capacités à Orange. En matière de service clientèle, Free est loin d'avoir fait ses preuves... Et je veux bien qu'on parle de "foutage de gueule" à propos des autres opérateurs, mais que dire de Xavier Niel qui se satisfait sur la plateau du Grand Journal de Canal Plus d'un taux de décrochage de 48% de son service client ??? Une question qu'il a évacué avec mépris, affirmant que si un client appelle deux fois, on lui répond. Faux : 48% c'est une moyenne ; on peut appeler dix fois de suite, sans réponse. Si ce n'est pas du "foutage de gueule" comment appeler cela ?
Des dérapages, il y a en eu et il y en aura encore. Comme ce fake qui a circulé sur la toile : le Community Manager de SFR qui aurait écrit sur sa page « Si vous n'êtes pas content, la porte est ouverte... ». Peu crédible pour un Comnunity Manager et pour cause, le commentaire a été déposé par un profil - et non une page - créé pour l'occasion, qui avait à ce moment aucun ami et aucune description. Un fake facile a débusquer... mais le buzz a pourtant fait le tour des réseaux sociaux porté par des internautes hypnotisés par le tarif de Free Mobile et trop contents d'en découdre avec un des opérateurs historiques. Autre fake : l'enregistrement d'une prétendue conversation avec le service clientèle de SFR qui sonne tellement faux que la manipulation apparait grossière. On est loin de la transparence revendiquée par Xavier Niel et le consommateur n'a rien à y gagner.
Une e-reputation mise en pièces.
Emmanuelle B. voulait promouvoir l'image de son entreprise, bien qu'elle se défende de faire du discours coroporate dans son commentaire sur la page SFR Live Concert. Je ne veux pas l'accabler... je pense que la dure réalité du web doit être déjà assez lourde à porter. Sur son profil Viadeo, on apprend qu'elle est "display manager" chez Free. Je ne sais pas exactement à quoi ça correspond. Peut-être ne connait-elle pas les règles les plus élémentaires du Community Management. Peut-être a-t-elle pêché par simple excès de zèle. Peut-être a--elle été manipulée par un système, par son employeur...
Toujours est-il qu'elle a réduit à néant son e-reputation et que cela sera lourd de conséquence pour elle.
En quelques minutes la polémique s'est enflammée sur Twitter. A tel point que le hashtag #valerieBertaudière a fait son apparition en moins de 30 minutes dans les Trend Topics (les 10 sujets les plus discutés sur le réseau de microblogging). Sa présence numérique a été alors passée au crible : son profil Facebook, son profil Viadeo... A tel point que pour se préserver, elle a été obliger de fermer ses comptes sur les réseaux sociaux. Trop tard.
Je ne suis pas sûr que le silence soit la meilleure solution pour Emmanuelle. Le web est un monde impitoyable et il a la mémoire tenace. Cette affaire risque de la poursuivre pendant longtemps et d'avoir des conséquences sur sa carrière. Le premier geste des recruteurs d'aujourd'hui n'est-il pas de tapper le nom des candidats sur Google ?
Le mieux pour Emmanuelle, ce serait sans doute de prendre la parole avec sincérité pour présenter ses excuses et expliquer, sans langue de bois, ce qui l'a conduit à un tel comportement. Ca ne résoudra pas tous les problèmes, mais la sincérité et la transparence paient toujours dans l'univers du web 2.0.
Si elle a pêché par naïveté, elle doit assumer. Des excuses vraies et sincères devraient ralentir la polémique.
Si elle a été victime d'une manipulation de la part de Free Mobile (à quel que niveau et sous quelle que forme que ce soit), qu'elle le dise aussi et révèle publiquement les conditions de cette manipulation. Son rôle de victime passera alors au second plan et les internautes se déchaineront alors contre Free Mobile. Le prix à payer en terme de perte de e-reputation est trop élevé et excède de beaucoup le devoir de loyauté vis-à-vis de son employeur.
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Et comme je ne doute pas que le Community Manager et le service de communication de Free Mobile, s'ils font leur travail, liront cette note, je les invite à faire part de la position officielle de Free Mobile sous forme de commentaire.
Bien entendu, si Emmanuelle B. souhaite s'exprimer sur cette affaire (même si je doute qu'elle lise actuellement ce qui circule sur elle sur internet, préférant probablement se protéger), les colonnes de ce blogs lui sont ouvertes.