Aucun mystère évidemment puisqu’elle passe son temps à crier de joie dès que le chat de la maison s’approche d’elle, prudemment et à distance car il est plus craintif qu’elle qui lui tirerait la queue à longueur de journée si je la laissais faire. L’ours du livre a une peau en tissu très doux qui lui rappelle son ours à elle, son doudou, avec lequel elle s’endort. Alors la liseuse entre ses mains, c’est un vrai bonheur.
Elle affectionne le bouton magique du bas, celui qui ouvre et ferme tout. Mille petits dessins logos apparaissent alors ou c’est le clavier azerty qui fait son apparition. L’un et l’autre lui plaisent de toute façon. Son plaisir est toujours le même: taper et taper encore, n’importe où. Il y a toujours de nouvelles images qui apparaissent. Elle adore ça et crie de joie. Elle leur parle – dans son langage- que personne ne comprend encore. Elle s’adresse à moi ou à la liseuse, c’est selon, mais elle a l’air très convaincue. Alors j’acquiesce et je la laisse faire!
Cette liseuse ne s’est encore jamais cassée et pourtant ce n’est pas faute d’être tombée maintes et maintes fois Elle ne s’est jamais enrayée ou arrêtée. Elle est d’une obéissance et d’une solidité à toute épreuve. J’admire. C’est un très bel objet auquel je finis par m’habituer. C’est seulement que je ne sais pas encore très bien y faire avec elle. Je n’y mets que des livres anciens, ceux qui font partie du patrimoine, les gratuits. C’est déjà énorme!
C’est un billet écrit sur une idée trouvée chez Cuné qui présente le livre de Paul Fournel : La liseuse, justement, avec de très belles premières pages, à consulter librement.
«Elle est noire, elle est froide, elle est hostile, elle ne m’aime pas. Aucun bouton ne protrude au dehors, aucune poignée pour la mieux tenir, pour la balancer à bout de bras comme un cartable mince, que du high-tech luxe, chic comme un Suédois brun. Du noir mat, du noir glauque (au choix), du lisse, du doux, du vitré, du pas lourd. Je soupèse. Je la pose sur le bureau et je couche ma joue dessus. Elle est froide, elle ne fait pas de bruit, elle ne se froisse pas, elle ne macule pas. Rien ne laisse à penser qu’elle a tous les livres dans le ventre. Elle est juste malcommode : trop petite, elle flotte dans ma serviette, trop grande, elle ne se glisse pas dans ma poche.»