" Comme si on ne le murait pas dans l'hypocrisie, le vieillard en qui tout se fait débâcle, et dont on exige toujours qu'il soit bien tenu ! Comme si tout le monde ne se liguait pas - et les siens plus durement que les autres - pour l'empêcher de parler de ses petits malaises dont il va mourir bientôt. Il en a pourtant envie. Il en a pourtant besoin quelquefois. Et ce ne sont pas des malaises imaginaires. On parle autour de lui, on lui parle comme si de rien n'était : héritages, soucis de famille, dividendes, mariages, procès en cours, affaires courantes. Comme si les affaires pour lui pouvaient continuer à courir, pouvaient espérer le rattraper où il va ! Parfois - de plus en plus souvent - il se fait une accalmie dans le remue-ménage, et un bruit monte pour lequel seul il a maintenant des oreilles : celui des berges battues par les vagues, qui s'enfuient à toute vitesse, derrière le navire débouchant dans la haute mer.. "
Julien Gracq : extrait de " Le rivage des Syrtes " Editions José Corti, 1951
Mourir de faire le
pitre
Pour dérider le désert
Mourir face au
cancer
Mourir couvert d'honneur
Et ruisselant
d'argent
Asphyxié sous les fleurs
Mourir en monument
Mourir au bout d'une
blonde
Là où rien ne se passe
Où le temps nous dépasse
Où le lit tombe en tombe
Mourir
insignifiant
Au fond d'une tisane
Entre un médicament
Et un fruit qui se fane
Mourir cela n'est rien
Mourir la belle affaire
Mais vieillir ô ô vieillir!
Jacques Brel : extraits de " vieillir " 1977