A propos de J.Edgar de Clint Eatswood 3.5 out of 5 stars
Leonardo Di Caprio
Biographie consacrée au sulfureux créateur du F.B.I. (Federal Bureau of Investigation) et qui en fut le directeur sous huit présidents différents, de 1924 à sa mort, J. Edgar revient sur les nombreuses zones d’ombre politiques de J. Edgar Hoover (1895-1972) et de l’Amérique du XXème siècle mais surtout sur sa vie privée et sa relation homosexuelle supposée avec son bras droit, Clyde Tolson, qu’il a toujours voulu garder secrète…
De J. Edgar Hoover, nul n’est besoin de retracer en détails la biographie (deux clics sur Internet suffisent). Malgré la véracité des faits qu’il raconte, J.Edgar n’est pas un documentaire mais un portrait intimiste. Le scénario habile de Dustin Lance Black (Harvey Milk) consiste à jalonner la biographie du mythique Directeur du FBI (aux méthodes pour le moins douteuses) de faits historiques marquants et avérés comme la fameuse et tragique affaire de l’enlèvement et de la mort du fils de l’aviateur Charles Lindbergh (1932) par exemple, qui donna naissance à la police scientifique et au FBI (1935).
L’histoire commence à la fin de la vie de Hoover (Leonardo Di Caprio, qui, en vieillard grimé, fait penser par moments à Marlon Brando dans Le parrain), lorsque celui-ci, arrivé à la fin de sa vie, dicte à d’élégants agents du FBI ses Mémoires en arrangeant la vérité sur les arrestations de célèbres gangsters (dont Dillinger, pour ne citer que lui). La lumière est basse, la pièce plongée dans un clair-obscur qui est la marque de fabrique du chef-opérateur Tom Stern depuis ses Lettres d’Iwo Jima (2006) et une constante dans J.Edgar.
Leonardo Di Caprio
Manipulateur, Hoover le restera jusque dans son autobiographie. Mais le portrait qu’en fait Eastwood est nuancé, qui dessine les contours d’un personnage politique impitoyable (dans sa manière par exemple de harceler Martin Luther King qu’il détestait, étant raciste) et manipulant les Présidents (notamment Kennedy) mais dans la vie privée, un vieux garçon triste au point de friser le pathétique.
Dans ses subtils allers-retours entre les débuts de Hoover en 1919 et le terme de sa carrière, Eastwood décrit bien l’amour et l’attachement que Hoover porta à sa mère jusqu’à la fin de sa vie (il se travestit en enfilant sa robe et son collier de perles après sa mort). Sa mère, à qui il a toujours voulu prouver ses ambitions en même temps que cacher son attirance pour les hommes. Hoover est un carriériste rigide et sans imagination qui a su corriger son bégaiement infantile grâce aux efforts redoublés de sa mère (scène marquante devant elle et sa glace).
A 24 ans, il est déjà directeur de la General Intelligence Division et participe de près à l’organisation des Palmer Raids, responsables de l’arrestation et de la déportation de nombreux gauchistes et anarchistes américains. La peur des Communistes, du « péril rouge », c’est ce qui hantera toute sa vie Hoover.
Armie Hammer, Leonardo Di Caprio
Au début des années 1970 (sous la présidence Nixon), au moment donc où il dicte ses fameuses Mémoires, Hoover s’est encore davantage rapproché de Clyde Tolson (victime d’une attaque), son fidèle second, dont on suppose qu’il fut secrètement amoureux. Tolson resta célibataire une grande partie de sa vie. Tolson et Hoover partaient souvent en vacances et ne manquaient jamais un déjeuner ou un diner ensemble. Ils aimaient les courses de chevaux dont Hoover truquait la plupart du temps les paris.
Dans Underworld USA, Ellroy a bien décrit les méthodes illicites voire d’intimidation qu’Hoover n’hésitait pas à employer pour surveiller et contrôler les êtres dont il se méfiait (écoutes téléphoniques, micros, lettres de menace, traque impitoyable des membres des Black Panthers, etc…). Obnubilé par la sécurité intérieure de son pays tout autant que terrorisé par la menace d’une attaque extérieure (en provenance du bloc soviétique), Hoover avait, très jeune, eu l’idée (géniale…) de centraliser des fichiers et inventé le système des empreintes digitales pour identifier les assassins.
Mais ce que l’Histoire ne dit pas, c’est que son aventure impossible avec Tolson (Armie Hammer de la série The Social Network) fut le plus grand drame et le plus grand désastre de toute son existence, à égalité avec la mort de sa mère. Frustration que ressentit tout autant Tolson, amoureux lui aussi d’Hoover. Parfois, on doute sur les intentions d’Eastwood d’avoir voulu, naïvement alors, chercher de l’humanité dans la figure démoniaque et narcissique d’Hoover dont il décrit pourtant bien le besoin de reconnaissance voir d’admiration absolues. Mais malgré le mythe qu’Hoover a toujours voulu entretenir sur lui-même et son pseudo-courage lors d’arrestations auxquelles il ne procéda pas (contrairement à ce qu’il fit croire dans les Comics, la publicité au cinéma ou ses propres Mémoires), il ne pourra jamais jamais être considéré comme un grand homme …
Si on note des longueurs sentimentales dans le film d’Eastwood, c’est surtout la prestation de Di Caprio qui est (une nouvelle fois) saisissante. Dans le rôle d’Hoover, il campe avec maestria (et de manière bluffante) un patron du FBI inamovible et intouchable, aussi terrible dans ses décisions qu’il fut seul dans son existence.
www.youtube.com/watch?v=rSescVJff-s
Film américain de Clint Eastwood avec Leonardo DiCaprio, Naomi Watts, Armie Hammer, Judi Dench, (02 h 17).
Scénario : 3.5 out of 5 stars
Mise en scène : 3.5 out of 5 stars
Acteurs : 4 out of 5 stars
Dialogues : 4 out of 5 stars