Les Seeed font partie des rares reggae-boys à être disque d’or. Et en plus, ils sont allemands. Ca valait bien une petite interview.
Vous pensez avoir acquis de la crédibilité aux yeux des Jamaïcains ?
On a sorti quelques riddims qui ont bien marché comme le Doctor’s Darling (une cover du Water Pumping de Gregory Isaac NDR). Nos chanteurs y vont de temps en temps pour enregistrer des artistes. En gros, les Jamaïcains savent que Seeed, c’est des mecs d’Allemagne qui font des bons trucs. On a un gros son des grosses basses, mais nos productions ne sonnent pas vraiment jamaïcaines.
Votre dernier album, Next, est pourtant très reggae-dancehall.
C’est vrai, mais si on compare avec ce qui est sorti l’année dernière en dancehall jamaïcain, c’est quand même un autre style. Il y a toujours notre touche. Par exemple, placer des cuivres dans les riddims de dancehall, c‘est un truc que personne ne fait. Et on sort tous nos singles en 45 tours.
Et vous envoyez tous vos riddims en Jamaïque ?
Il y a un label allemand, Jamaican Records, qui s’occupe de faire “voicer“ nos riddims en Jamaïque. Ils y vont, ou ils envoient les tracks, et les Bounty Killer et autres Elephant Man enregistrent leur tchatche là-bas. C’est eux qui font ce business pour nous.
Imaginez : vous envoyez un riddim en Jamaïque, et au retour vous avez des lyrics homophobes dessus. Vous faites comment?
Ca ne sera pas sur l’album, c’est sûr. Mais on n’a rien à voir avec ça, on ne vit pas à Kingston, on ne connaît pas toute cette problématique. On est Berlinois, on est ouverts, on ne va pas chanter pour l’homosexualité, mais pas non plus contre. Personnellement, si je sais que tel chanteur tient ce genre de propos, je ne vais pas à son concert. Mais on a travaillé avec tous ces gars. Buju Banton, Elephant Man, ils posent sur nos riddims.
Sur Next, il y a un featuring avec Anthony B et un autre avec Lady Saw. Vous les vouliez vraiment ou c’est le hasard ?
On aimait bien le Water Pumpin d’Anthony B. On s’est dit que ça serait cool de l’avoir en featuring sur l’album, puisqu’on avait aussi repris ce riddim. Lady Saw c’était différent. En fait, quand tu vas en Jamaïque, tu regardes qui est là et qui a un peu de temps pour enregistrer. Lady Saw était dispo, et elle a aimé le morceau. Ca se fait toujours très vite.
Vous essayez de garder une identité allemande ?
Sur Next, il y a quelques morceaux en allemand, dont un sur Berlin. En Allemagne, Suisse et Autriche, il y a toujours plus de morceaux en allemand que sur la version internationale. Pierre, qui est un peu le leader du groupe, arrive bien à toaster en allemand, ce qui n’est pas évident. Il a réussi a créer un style qui roule bien. On touche les gens plus rapidement avec l’Allemand. Mais notre identité, c‘est plutôt Berlin, On ne veut pas sonner comme un groupe jamaïcain, ne pas sonner typiquement reggae, comme le fait Gentleman par exemple.
Et ça marche, vous en êtes à trois disques d’or chez vous.
Ca a commencé à bien fonctionner à partir du premier LP. Ce n’était pas évident de convaincre la maison de disques. A onze. ils nous ont regardé avec des gros yeux. On est onze, on partage tout. Au début, ils voulaient signer les trois chanteurs et le groupe comme backing-band. Mais on n’a pas lâché et je crois qu’on a prouvé qu’on avait raison. On a pu quitter le petit local qu’on avait, c’était intenable.