Le Sèvero, bistrot de viandes, bar à vins.
8 rue des Plantes, 75014 Paris.
Tél. : 01 45 40 40 91.
Pour le Fooding, c’est un élégant bistrot où l’on trouve de bonnes viandes et un patron pas aussi rude que certains l’ont écrit. Description nette sur les restos. 4 étoiles sur 5 sur CityVox (dont mon avis datant de juin 2006!). C’est Thierry, avec son bel article sur le tartare , dans ses Chroniques du Plaisir, qui a suscité ce diner. Certes, le FigaroScope en avait parlé en juin 2004. Soit deux ans après Petitrenaud. Bref, ce n’est pas une nouvelle adresse. En même temps, en l’espace de quelques années, il peut s’en passer des choses…
J’avais testé le tartare au bis du Severo, il y a un peu plus d’un an, je l’avais trouvé bon, très bon même, mais il ne m’avait pas marqué à ce point. Pour moi, un tartare de bœuf, c’est le plat de brasserie par excellence, un plat simple, à base d’ingrédients standard mais de bonne qualité, sans énorme surprise et sans recherche particulière. Souvent, une viande moyenne pourra être atténuée par un bon mélange. Certes, la viande en bouillie, ou trop froide, un peu foncée parce que pré-hachée, ça ne passe pas. L’idéal, c’est en effet le tartare au couteau, ce qui permet de respecter la viande. Mais, de même qu’un bon produit industriel vaut parfois mieux qu’un mauvais truc artisanal, la viande coupée au couteau ne fait pas tout! Toutes choses étant égales par ailleurs, je pense que le meilleur tartare, c’est : un tartare coupé au couteau, avec, bien sur, de bons accompagnements et de bon condiments, et surtout, celui qu’on se prépare soi même (connais-toi toi même, n’est-ce pas? ben prépare ton steak tartare toi même, aussi!), en dosant et ajustant les différents composants. Bon OK, mais s’il arrive déjà préparé? Sans qu’on nous ait demandé comment on le voulait? Dans ce cas, il y aurait un tartare moyen, qui statistiquement, pourrait plaire au maximum. J’aimerais y croire, mais ce n’est pas si simple… Assez de blabla, rien ne vaut le terrain.
Arrivé en Vélib’ un peu avant 20h, j’entre, pose mes affaires, m’installe (table donnant sur la rue Severo, près de l’angle plein). Quelques minutes après, OneYear arrive, s’installe à son tour. Les Chroniques de Thierry ont un succès fou, elle aussi a été influencé par la description élogieuse qui a été faite du tartare.
Dans la salle (à la décoration simple, classique) pas très grande, il y a déjà un peu de monde : plutôt du quinquagénaire + que du très jeune (ou alors avec des parents). Nous choisissons un pot de vin du Sud-Est (vallée du Rhône si mes souvenirs sont bons, autour de 20€) et une carafe d’eau. Notre voisin de gauche, américain de plus de 60 ans, a une descente d’enfer : il fera entrée, plat, fromage (du Saint Nectaire costaud) et dessert, avec du vin.
En entrée, pour commencer, nous partageons une trévise braisée (~8-9€, un peu de name dropping, il me semble). Légère amertume agréable, consistance croquante au début, finalement fondante et onctueuse pour finir. Certes, sur la photo, ça ne ressemble pas à grand chose, comme pour le cadre, on n’est pas au Severo pour le décorum. C’est plutôt consistant et ça se partage bien à deux.
Après une bonne entrée qui prépare bien l’estomac et le palais, nous passons aux choses sérieuses. Très copieux steak tartare + frites (18€) pour OneYear, faux filet saignant (pas la peine de préciser) + frites (26€), pour moi. Comment, je n’ai pas pris le tartare? Non, finalement j’ai craqué pour le faux-filet, et puis je ne me fais pas trop de soucis pour ce qui est de tester ce fameux tartare (par contre je m’en fais sur ma ligne). Commençons par les frites : très bon niveau, bien cuites, belle couleur brune, croustillantes à l’extérieur, bien cuites mais pas mollassonnes à l’intérieur. J’en aurais bien voulu un peu plus dans mon assiette (ou alors, comme les fingers, faudrait les faire un peu plus longues).
Passons ensuite aux viandes… (vous sentez le suspense monter, n’est-ce pas?) Le faux filet est déjà découpé en tranches d’épaisseur moyenne, délicate intention, et présentation agréable, mais du coup ça risque de refroidir plus vite que si c’était en un seul morceau. Je chipote, je sais, il faut bien trouver quelque chose à dire… Name droppons un peu : la viande vient de chez Hugo Desnoyer… La cuisson est impeccable, il y a ce qu’il faut de gras pour garantir un bon gout et éviter que ce ne soit trop sec et ennuyeux. C’est plutôt tendre (en tout cas mon Laguiole damassé) tranche ça comme du beurre mou, mes dents et mes mâchoires de carnassier s’activent, mais sans trop d’effort. C’est bon, tout simplement, mais là encore, je ne dirai pas que c’est le meilleur faux filet que j’aie mangé à Paris (penser à déjeuner un week end au Vieux Paris d’Arcole). Bref, une bonne viande, sans aucun doute dans le top, mais pas forcément au top top.
Pour le tartare, dont je mangerai finalement près du tiers, c’est la même chose : c’est bon, on se fait plaisir et on savoure chaque bouchée, mais je ne me sens pas touché par la grâce, il manque peut être la petite émotion ou un peu d’originalité ou de nouveauté qui ferait toute la différence. Je le trouve d’ailleurs un tout petit peu sec. Un peu comme un enfant premier de sa classe qui aurait tout fait comme il faut, mais un peu mécaniquement, sans forcément se poser de questions. Attention, je le redis : le tartare est très bon, mais un peu mort et ennuyant à mon goût et à mes yeux.
Il reste un peu de place pour des desserts : des pruneaux d’Agen (5-6€) pour OneYear, un flan caramel (~6€) pour moi.
Là encore, c’est nickel, impeccable, des classiques de chez classique, bien foutus, bien dosés, bons. Pas la peine de chercher de l’originalité, ici, ça ne bouge plus : c’est bien comme ça, c’est constant. C’est une qualité qu’il faut bien leur reconnaitre. On termine comme on a commencé : de façon agréable, sans surprises.
Bilan : ~80-85€ à deux (autour de 40-45€ par personne) pour un bon dîner, à base de viandes et de vins, des desserts. En me relisant, je m’aperçois que je leur reproche, finalement, leur constance et leur régularité dans la qualité, et la réalisation. Le service n’est pas si méchant qu’on croit, parfois un peu déroutant (parce que parfois brusque), tout au plus. Le Severo est classique, il n’y a pas l’air d’y avoir eu énormément de modifications depuis quelques années . Tant mieux, ce n’est pas si mal, les endroits où il n’y a pas trop de surprises, ça repose… C’est peut être pour ça que je n’y vais pas si souvent , peut-être que c’est trop prévisible pour moi!