Primaire : Les nouveaux programmes et le salaire au mérite
" Que va gagner la maîtrise du langage et de la langue à cet appauvrissement des perspectives ?" sur le site de l'Afef, Philippe Devaux (Iufm de la Vienne), analyse les nouveaux programmes du primaire. Il dénonce "le discrédit jeté par l'institution sur ses propres productions" , en l'occurrence lesdocuments élaborés à l'occasion des programmes de 2002, modifiés en 2007 et déjà périmés car trop "complexes".Il conclue en estimant que " la posture adoptée et les moyens retenus pour servir des finalités et des exigences sur lesquelles tout le monde peut s’accorder (celles de la justice sociale par exemple, celles qui visent à diminuer drastiquement l’échec scolaire), par leurs concessions appuyées à un air du temps rétrograde, par le brouillage et la déstabilisation des repères institutionnels qu’ils suscitent, par leur refus de s’inscrire dans un mouvement de capitalisation progressive des acquis, des recherches et des expériences – l’heure étant à la « rupture », au « renversement copernicien » –, ne contribuent pas à légitimer le discours institutionnel et à lui faire servir en la circonstance les ambitions du socle commun".
Critique aussi la Ligue de l'enseignement qui affirme sa "déception" devant " un petit goût de fondamentalisme archaïque qui fleure bon la blouse grise, la bonne odeur de craie, la « leçon de morale » du bon vieux temps". La Ligue dénonce "la méthode choisie par ministre qui fait l’impasse sur une réelle concertation de tous les acteurs… Elle a sans doute permis à toutes les pressions opaques de s’exercer, à toutes les idées moisies et restauratrices de faire leur trou : associations disciplinaires les plus corporatistes, « déclinologues » nostalgiques d’une époque qui n’a jamais servique les héritiers et quelques éléments réchappés de la méritocratie…"
Sur le Café, Roland Goigoux marque une certaine colère devant ce texte. " En guise de retour à l’école d’antan, le texte présenté par Xavier Darcos est surtout la consécration du cahier de brouillon ! Ce texte, rédigé sous la pression temporelle de la communication politique sarkozienne, cache mal les traces des « copier-coller » issus des médiocres rapports publiés depuis quelques mois dans le sillage de Gilles de Robien et caractérisés surtout par leur mépris à l’égard du travail enseignant… Ces programmes concoctés dans le plus grand secret constituent une importante régression par rapport à ceux de 2002 qui avaient été le fruit d’une concertation poussée et qui constituaient une ressource pour le travail enseignant".
R. Goigoux estime que le programme se situe "dans un complexe de déplacement des problèmes scolaires vers la seule école primaire" et est la base d'un pilotage du système par l'évaluation. " Le préambule des programmes indique que liberté pédagogique des enseignants implique une responsabilité : « s'assurer et rendre compte des acquis des élèves ». Cette évaluation régulière sera un « instrument de comparaison des effets des pratiques pédagogiques » donc de l’efficacité du travail enseignant. Elle ouvre la porte au salaire au mérite dont rêve la droite dans le cadre de la modernisation de l’administration publique".
A noter également, dans La Croix les interventions sur le retour de la morale. " Qui peut croire que le retour aux maximes moralistes peut permettre de construire des règles de vie collective dans la classe ?" y affirme le Snuipp. Bernard Gorce interroge également Marc Le Bris, ravi, et Luc Bérille (Se-Unsa) pour qui "c’est un retour en arrière qui conçoit l’enfant comme un objet et jamais un acteur. Enfermé dans son statut d’élève, il est là pour se taire, apprendre et réciter".