On suit avec intérêt les tentatives de Facebook de monétiser sa plateforme, suite à la prise de participation de Microsoft, et les levées de bouclier que cela suscite chez les utilisateurs. Il me semble bien que le réseau aux 15 milliards de $ est dans une impasse, victime d’une grossière erreur de stratégie.
La plupart des entreprises Web 2.0 ont construit leur modèle économique sur une unique source de revenus, les recettes tirées de l’affichage de publicité. Contrairement à ce qui se passe dans l’économie traditionnelle et les firmes 1.0, ce n’est pas l’usager bénéficiaire d’un service qui le rémunère mais un tiers, l’annonceur publicitaire.
Dans ce modèle, la recette du succès est assez simple : plus l’application générera de pages vues, plus sera important le nombre de clics rémunérés effectués sur les pages. L’usager étant le principal producteur de contenus (UGC), il est donc logique de lui offrir gratuitement le service et de tout faire pour l’inciter à l’utiliser, voire à le diffuser auprès de son réseau (logique virale des réseaux sociaux).
De là, une gratuité quasi systématique des services proposés et l’ouverture du système aux applications tierces par le biais des API. Ces API sont une sorte de clé qui permet d’installer sur une plateforme des applications tierces. Là aussi, on vise une dynamique virale. Les API Facebook sont légion ; chacun, des plus gros (E-bay, par exemple) au plus petits développeurs indépendants propose son application. Netvibes fonctionne également sur ce modèle service rendu gratuitement aux utilisateurs et technologie largement ouverte par le biais des modules et de l’API.
A première vue, l’échange paraît “gagnant-gagnant” : en offrant sa technologie à des développeurs extérieurs, la plateforme étend ses fonctionnalités à moindre coût et les développeurs d’applications tierces diffusent leur produit à grande échelle, en profitant d’un réseau d’utilisateurs qui ne leur a rien coûté.
Mais c’est une illusion : en offrant gratuitement son service aux utilisateurs et sa technologie aux développeurs extérieurs, la plateforme se prive de toute possibilité de monétiser sa valeur ajoutée auprès de ceux qui en profitent réellement.
Ce web 2.0 fait cadeau de sa valeur ajoutée à ceux qui en profitent réellement pour choisir de se rémunérer exclusivement auprès d’annonceurs publicitaires, qui n’ont finalement d’yeux que pour son aptitude à générer de la page vue. On marche sur la tête…
Le modèle économique d’un Webwag me paraît beaucoup plus viable : le service est monétisé auprès de ceux qui en tirent réellement un avantage, principalement les applications tierces (sites de e-commerce et services en recherche de visibilité).
Edit : curieuse coincidence. Simple entrepreneur publie ce jour un billet intitulé la gratuité dans le web, une illusion à long terme