Trois physiciens, membres de l’Académie des Sciences, viennent de signer une tribune dans Libération pour s’opposer à la sortie du nucléaire. Selon eux, le débat sur l’avenir du nucléaire est parasité par les idéologues des deux camps et ne prend pas la question du nucléaire dans sa globalité.
« Peu de questions sont aussi complexes et intriquées que celles liées à la politique énergétique qui met en jeu la sûreté de nos installations, le coût que nous payons pour l’électricité, le sort d’industries nationales majeures et de leurs emplois, nos exportations, notre dépendance vis-à-vis de pays tiers, et l’impact sur l’environnement, notamment à travers les déchets et l’émission de gaz à effet de serre (GES)« , expliquent en préambule Sébastien Balibar, Yves Bréchet et Edouard Brézin.
Selon eux, le débat sur l’avenir du nucléaire doit prendre en compte plusieurs dimensions : tout d’abord le contexte international d’augmentation de la demande énergétique qui devrait doubler d’ici 2050 ; compte tenu des accords internationaux sur le climat, ce doublement de la demande énergétique devra être accompagnée d’une diminution de 50% des gaz à effet de serre… et les physiciens d’affirmer que ces objectifs (déjà difficiles) seront inatteignables sans nucléaire.
Les auteurs de la tribune insistent ensuite sur la dimension économique et sociale de la filière nucléaire française : « C’est une source d’électricité bon marché, génératrice d’emplois, de ressources à l’exportation, mais c’est surtout une industrie qui n’émet pas de GES. Certes il y a les déchets, mais le volume des déchets très radioactifs, dans les pays qui, comme nous, retraitent les combustibles usés, est très limité« .
Et les auteurs de conclure : « Nous ne pouvons donc pas accepter des annonces de fermeture sans que soit formulée une stratégie réaliste de substitution, respectueuse de la nécessité de préserver notre planète. Nous laissons aux économistes le soin de chiffrer les milliards et les emplois que de telles décisions nous coûteraient. Nous n’avons cessé d’affirmer que la démocratie n’est pas le pouvoir des experts, que la décision appartient bien à ceux qui tirent leur légitimité d’une élection ; mais cette responsabilité que nous leur confions leur donne le devoir d’analyser les perspectives à court et long terme de leurs choix. L’archaïsme est bien du côté de ceux qui se réclament de la sortie du nucléaire« .