Parmi les multiples prédictions qui émaillent ce changement d'année, celles de Brett King font certainement partie des plus intéressantes. En effet, elles émanent de celui qui est non seulement le brillant auteur du célèbre livre "Bank 2.0" mais également le fondateur de la banque de nouvelle génération Movenbank.
Dans un article pour le journal de l'ABA ("American Bankers Association"), Brett King identifie 7 thèmes majeurs, porteurs de fortes ruptures pour le secteur bancaire, recélant autant d'opportunités pour les institutions "historiques" que pour la startup qu'il est en train de créer.
Multi-écran
La révolution du mobile est bien avancée et, malgré quelques hésitations initiales, la plupart des banques proposent désormais une application (voire plusieurs) pour iPhone. Cependant, en 2012, la multiplication et la variété des "écrans" vont prendre une nouvelle dimension, qu'il reste encore à intégrer dans les stratégies.
Cela signifie tout d'abord que l'iPhone n'étant plus aussi dominant, il devient de plus en plus important de fournir des applications pour Android et iPad (et éventuellement BlackBerry et Windows Phone, tant qu'ils survivent). Et l'année 2012 verra peut-être même l'émergence des premiers déploiements de services réalisés en HTML5...
Mais ce n'est pas tout : les plates-formes mobiles prennent progressivement le pas sur les PC traditionnels pour l'accès au web. Dans cette perspective, les sites utilisant la technologie Flash ou présentant des boutons minuscules, des liens hypertextes conçus uniquement pour les clics de souris... – c'est à dire tous ceux qui n'ont pas conçus pour un usage sur smartphone ou tablette – sont condamnés à une perte d'audience et devront donc impérativement être adaptés.
Porte-monnaie mobile
L'année 2011 a déjà été riche en actualité autour du porte-monnaie mobile et des terminaux de paiement, en particulier à travers les annonces de Google et de Square. L'agitation va redoubler dans le secteur en 2012 et tous les acteurs en présence vont se démener pour prendre position.
Dans ce paysage en devenir, les banques vont devoir prendre conscience de leurs limites et de l'impossibilité pour elles d'être les "propriétaires" du porte-monnaie mobile. Suivant l'exemple de Citi (partenaire de Google Wallet), l'avenir se construira plutôt grâce à des collaborations et des coopérations entre des acteurs multiples et variés.
Connaissance du client
Alors que leurs techniques traditionnelles perdent de leur impact, les spécialistes du marketing se tournent vers les réseaux sociaux, le mobile et d'autres technologies pour séduire les consommateurs. Cependant, ces approches s'accompagnent de nouvelles exigences, de ciblage, de personnalisation et d'échanges en temps réel.
Dans ce contexte, la maîtrise de la connaissance du client, sous une vue unique globale, requiert un surcroît de compétences et d'expertises, pour l'analyse des informations disponibles et pour la mise en place de véritables conversations, pertinentes, avec les consommateurs.
Données "intelligentes"
"Big data" est un sujet à la mode mais Brett préfère insister sur la notion de "smart data" (données intelligentes), qui devrait mieux résonner auprès des utilisateurs concernés.
En effet, plus que le volume de données, le point critique de la gestion de l'information réside dans les connexions et la coordination entre de multiples systèmes et participants, internes autant qu'externes. Ce sont ces collaborations étendues qui vont permettre de guider les "bonnes" décisions dans l'organisation.
Conversation
Pour beaucoup d'entreprises, dont les banques, les réseaux sociaux sont traités comme les autres médias, pour diffuser les mêmes messages. Elles commencent cependant à comprendre que les enjeux sont ailleurs, dans le dialogue autour de la marque et des produits et, surtout, dans la portée de la "voix du client".
Ce constat imprègne les organisations quand elles réalisent l'importance que prennent les avis et recommandations des consommateurs sur internet, s'infiltrant partout, dans les moteurs de recherche, les "likes" géolocalisés...
Pour s'adapter, les banques vont devoir rapprocher le service client (où se font les avis et opinions) et le marketing (qui va œuvrer à les "exploiter"). Cette tendance aboutira à la création d'une gestion de la marque transverse à ces deux entités. Plus largement, la "voix du client" impliquera progressivement l'ensemble des collaborateurs et ceux-ci seront invités à participer activement au dialogue sur Twitter et Facebook.
Cœur bancaire
Pour la majorité des établissements historiques, le "cœur bancaire" est le point faible de leurs systèmes informatiques. Datant de plusieurs décennies et construits dans une logique de traitements différés totalement inadaptée aux exigences actuelles de fonctionnement en temps réel, ils constituent le point névralgique des nouveaux canaux de contact de la banque. Cette multiplication des points d'intégration, souvent fragiles, va devenir une cause majeure d'incidents et de dysfonctionnements plus ou moins graves.
Le remplacement est rarement une option, en raison des coûts astronomiques et des risques qu'il représente. Le "cloud computing" pourrait alors constituer une opportunité de transformation progressive, sans nécessiter des investissements massifs.
Paiements P2P
Les consommateurs sont de plus en plus demandeurs de systèmes de paiement P2P (de "pair à pair") pour remplacer les espèces et les chèques. La besoin de solutions simples et économiques, qui explique déjà le succès de PayPal, va conduire à la création de nouvelles offres, notamment par les émetteurs de cartes et SWIFT, tentant de court-circuiter les banques.
Et PayPal continuera à affirmer sa domination...
Plus que des prédictions, c'est en fait un programme que Brett Kink propose aux banques pour 2012. Et, comme il se doit, une bonne partie des actions à entreprendre concerne directement les DSI. Au travail !