Il y a des séries dont le synopsis aiguise fortement la curiosité, d'autres dont la seule lecture du résumé vous ennuie déjà. Et puis il y a des concepts devant lesquels on ne peut s'empêcher de froncer les sourcils, un brin perplexe, en se demandant bien quel résultat cela va donner à l'écran. Eternal Law fait partie de ce dernier type de séries : elle apparaît en effet comme un étonnant mélange de fiction angélique et de legal drama.
La diffusion de la première saison (qui comportera 6 épisodes) a débuté ce jeudi 5 janvier 2012 en Angleterre, sur ITV1. Il faut préciser que l'on retrouve à son origine, Ashley Pharoah et de Matthew Graham, créateurs d'une autre série inclassable qui a marqué le petit écran britannique, Life on Mars (même si, à l'opposé, on se souviendra aussi qu'ils ont commis la très oubliable Bonekickers). Reste que Eternal Law rassemble en plus un joli casting, de Samuel West à Tobias Menzies. Il était donc inconcevable de ne pas tester le pilote... lequel n'a malheureusement pas dissipé les doutes soulevés par l'idée de départ.
Eternal Law suit deux anges, envoyés sur Terre pour aider les humains avec leurs problèmes. Pour cela, ils vont exercer la profession d'avocat dans la ville de York. Parmi eux, Zak Gist fait figure d'ange expérimenté qui a déjà effectué plusieurs missions sur Terre, tandis que Tom Greening découvre pour la première fois la vie parmi les humains, avec la part de curiosité naïve qui l'accompagne. Pour mener à bien leur tâche, ils doivent respecter une règle d'or fondamentale : ils ne peuvent porter atteinte au libre arbitre des individus, alors même qu'ils disposent pourtant du pouvoir d'influencer les humains.
Sur place, Zak retrouve d'anciennes connaissances qui vont venir aider ou entraver leur action. Il y a tout d'abord Mrs Sherringham qui les assiste matériellement dans leur tâche. Mais ils vont également être confrontés à un ange déchu, Richard Pembroke, qui officie pour l'accusation, tandis que les deux anges plaident, dès leur première affaire, pour la défense. Enfin, Zak recroise Hannah, une femme avec laquelle il a une longue histoire par ses précédentes missions.
Pour rentrer dans le pilote de Eternal Law, le téléspectateur doit en quelque sorte faire acte de foi : il s'agit d'admettre quelques dialogues surréalistes et le concept de départ sur lequel la série va se construire : l'histoire d'une intervention angélique par le biais du système judiciaire. Aussi surprenant qu'il puisse paraître a priori, ce premier épisode ne fait guère dans l'originalité pour son incursion dans le fantastique, empruntant des recettes très classiques. Il esquisse ainsi le début d'un cadre mythologique avec un certain nombre de règles à respecter tout en s'interrogeant sur la finalité de la mission confiée aux deux anges, et plus généralement sur le grand plan à l'oeuvre au niveau supérieur. Le tribunal se transforme même en théâtre d'affrontement surnaturel, entre notre duo principal et un ennemi clairement identifiable : un ange déchu. La distribution des rôles à l'audience a d'ailleurs du potentiel, puisque leur opposant est le représentant de l'accusation, tandis que nos héros incarnent la défense.
Malheureusement, si la série intrigue par sa dimension fantastico-angélique, l'étonnant mélange des genres avec le legal drama reste trop maladroit. C'est principalement dû au manque de subtilité et de nuances de l'écriture, laquelle ne parvient pas à crédibiliser l'environnement judiciaire. Le pilote se contente de mettre en scène une première intrigue sans consistance, et qui cède à tous les poncifs et facilités scénaristiques possibles pour se conclure finalement de la plus raccourcie et de la moins juridique des façons. Si l'affaire peine donc à intéresser, les personnages n'en demeurent pas moins plutôt attachants : ils souffrent certes du même défaut d'écriture un peu simpliste, mais l'association bien connue entre un nouveau qui a tout à apprendre et un ancien qui a déjà un long passif derrière lui reste une recette inusable qui a fait ses preuves. A défaut d'originalité, le téléspectateur suit ce duo sans déplaisir.
Sur la forme, Eternal Law bénéficie d'un très beau décor : la ville de York, et elle entreprend plutôt efficacement de le mettre en valeur. Dans l'ensemble, la réalisation est dynamique, parfoi un peu trop nerveuse même. La photographie joue sur les changements de teintes, et n'hésite pas à exploiter la symbolique de certaines scènes. La forme convient donc globalement à la tonalité de la série, également agrémenté d'un générique d'ouverture sympathique qui cadre bien avec le sujet.
Enfin, Eternal Law dispose d'un casting aguéri sur la performance duquel repose au final une bonne partie de l'attrait de la série. Tandis que le toujours impeccable Samuel West (Cambridge Spies, Any human heart) et Ukweli Roach incarnent les deux anges-avocats, leur opposant est joué par un Tobias Menzies (Rome, The Deep) qui n'aime rien tant que ce genre de rôle et qui est comme toujours très convaincant. On retrouve également Orla Brady (Mistresses, The Deep) et Hattie Morahan (Sense & Sensibility).
Bilan : Improbable cocktail des genres entre fantastique angélique et legal drama, Eternal Law ne parvient pas à s'imposer de manière équilibrée et consistante dans ce double registre. Si le pilote remplit en partie son office, en introduisant un cadre mythologique, il échoue à rendre crédible la série dans un versant judiciaire qui reste caricatural. Au final, de ce divertissement un peu étrange, trop souvent maladroit, on retient surtout une idée de base assez surprenante, et comme arguments les plus solides, un casting impeccable et le décor offert par York.
NOTE : 5,75/10