Ministres ou conseillers: ces trouillards du sarkozysme.

Publié le 08 janvier 2012 par Juan
Ils sont souvent sur les plateaux de télévision ou de radio, saisissent le moindre micro qui se présente à eux ou s'épanchent dans la presse. A chaque fois, on entend les mêmes éléments de langage. Les ministres ou secrétaires d'Etat de Nicolas Sarkozy s'affichent comme des soldats sur le front de la réforme et du devoir. Tout l'inverse, espèrent-ils faire comprendre, de ces nombreux candidats adverses qui préfèrent la polémique.
Quelle belle image d'Epinal !
En coulisses, c'est évidemment bien différent. Les uns après les autres, ces ministres et sous-ministres se dépêchent de protéger leurs arrières. Ils pensent tous au job d'après, s'inquiètent d'une débâcle, se cherchent un coin tranquille. Certains n'y parviennent pas, et se sentent déjà sacrifiés. D'autres s'imposent, sans crainte du ridicule.
Observez les démarches. Elles sont révélatrices du Sarkozysme, fort en gueule mais pauvre en courage politique.
Recasés
Parmi les conseillers élyséens ou ministériels, la mobilité est déjà à l'oeuvre.
Le mouvement est même d'ampleur, comme le rappelait récemment Rue89: depuis le printemps dernier, le site a relevé 6 départs au cabinet de Nicolas Sarkozy, 4 chez François Fillon, 5 départs chez Frédéric Mitterrand (Culture), 5 aussi chez Nadine Morano (Formation professionnelle); 4 chez Xavier Bertrand (Travail), Eric Besson (Industrie), Luc Chatel (Education), Claude Guéant (Intérieur) et Valérie Pécresse (Budget).
Certains sont parvenus au pantouflage idéal, comme François Molins, ancien directeur de cabinet du Garde des Sceaux, devenu procureur de Paris ; ou à Catherine Pégard, ancienne journaliste puis conseillère politique à l'Elysée, propulsée à la présidence du château de Versailles.
Mais on peut comprendre ces conseillers. Pour nombre d'entre eux, il faut bien penser au job d'après, qu'il y ait alternance politique ou pas en mai prochain. Tous ne sont pas fonctionnaires.
Mais pour les ministres, l'attention qu'ils portent à leur mandat d'après l'élection est souvent révélatrice d'une inquiétude ou, à défaut, d'un manque de courage.
Ils sont 25, sur les 33 ministres ou secrétaires d'Etat de Nicolas Sarkozy, à être candidats prochaines élections législatives. Certains sont déjà assurés de retrouver leur mandat, même en case de défaite de Nicolas Sarkozy en mai 2012.
Protégés ?
Il y a ceux qui se pensent déjà assurés de recouvrer leur ancien mandat, ancrés qu'ils sont dans une circonscription protégée.
Benoist Apparu était, avant de rejoindre le gouvernement, député dans la 4ème circonscription de la Marne, élu avec 59% des suffrages en juin 2007. Cette circonscription élit des députés RPR puis UMP depuis 1988. Le combat sera rude pour qu'elle passe à gauche en juin prochain. Marie-Anne Montchamp est aussi protégée. Elle a quitté Dominique de Villepin pour rallier Nicolas Sarkozy en 2009 quand le clan sarkozyste s'évertuait à débrancher un à un les soutiens de l'ancien premier ministre. Marie-Anne Montchamp était députée du Val-de-Marne. L'Elysée lui promit un maroquin ministériel ET le soutien de l'UMP aux législatives de 2012. Mais sa circonscription a été supprimée... Elle est partie pour le Benelux.  François Sauvadet est dans une situation similaire. Députée du Nouveau Centre, il a été débauché plus récemment, en 2010, pour décourager Hervé Morin et Jean-Louis Borloo.
François Baroin est l'ancien maire de Troyes, dans l'Aube, il était député du département depuis bientôt 20 ans. Nathalie Kosciusko-Morizet, la ministre de l'Ecologie, était députée de la quatrième circonscription de l'Essonne, à droite depuis 1988. Par ailleurs, elle cumule déjà un mandat régional et municipal (à Longjumeau). Roselyne Bachelot-Narquin était députée de la 1ère circonscription de Maine-et-Loire depuis 1988. Les risques sont mesurés pour juin prochain.
Xavier Bertrand s'imagine candidat à la présidentielle de 2017. Ennemi juré de Jean-François Copé, il sera candidat en Picardie, dans la 2nde circonscription de l'Aisne.Il y est élu depuis 2002. La circonscription longtemps à gauche (PCF) est passée à droite en 1993, avant de revenir socialiste en 1997 puis UMP en 2002. Luc Chatel est tranquille. L'ancien DRH de l'Oréal occupe une circonscription dans la Haute-Marne à droite depuis 24 ans. Bruno Le Maire a récupéré une circonscription dans l'Eure, quand il quitta le cabinet de Dominique de Villepin en 2007. Pierre Lellouche, secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur, était député dans la 4ème circonscription de Paris, à cheval entre le 8ème arrondissement (les Champs Elysées) et le 9ème arrondissement (Saint-Lazare).
Parmi les protégés, on peut aussi compter Valérie Pécresse (Yvelines), Patrick Ollier (Hauts-de-Seine), Nadine Morano (Meurthe-et-Moselle), Jean Leonetti (Alpes-Maritimes), Marc Laffineur (Maine-et-Loire), ou Édouard Courtial dans l'Oise d'Eric Woerth.
Coincés 
D'autres, sont coincés, obligés de rester dans une circonscription pas forcément évidente. Il y a du risque mais  Ils sont candidats car il faut bien l'être, ou pour venger l'affront d'une défaite passée. Mais ils ne peuvent se parachuter dans un coin protégé. Leur ancrage local leur est paru trop fort. Ou le parachutage ailleurs serait incompris.
Il y a Laurent Wauquiez. Il avait hérité du mandat de Jacques Barrot. Il a peu à craindre. Il est de toutes façons coincé par un autre ancrage local, sa mairie du Puy-en-Velay, récupérée en 2008 après une parenthèse socialiste de 6 ans. Alain Juppé avait été battu de justesse aux élections législatives de juin 2007 par la socialiste Lichèle Delaunay. Mais il est difficile pour lui de se trouvé un autre lieu de parachutage que Bordeaux. Il y a été réélu brillamment maire en 2008, rare rescapé de la déroute de la droite dans la quasi-totalité des villes de plus de 100.000 habitants.
Il y a aussi David Douillet, dans les Yvelines. On n'est pas si inquiet pour lui. Il fut parachuté dans les Yvelines en 2009, difficile d'en repartir aussi vite. Mais la circonscription est assez tranquille. Quel courage !
Parachutés 
D'autres enfin, comme François Fillon ou Claude Guéant, se cherchent un point de chute si tranquille qu'on en vient à douter de leur propre courage politique.
François Fillon, le premier ministre lui-même, a décidé de quitter sa Sarthe natale. On aurait pu prendre cela pour du courage, l'envie de se remettre en cause. Et bien non, il s'agit d'un plan de carrière, la maire de Paris puis, pourquoi pas, l'élection présidentielle de 2017. Pour Paris, Fillon voulait assurer ses arrières. Il s'est choisi le 7ème arrondissement de Paris. Après tout, il connaît le quartier, c'est là qu'est installé Matignon. Quel courage !
Claude Guéant s'était trouvé une circonscription en or, croyait-il. L'ancien préfet, ancien directeur de cabinet de Sarkozy à l'intérieur, ancien grand vizir de l'Elysée quand il y était secrétaire général jusqu'en février 2011, avait pensé aux Yvelines, puis s'était rabattu sur Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine. 67% des suffrages pour Nicolas Sarkozy en 2007 tout de même ! Une vraie planque ! Seulement voilà... l'un des impétrants locaux, le jeune Thierry Solère, 40 ans, vice-président UMP du conseil général des Hauts-de-Seine, n'avait pas l'intention d'abandonner l'affaire.
Le cas de Thierry Mariani est tout aussi exemplaire: accroché dans le Vaucluse, il s'est rabattu sur la onzième circonscription des Français de l'étranger, qui couvre de la Russie à la Chine jusqu'au Vanuatu. Il profite d'ailleurs pleinement de son ministère des Transports pour sillonner sa nouvelle gigantesque circonscription... Quel courage politique !
Frédéric Lefebvre, l'ancien suppléant d'André Santini, s'est trouvé une circonscription à l'étranger, parmi les 11 nouvelles créées par Nicolas Sarkozy en juillet 2008. États-Unis-Canada... tout un programme... Il aura quand même un peu de concurrence, car l'un des Balkany s'y présente aussi.