Heito est un spécialiste de la nanotechnologie. Toutefois, il refuse de se soumettre aux projets de son entreprise. Ainsi, cinq de ses collaborateurs décident de punir sa trahison. Après avoir tué sa famille, ses bourreaux lui arrachent les bras et le laissent à son désespoir. Néanmoins, en lui prenant tout, ils ont libéré quelque chose de terrible: un démon de haine.
Dans ce manga, on retrouve l’auteur de Black Jack. Verdict?
Je sais ce qu’on peut dire en lisant le résumé. « Il s’agit simplement d’une bonne vieille vengeance à l’ancienne, d’un homme qui a tout perdu et qui cherche réparation ». Et bien oui. Et non. L’histoire est plus complexe car sinon, elle se serait terminée en 6 tomes, au lieu de 13. Le désespoir est souvent le sujet de ce genre de scénario. Les exemples ne manquent guère mais pas ici. Au-delà de ce sentiment, Heito se sert de la haine pour assouvir sa vengeance. Si bien qu’il est parfois difficile de le considérer comme un gentil au sens propre du terme. Ok, il sauve beaucoup de gens dans son périple mais on a parfois l’impression que c’est une sorte de « dommage collatéral ». En effet, quand on le voit en train de combattre, on peut se demander s’il a vraiment cherché à sauver des vies volontairement.
Mais plus que la vengeance, le scénario repose sur une dualité constante: sciences contre foi. Par foi, il ne faut pas comprendre le sens religieux. C’est plus une forme extrême de la volonté. Les ennemis d’Heito basent leur puissance sur la nanotechnologie, qui leur permet d’être des tueurs plus performants et de matérialiser leur moi profond. Quant à Heito, c’est sa volonté de vengeance qui libère une force tout aussi destructrice et basé sur le mal (à plusieurs reprises, le zethmos montre son désir de meurtre). Et derrière cet affrontement, le mangaka montre à quel point la science n’est pas toujours suffisante pour résoudre les problèmes et que la force de l’esprit est plus puissante. A lui seul, Heito tue cinq personnes boostées par la nanoscience, grâce à sa seule volonté.
Par contre, j’émets une énorme réserve sur la fin. Oui, au cas où tout ne serait pas clair, Dämons est un excellent manga mais quand vient la fin, on sent un désir… inassouvi. Alors qu’on a assisté à l’affrontement final, entre deux monstres rongés par un volonté de destruction incontrôlable, le manga semble s’arrêter brutalement, comme si le mangaka était pressé de finir. Je ne dis pas qu’il est toujours bon d’insister sur les fins mais là, il manque quelque chose d’évident. Tout au long du manga, on se demande quel sera le choix d’Heito, quand sa vengeance sera accomplie. Et rien. C’est le style fin ouverte, mais vraiment ouverte. Et je trouve cela dommage car en regardant le personnage du héros, il aurait été intéressant de voir ce qu’il pense faire de sa nouvelle vie.
Si le héros est à la limite de ce genre de personnage, on peut dire la même chose du méchant. Son passé est déjà original sur le fond mais très intéressant. Mais quand il révèle ses véritables intentions, il prend une autre dimension. Il est difficile de le voir comme totalement méchant. Non, non, je ne blague pas. Progress est certes complètement fou mais son objectif reste pourtant juste. Tout comme Heito, il est l’instrument d’une vengeance: celle de la nature. Toutefois, à la différence du héros, Progress se perd en chemin et oublie son objectif premier. Il s’autoproclame Dieu et dès ce moment, sa puissance décline face à la volonté implacable d’Heito (alors que dans les flashback, on comprenait mieux ses raisons). Ce duo Heito/Progress fonctionne très bien car à plus d’un titre, ils représentent les deux côtés de la vie, échangeant parfois leur place, mais gardant toujours leur opposition.
Dämons est un très bon manga que la fin trop rapide ne gâche pas vraiment. On prend plaisir à lire les aventures d’Heito, porté par un dessin excellent. Je le conseille vivement.