En Suède, certaines religions sont dites “reconnues”, ce qui leur donne un nombre non négligeable de privilèges, même si la pratique religieuse individuelle est libre et peut s’exercer hors du cadre de ces religions.
Dans l’aristocratie des “religions reconnues”, nous nous réjouissons de l’arrivée d’une nouvelle venue, le Kopimisme, qui vient d’y être admise par les instances officielles de l’Etat.
Ce mot vient de l’anglais « copy me » ; l’Eglise kopimiste, fondée en 2010, revendique 3000 membres dans une dizaine de pays. Ce mouvement religieux juge que « l’information est sacrée » et que « la copie est un sacrement ».
Le kopimisme s’inscrit dans le mouvement qui a aussi donné lieu au “parti pirate”, qui a recueilli près de 9 % des voix dans une élection locale à Berlin.
Les valeurs du kopimisme, centrées sur l’idée de générosité, feraient honneur à toute religion ou philosophie, et s’expriment ainsi :
« L’information est sacrée »
« Copiez, téléchargez, partagez ».
Le culte consiste à copier et faire circuler ce qui parait sur internet. La copie est un sacrement.
Comme toutes les religions “reconnues” dans la sphère culturelle à laquelle appartient la Suède, l’Eglise kopimiste a le droit de voir ses pratiques respectées. La liberté religieuse, au sens que les Anglo-Saxons donnent à ce mot, interdit de poursuivre devant les tribunaux un kopimiste qui n’a fait qu’exercer son culte.
Depuis la séparation de l’Église et de l’État en 2000, la Suède a reconnu vingt-deux religions, en plus de l’Église de Suède (luthérienne) , parmi lesquelles les Témoins de Jehovah opposés à la transfusion sanguine, l’”Eglise” (si, si, si …) de Scientologie, les Mormons rêvant de polygamie et le Pentecôtisme s’imaginant “parler en langues”.
Un rapport du département d’État américain publié fin 2010 lui en donne acte. Car bien sur, le peuple supérieur, les Américains, surveillent la Suède, comme les autres pays, pour s’assurer qu’elle applique bien la “liberté religieuse” au sens où les Anglo-Saxons l’entendent.
Donc vi vi vi, la Suède fait les choses comme il faut. Avant, elle avait une Eglise d’Etat (luthérienne) mais maintenant, elle distribue toutes sortes de privilèges à tout un tas de “religions” qui ont la chance d’être “reconnues”.
On estime que 5 % environ de la population est musulmane (450 000 à 500 000 personnes).
On trouve aussi de toute : des Témoins de Jéhovah, des Mormons, des Sikhs reconnaissables à leur poignard à la ceinture, des Hari Krishna, etc …
La plupart de ces groupes ont une pratique faible (d’après le rapport du Département d’Etat précedemment mis en ligne) mais les communautés se regroupent à l’occasion de grandes fêtes quelques fois par an, et elle bénéficient du droit légal de voir leur pratique protégée.
Si une personne pense avoir été discriminée pour sa religion, elle remplit un dossier auprès du Discrimination Ombudsman (DO), et celui-ci, c’est à dire l’Etat, fait avancer son dossier à sa place, au besoin jusqu’au procès. Il a traité 101 plaintes pour discrimination religieuse en 2010. Ah ! mais ! La liberté religieuse est protégée, qu’on vous dit !
Les “discours de haine” contre les religions sont interdits et poursuivis.
Une éducation religieuse à toutes les religions du monde est obligatoire dans les écoles publiques. Ainsi bien sur que des programmes sur l’Holocauste, l’antisémitisme et le racisme.
Dans un tel contexte, on ne voit pas pourquoi l’Eglise Kopimiste ne demanderait pas les mêmes privilèges que les autres.
Certes, elle est récente, mais rien n’oblige à ce qu’une Eglise reconnue soit ancienne.
Certes, certaines de ces pratiques vont contre la loi (en l’occurence, les lois sur les droits d’auteur) mais c’est également le cas de maintes autres religions reconnues. L’Eglise catholique est autorisée à réserver la prêtrise aux hommes, nonobstant le fait qu’en principe la discrimination sexiste est interdite. Les associations juives ne cessent de se dire le peuple élu (ce qui veut dire que les autres peuples ont un statut religieux inférieur), et les textes sacrés musulmans multiplient les passages contraires aux droits des femmes, des homoxesuels et des “infidèles”. Ne sont réellement combattues que les dérives les plus extrèmes des religions : il est évident que, religion ou pas, un crime “d’honneur” est châtié et un sacrifice humain le serait aussi. Mais, en dehors de ces cas extrèmes, les entorses à la loi acceptées au nom de la religion se comptent par dizaines, et ceci en faveur de TOUTES les religions, même si certaines sont plus enclines que d’autres à essayer de substiruer leur “loi divine” aux “lois humaines” d’un Etat démocratique.
Dans un tel contexte, ce n’est que justice que l’Eglise kopimiste demande une petite dispense d’application des lois sur les droits d’auteur en faveur des plus pieux de ses membres, qui ne font qu’appliquer à la lettre le dogme selon lequel la copie sur internet est un sacrement.