La porte du 4D
La porte du 4D
Cinq heures du matin! Cela faisait bien longtemps qu' Annie ne s’était pas levée aussi de bonne heure! Un de ces matins ni froid ni vraiment chaud oů l’on a l’impression de prolonger un sommeil pas terminé , le cerveau au męme rythme que le temps qui se fond avec lui, le corps pourtant en harmonie avec la nature oů l’on perçoit, sur la peau, les moindres embruns venant de la mer, le picotement salé de grains de sable minuscules...
Annie se souvient du temps oů son Pčre la réveillait aux aurores pour des vacances bien méritées, comme un goűt de bonbon acidulé qui éclate en mille feux sous la langue, une impression de bonheur indéfinissable, le paysage ne change pas, mais l’heure apporte une connotation différente, un renouveau, un début de monde ,une renaissance ;au bout de la rue ,luisante d’humidité nocturne, la mer d’un bleu acier ,donne au paysage une couleur angoisse, les réverbčres en fer forgé découpés par la lumičre en squelettes inertes, gardien d’un crépuscule éphémčre, les talons de femme claquent sur le pavé aux arrętes inégales , des pas au tempo saccadé, un chat famélique traverse la rue , des ombres projetées sur les murs mais personne pour en revendiquer l’appartenance...
Dans son ręve, Annie avait déjŕ vu tout ça, marché dans ce décor d’une autre dimension, le cœur qui bat plus vite mais nul serrement de coeur ni d’appréhension, un rendez vous avec cette nuit tout simplement!.. Elle voulait savoir, allé jusqu'au bout. Son regard accrocha en une fraction de seconde LA PORTE : les immenses battants en acier vert de gris recouverts d’une étrange dentelle en fer forgé ,son cœur se mit ŕ battre un peu plus vite, comme animé d’une propre vie, la PORTE
semblait vivre et respirer ,une étrange lueur filtrait par en dessous, verte et vaporeuse, irréelle... Annie va t’elle en franchir le seuil pour enfin savoir ?
La porte s’ouvrit d’une simple pression des doigts, comme mue par une propre vie, juste un souffle, un léger déplacement d’air, pas le moindre bruit , du gris... Annie passa ŕ l’éblouissante lumičre d'un autre monde, un paysage lumineux et apaisant : ŕ sa gauche un champ de blé dont les tons les plus dorés côtoyaient un champ sauvage...Une palette des verts les plus tendres aux foncés profonds ,parsemés de fleurs aux couleurs chatoyantes avec, en fond, comme pour rendre le tableau encore plus beau, les érables aux mille teintes, les jaunes purs ou ocres, les orangés éclatant de ,les rouges vifs se mariant avec les grandes feuilles vertes, un bouquet arc-en ciel d’une nature qui vit..A sa droite, la petite maison ŕ colombages avec sa margelle du puits en pierre de taille,joli pigeonnier avec son toit en ardoise bleu , porte aux motifs laissés sűrement ŕ l’imagination d’un artisan, amoureusement travaillés par des mains habiles...
Le lourd battant de bois laissé entrouvert comme pour une invitation ,Annie franchit le seuil de granit rose taillé dans la masse , la pičce plongée dans une douce pénombre, seulement transpercée par deux épées de lumičre, la cheminée éclairée par un feu crépitant de bűches rougeoyantes, une forme indéfinie ,comme un ętre humain mais ŕ qui on aurait enlevé toute consistance, un ectoplasme ..La forme se redressa :" avance petite ! n’aie pas peur, je viens d’allumer le feu juste pour toi,
moi je n’ai plus froid depuis longtemps, tu ne me reconnais pas , tu étais bien trop petite quand je m’en suis allée, nous sommes intervenus dans tes ręves tes parents et moi pour te dire que tu as enfin mérité le bonheur et la tendresse auxquels tu as droit... Alors repose toi et profite de la vie, tu vois, ŕ ton réveil, tu marchais dans un paysage gris et triste et lŕ, tu as vu de la lumičre et des couleurs en poussant une simple porte... Voilŕ la vraie vie ! Tout n’est pas toujours gris ni ensoleillé, alors quand tes matins seront tristes, recherche les jolies choses de l’existence...."