Un employé de cette banque, licencié depuis, aurait communiqué à un avocat proche de l'UDC des documents sur ces comptes, qui révèlent des opérations fructueuses d'achat et de revente de devises en 2011.
Cet avocat, selon la NZZ am Sonntag et la SonntagsZeitung du 1er janvier 2012, aurait transmis ces documents à Christoph Blocher, le 11 novembre 2011. Lequel en aurait informé Micheline Calmy-Rey, Présidente de la Confédération, le 15 décembre 2011, soit plus d'un mois plus tard ...
La Présidente de la Confédération a alors diligenté un audit ici réalisé par le Conseil fédéral des finances, tandis que le Conseil de Banque de la BNS , demandait un audit à PWC, PricewaterhouseCoopers. Résultat de ces deux audits, datés du 21 décembre 2011 : circulez, il n'y a rien à voir.
Compte tenu du règlement interne de la BNS, qui permet des opérations sur devises, à condition qu'il s'écoule six mois entre achat et revente, Philipp Hildebrand et sa famille n'auraient en effet rien commis d'irrégulier d'après ces deux audits.
Dans un communiqué publié aujourd'hui la BNS publie à la fois le Règlement interne de la BNS, adopté le 16 avril 2010, et l'audit effectué par PWC ici. Dans ce dernier audit on peut lire que les Hildebrand ont effectué trois opérations sur dollar :
Le 10.03.2011 : achat de 1'173'000 USD pour 1'100'000 CHF, soit avec un taux de change USD/CHF de 0.9375 (cette somme en CHF proviendrait de la vente d'une résidence à Gstaad)
Le 15.08.2011 : achat de 504'000 USD pour 400'000 CHF, soit avec un taux de change USD/CHF de 0.7929
Le 04.10.2011 : vente de 516'000 USD contre achat de 475'000 CHF, soit avec un taux de change de USD/CHF de 0.9202
Or entre le 15.08.2011 et le 04.10.2011 est intervenue la décision du 06.09.2011 de Philipp Hildebrand de fixer un taux plancher d'1 EUR pour 1.20 CHF ici, ce qui a eu pour conséquence de faire remonter la valeur de l'euro et ... du dollar par rapport au franc suisse.
Les auditeurs ont considéré que six mois s'étaient bien écoulés entre l'achat du 10.03.2011 et la revente du 04.10.2011 et qu'il n'y avait donc rien d'irrégulier à cette dernière transaction, d'autant que les taux de change de mars et d'octobre sont relativement proches.
N'est-il pourtant pas possible de considérer que les dollars vendus en octobre sont ceux qui ont été achetés en août, auquel cas six mois ne se sont pas écoulés entre les deux opérations d'achat et de revente et qu'il y a eu gain de change substantiel (sur 504'000 dollars cela fait tout de même près de 64'000 CHF) ?
Ce serait Kashya Hildebrand, femme de Philipp, galeriste à New York et Zurich, qui aurait fait l'achat des 504'000 USD du 15.08.2011. Elle explique ici dans un message adressé à l'émission 10 vor 10 du 3 janvier 2012 de la télévision suisse alémanique qu'elle a voulu profiter du niveau très bas du dollar et que 70 à 80% des transactions de sa galerie ici se font en dollars...
Quant à la revente des 516'000 USD du 04.10.2011, elle aurait permis l'achat d'un logement de vacances dans les Grisons... Il ne faudrait donc pas mélanger les opérations et celle d'octobre serait bien liée à celle de mars et non pas à celle du mois d'août.
Le problème est que, si l'on en croit la Weltwoche datée du 5 janvier 2012 ici, Philipp Hildebrand serait le seul détenteur du compte sur lequel les opérations de devises ont été effectuées en 2011 et qu'il en aurait lui-même donné les ordres à son gérant de fortune...
Dans ce cas là la thèse de la régularité des transactions sur le marché des changes serait battue en brèche et la confiance renouvelée du Conseil fédéral au Directeur de la BNS ici, en définitive, serait injustifiée.
Admettons toutefois que la Weltwoche ait tort et que la transaction sur le marché des changes du 15.08.2011 ait bien été opérée par Kashya Hildebrand et les autres par son mari, est-ce bien moral que la femme du Directeur de la BNS, qui bénéficie inévitablement d'informations dont ne dispose pas le péquin, spécule sur le dollar ?
Quoi qu'il en soit Philipp Hildebrand devrait répondre demain aux reproches qui lui sont adressés...
Francis Richard