L’actualité est
régulièrement traversée par des sujets à castagne qui font les délices des
politiques, des journalistes et des blogueurs …mais certainement pas de la
démocratie !
Ces sujets ont comme caractéristique commune d’être à la fois techniquement
complexes et idéologiquement clivants.
Cette double caractéristique permet à chacun d’asséner avec véhémence ses
propres certitudes et de proférer de bon gros anathèmes à l’égard de l’autre
camp, le tout avec la bonne conscience que confère la certitude de ne pas avoir
tout à fait tort.
Car, en effet, la complexité du sujet, les multiples manières de
l’appréhender, de le traiter en fonction des hypothèses utilisées, peuvent
amener tant les experts que les béotiens a des conclusions très variées, avec
chacune leur part de vérité. Pour peu que l’on ait envie d’aboutir à telle ou
telle conclusion, il est assez facile de trouver une personnalité émérite à
laquelle se référer et un tas d’arguments bien évidemment irréfutables prouvant
sans conteste que nous sommes dans le vrai et les autres….des gros stupides ou
des malhonnêtes !
Dans cette catégorie, on trouve évidemment les 35 heures, l’âge de départ à
la retraite et ….la TVA sociale !
Le sujet de la TVA dite sociale en est une illustration parfaite.
Les tenants de ce genre de dispositif font valoir les gains de productivité
pour nos entreprises, que permettrait la baisse des charges sociales, à un
moment ou l’on ne parle que de déficit du commerce extérieur, de
désindustrialisation et de délocalisation. Ils se référeront à l’exemple
allemand qui en 2007 a fait passer son taux de TVA de 16 % à 19 %, en partie
pour financer la protection sociale.
Ce à quoi leurs adversaires répondent baisse du pouvoir d’achat puisque même
si les entreprises nationales jouent le jeu en diminuant leurs prix, la hausse
de la TVA renchérira le prix des produits importés, avec le risque de peser sur
la consommation et donc sur le peu de croissance qu’il nous reste. De plus,
nous disent-ils, la hausse des prix pénalisera mécaniquement les petits
revenus, ceux qui consomment une part importante sinon la totalité de leurs
revenus par rapport à ceux qui en épargne une partie. Ils se réfèreront à un
autre exemple, les danois qui entre 1987 et 1989, ont abaissé les cotisations
sociales employeurs de 50% à 30% en augmentant en contrepartie de 3 points le
taux de TVA, sans que le résultat ne soit franchement probant.
Chacun a évidemment raison, tous ces arguments sont recevables, d’autant
plus que beaucoup de choses dépendent des modalités de mise en œuvre du machin.
De combien seraient baissées les charges sociales ? Quelles charges
seraient baissées ? y aura-t-il des conditions à respecter pour bénéficier
de cette baisse (par exemple lors de sa mise en oeuvre par le Danemark entre
1987 et 1989, les entreprises locales avaient interdiction d’augmenter leurs
prix) ? A contrario, quels taux de TVA seraient augmentés (rappelons que
nous trouvons le moyen d’en avoir 4 différents) et dans quelles
proportions ? La hausse de la TVA sera-t-elle combinée avec une hausse de
la CSG ou une taxe « écologique » sur les produits polluants .....ce
qui permettrait d’en atténuer l’effet ? etc etc Beaucoup de questions
doivent être posées et répondues avant de pouvoir mettre la main sur la
meilleure des solutions qui doit permettre à nos entreprises de gagner en
compétitivité.
Sur ce sujet, il faut tout d’abord juger de l’objectif : sommes-nous
d’accord pour diminuer les charges sociales employeurs ? si oui, de
combien et dans quelles conditions ?
Puis il faut envisager les différents moyens dont nous disposons pour
compenser cette baisse sachant qu’aucun de ces moyens ne pourra plaire à tout
le monde à partir du moment ou il s’agit d’augmenter une taxe ou un
impôt.
Ces moyens ne doivent pas se juger qu’à l’aulne de considérations politiques
sinon électorales comme le font beaucoup, à gauche comme à droite, mais à celle
de l’efficacité et de l’équité.
En tout état de cause, en termes d’efficacité, la TVA sociale est loin
d’avoir fait ses preuves et comme le démontre un de ses opposants que l’on peut
difficilement accuser d’être un idéologue gauchisant,
Alain Madelin, sauf à substituer la TVA à l’intégralité des charges
sociales, ce qui amènerait à augmenter ses taux de 50%, l’effet d’une baisse
des charges sur le cout total des produits serait minime. Ce n’est certainement
pas ça qui améliorerait significativement la compétitivité des entreprises
!
D’autant plus que les entreprises bénéficient déjà allègements importants de
charges sur les bas salaires.
De manière générale, aucune étude vraiment concluante n’a permis d’en
évaluer précisément les bienfaits sur l’emploi.
Enfin, beaucoup d’incertitudes pèsent encore sur la manière dont les
entreprises vont réagir face à cette diminution de leurs charges et à ses effet
sur les prix et donc sur le pouvoir d’achat.
Par exemple, certains pensent, qu’avec le jeu de la concurrence, les prix
des produits importés se réajusteront rapidement pour revenir, TTC, à leur
niveau d’avant la hausse. Dans ce cas, effectivement, les effets sur le pouvoir
d’achat seraient transitoires mais le gain pour les produits français par
rapport à leurs concurrents également !
Tout cela pour dire, que le sujet de la TVA sociale, ne peut pas se traiter
à coup de déclarations sèches et péremptoires comme le font nos politiques tout
énervés par la campagne électorale.
Malgré tout, telle qu’elle pourrait être implémentée en France, la TVA
sociale ne mérite certainement pas d’être considérée comme la formule miracle
pour redresser notre économie, trop d’incertitudes pour une efficacité
douteuse. Mais on ne peut pas non plus se contenter de crier à l’injustice
sociale, tout d’abord parce qu’il y a des moyens d’y palier et surtout parce
que l’argument est un peu court !....c’est ce type de réactions qui bloquent
toutes les réformes en profondeur depuis des décennies.
La situation de la France nécessite de trouver des idées nouvelles et les
idées nouvelles elles ne sont pas légion. Alors il me semble que lorsqu’on en
tient une, la moindre des choses c’est de se demander sérieusement si elle est
bonne ou mauvaise et de ne pas faire de procès en sorcellerie à Sarkozy en
l’accusant de vouloir restaurer les marges des entreprises sur le dos des ptits
gens !
On ne peut pas non plus se contenter de dire comme le fait, avec excès,
Hollande : « La TVA sociale est une mystification économique et
une faute sociale, qui aurait des conséquences extrêmement graves sur la
croissance. » sans exposer d’autres pistes pour redresser la
compétitivité des entreprises françaises.
Et par pitié, trouvez
autre chose que : « Si l'on veut lutter contre la délocalisation,
il faut empêcher que les entreprises délocalisent pour profiter du dumping
social…. »…par pitié !!!