L'homme, qui croit dominer l'échelle naturelle, n'a cependant jamais eu accès à aucun secret de la nature. Il en perçoit quelques mécanismes, mais jamais les buts, et surtout jamais le langage.
Pour beaucoup, les mystères de la nature sont la preuve de l'existence de Dieu, sa création la plus achevée et le lieu où communiquer avec lui bien plus sûrement que les créations humaines. Cette attitude, pour tout aveugle qu'on la considère, peut sembler moins orgueilleuse que celle qui prétend tout comprendre au langage de la nature, pour enfin la dominer.
Châteaubriand: "Il est un Dieu; les herbes de la vallée et les cèdres de la montagne le bénissent, l'insecte bourdonne ses louanges, l'éléphant le salue au lever du jour, l'oiseau le chante dans le feuillage, la foudre fait éclater sa puissance, et l'Océan déclare son immensité. L'homme seul a dit: Il n'y a point de Dieu."
Le mysticisme religieux qui considère la nature comme un signe permanent de la perfection divine adopte souvent une forme d'obscurantisme anti-scientifique. Elle prétend que l'on ne pourra jamais comprendre les lois de la nature par l'étude. A l'inverse, cette philosophie doit pouvoir éviter l'attitude arrogante que l'homme emprunte envers la nature, en y remplaçant la crainte d'un châtiment. On ne peut certainement pas avancer dans la crainte, ni dans l'ignorance, mais pas plus dans l'arrogance. Peut-être ces deux attitude devraient-elles se déparer de leur errances et apprendre à s'écouter. Mais l'une d'elle a disparu...
Illustration, Thomas Cole, The Expulsion From the Garden of Eden