Trois pays qui n'ont rien à voir ? si, un rapport particulier à la démocratie.
1/ En effet, l'évolution actuelle de la Hongrie ne laisse pas d'inquiéter : sous couvert d'une majorité absolue sans contre-pouvoir, le parti au pouvoir de M. Orban en profite pour passer loi sur loi, de façon à pérenniser son système. On remarquera les incertitudes du pays, confronté à une crise économique (comme tout le monde) et finalement mal sorti de la dictature communiste. Mais alors que sous la domination soviétique, la Hongrie avait réussi à être l’espace le plus ouvert derrière le rideau de fer, elle apparaît aujourd’hui comme le moins tolérant.
2/ Elle partage deux traits avec deux autres pays.
3/ Avec la Turquie, elle partage la possibilité de réduire les libertés grâce aux suffrages démocratiques. Constatons toutefois qu'ils sont renouvelés en Turquie, et que la pratique de l'AKP vise à vider le kémalisme de toute force politique, grâce notamment à l'utilisation abusive du procès Ergenekon. Or, c'est le kémalisme qui avait prôné la laïcité et, finalement, le système électoral qui permit à l'AKP de parvenir au pouvoir. Pareillement, le parti de M. Orban utilise le système pour démonter le système.
4/ Avec l’Égypte, on constate une configuration politique similaire : en effet, un parti conservateur arrive au pouvoir avec une forte majorité (le Fidesz en Hongrie, les Frères Musulmans en Égypte), mais il est flanqué sur sa droite par des ultra conservateurs (Jobbic en Hongrie, Salafistes en Égypte). Dans le cas de l’Égypte, la présence des militaires qui ont la réalité du pouvoir devrait forcer les FM à ne pas verser dans le radicalisme. Mais ce n'est pas parce qu'il y a des élections que l’Égypte est une démocratie achevée. En Hongrie, on s'aperçoit que l'absence de contre pouvoir laisse M. Orban avancer dans son système radical.
5/ Il se posera la question qui se pose aussi aux FM : peut-on mener aujourd'hui une politique autonome, sans tenir compte des voisins ? Pour l’Égypte, important de grosses quantités de blé et dépendant absolument du tourisme, elle ne peut probablement pas entrer dans une voie autarcique à l'iranienne, ce qui devrait aussi freiner les FM. Dans le cas hongrois, malgré les rodomontades de M. Orban, il devra forcément composer avec l'UE et le FMI. Et ce n'est pas en se servant dans les réserves de la Banque centrale (36 G €) qu'il réussira à tenir très longtemps. Autant dire que sa politique mène à un approfondissement accéléré de la pauvreté hongroise.
Dans le monde contemporain, malgré tous les fantasmes, on doit être très riche (comme le Qatar ?) pour mener une politique réellement indépendante. Mais dans une Europe souffrante, les pays les plus malades inquiètent fortement. Et ce n'est pas leur rêve d'autonomie qui les sauvera de la déroute.
Réf :
- Où va la Hongrie ?
- La Hongrie, nation tronquée
- Sur l'Egypte, on lira Jack Ryan, finalement pas si cynique qu'il le prétend.
O. Kempf