Qu'est-ce qu'Artscoll ? Pourquoi une maison d'édition a-t-elle pris autant d'importance au point qu'on parle aux Etats-Unis de révolution Artscroll et qu'un livre vient de sortir pour revenir sur le phénomène (Orthodox by Design, the Artscroll Revolution de Jeremy Stolow) ?
Aujourd’hui, de nombreuses maisons d’éditions ont copié Artscroll, mais c’est cette maison qui la première a révolutionné le genre en éditant des commentaires de la Thora, un Siddur, des éditions de la Meguilat Esther, du Cantique des Cantiques, etc… Une des plus importantes réalisations d’Artscroll étant leur édition du Talmud Babli traduite en anglais, en hébreu et même en français avec des commentaires assez pointus et toujours le même souci de la mise en page et de l’édition. En matière de Talmud traduit, je ne comprends personnellement pas pourquoi s’obstiner à aller voir du côté de l’édition Steinsaltz qui possède plusieurs inconvénients par rapport à l’édition Artscroll : pas accès à la page originale du Talmud, traduction qui prend quasi-systématiquement l’interprétation de Rachi et qui ne permet pas de percevoir les différents niveaux de compréhension, commentaires beaucoup moins élaborés, etc…En cette fin d'année 2011, leur fameux Houmach traduit et commenté (Pentateuque) vient d'ailleurs de sortir en français et il bénéficie déjà d'un incroyable succès dans toutes les bonnes librairies. C'est mérité: l'édition est d'une qualité remarquable.
Puis un approfondissement rédigé à partir de développements du Rabbi de Loubavitch mais qui s’appuient toujours sur des raisonnements logiques ou des recours à des sources talmudiques ou midrachiques. Après chaque approfondissement, des encadrés prenant appui sur ce qui précède pour en tirer une conclusion morale à partir d’histoires ou d’enseignements hassidiques (« Sparks of Hassidus »). L’édition est superbe, les commentaires sont structurés, parfaits pour une étude hebdomadaire surtout que le texte est magnifiquement imprimé, qu’une traduction en anglais est disponible ainsi que les classiques commentaires d’Ounkelos et de Rachi.
Je n’ai pas hésité malgré mon excédent de bagages : j’ai acheté cette édition à New-York et l’ai emporté en France, en espérant bientôt une édition similaire en français !Retour à l’office : bon, je vous la fait courte, un petit kiddouch a suivi, j’ai même à plusieurs milliers de km de chez moi rencontré la fille d’un fidèle de ma communauté d’origine, mangé un petit tchoulent, avant de prendre le repas de Shabbat chez un couple Loubavitch qui avait invité mes amis et qui a très gentiment accepté de m’accueillir également.
Ce couple d’une quarantaine d’années est formé de Juifs américains pur sucre, américain depuis plus d’un siècle voire plus pour une partie de la famille du mari. Tous les deux avocats, notre couple est revenu à la Tradition depuis un peu moins d’une dizaine d’années, à travers notamment le mouvement Loubavitch. Le repas de Shabbat fut très sympathique, ponctué de discussions autour des différences entre judaïsme français et américain. Une des plus criantes est l’attitude des Juifs français (séfarades) par rapport à la Halakha : on travaille shabbat, on mange pas 100% casher, mais on le sait et on assume. Pas question de commencer à se raconter des histoires et de vouloir chercher une cohérence artificielle qui réduirait la pratique juive au standard des modes de vie occidentaux avec un petit bout de spiritualité «à part », comme Sally demandait sa sauce à part dans le légendaire film contant sa rencontre avec Harry et un peu comme une partie de la communauté juive américaine.La surprise de ce Chabbat vint du petit commentaire de thora délivré par notre hôte. Non pas que l’histoire hassidique impliquant certains pouvoirs surnaturels du Rabbi me surprît, mais le récit faisait intervenir deux autres personnalités rabbiniques. L’un étant l’Admour de Bobov. Jusque là rien d’anormal, on reste dans le Hassidique. Mais l’autre : Rabbi David Pinto ! En plein Chicago, dans une famille purement américaine Loubavitch, ils connaissaient Rabbi David Pinto ? J’avoue, les marocains parfois sont vraiment très forts. Le Shabbat se termina comme souvent par de la lecture et une petite sieste bien méritée avant de passer une dernière courte nuit à Chicago. Je dis courte nuit parce que l’avion pour New-York m’attendait de bon matin ! 3 jours à New-York, tout seul, que demande le peuple ? Je vous passe évidemment les détails touristiques pour me concentrer sur ce qui peut attirer l’attention du point de vue du monde juif. Déjà… la bonne chère ! Manque de pot, j’avais prévu mon voyage en plein pendant les 9 jours de Av pendant lesquels la consommation de viande est interdite. Désolé cher lecteur, tu ne trouveras pas ici de critique gastronomique des restaurants bassari de New-York. La seule chose que je puis mentionner est que de l’avis unanime des locaux, les deux meilleurs restaurants viande de New-York sont Le Marais et Prime Grill.
Maintenant pour ce qui est du Halavi. Globalement une remarque : un Juif français, ou plutôt parisien, n’a pas grand-chose à envier à l’offre gastronomique casher de New-York. Je trouve l’offre parisienne plus variée et de meilleure qualité. J’ai par exemple mangé un soir dans un restaurant gastronomique italien « Gustavo va Mare » sur la 53ème (entre 2nd et 3rd). C’est très cher, même avec un dollar faible et beaucoup moins satisfaisant qu’un Inte Caffe ou qu’un Il Conte. Le service est correct sans plus. Bref, un tantinet déçu.
Pour le midi, il y a bien sûr nombre de restaurants de type Deli, où il est possible de manger un peu en mode self service, soit des parts de pizza, soit des pâtes, soit des salades, etc… C’est très pratique, surtout qu’ils sont en général très bien situés. Ce qui m’a d’ailleurs valu une forte incompréhension lorsque je voulus déjeuner dans un Deli appelé Rosa Pizza au 350th 5th Avenue, juste à côté de mon hôtel. Je déambule tranquillement jusqu’à l’adresse indiquée et me retrouve nez à nez avec….l’Empire State Building. Je tourne, retourne, pianote sur mon iPhone pour vérifier l’adresse, mais non pas d’erreur : le restaurant a la même adresse que l’Empire State Building. Je crois alors à un petit coup de mégalomanie d’un restaurateur Juif new-yorkais, jusqu’à ce que je comprenne qu’en effet, en entrant dans l’Empire State Building et en empruntant la galerie située au fond à gauche, on tombe en effet vers une très sympathique petite échoppe ou on peut avaler pizzas, pâtes, gratins, salades, etc….
Je pourrais encore vous parler des heures des librairies juives de Manhattan, pas très différentes des librairies parisiennes à la notable exception de la place prépondérante que prennent les ouvrages relatifs à la Shoa, de la transformation progressive des stands ambulants de vente de hot-dog Casher qui sont de plus en plus Hallal ou du hasard invraisemblable qui m’a fait rencontré en pleine 5ème avenue un ami que je n’avais pas vu depuis des années.
Mais ça n’ajoutera pas grand-chose au fait que New-York (en fait Manhattan pour ce séjour) est une ville hors du commun, larger than life comme disent les Américains et que ce cela se ressent évidemment aussi au niveau de la vie juive. Et que j’attends avec impatience d’y retourner !