Dialogue entre saint Joseph et un Hôtelier.
SAINT JOSEPH.
- Holà ! maître, maîtresse, valets, servantes, où êtes-vous ? il y a une heure que je frappe, et personne n’arrive ! quelle politesse !
L’HÔTELIER. –
- Je me suis déjà levé trois fois : si cela continue encore, je ne dormirai pas beaucoup. Qui frappe là-bas ? quel est tout ce tapage ? Qui êtes-vous ? que voulez-vous ? qu’y a-t-il pour votre service ?
SAINT JOSEPH.
- Mon bon ami, prenez la peine de descendre ; nous voudrions loger dans votre maison ; nous ne sommes que deux, ma femme et moi.
L’HÔTELIER.
- Vous êtes des trouble-repos, des batteurs de grands chemins, qui ne songez qu’à faire le mal. Ma porte est fermée, bonsoir.
SAINT JOSEPH.
- Nazareth est ma patrie ; je ne suis pas ce que vous croyez : je suis charpentier de mon état : je m’appelle Joseph, et ma femme Marie.
L’HÔTELIER.
- J’ai assez de gens ici, je n’en veux plus ; Dieu vous donne meilleure chance ailleurs ; si vous m’en croyez, vous demanderez où est le logis de la Lune.
SAINT JOSEPH.
- Donnez-nous l’hospitalité coûte que coûte ; logez-nous dans un galetas : nous payerons notre nourriture comme si nous étions à table d’hôte.
L’HÔTELIER.
- Votre souper ne sera pas cuit à point : je crois que vous ferez maigre chère, car pour sûr vous passerez la nuit dans la rue.
MARIE.
- Oh ! ne nous traitez pas ainsi ! Hélas ! voyez quel horrible temps, ouvrez-nous ! Si vous tardez encore, vous nous trouverez morts sur le seuil de votre maison.
L’HÔTELIER.
- Votre femme m’inspire de la pitié ; elle me rend plus affable : eh bien ! je vous logerai par compassion dans ma petite écurie.
Nicolas SABOLY (1614-1675), poète et musicien provençal.
Recueilli dans Le troubadour moderne ou Poésies populaires de nos provinces méridionales.
*****************************************************