IL est le bienvenu, ce beau jour de l’enfance,
Ce Noël tant aimé qui donne à pleines mains
Et joujoux et bonbons, épargnant la souffrance
À vos enfants chéris, vos jolis chérubins !
Ici tout est bonheur, et parfums, et lumière ;
La chambre est bien fermée et l’enfant va dormir.
Que peut-il redouter ? Ni douleur, ni misère
Ne semblent menacer son riant avenir !
Sa mère, sur son front, n’a pas versé de larmes,
Elle a tout ignoré des peines d’ici-bas,
Jusqu’alors tout sourit à son cœur sans alarmes,
Son enfant c’est son bien, il ne périra pas !
Là c’est le doux tableau, plus loin c’est la mansarde :
Une femme à genoux, presque mourant de faim,
Tient son fils dans ses bras, tristement le regarde,
Et soupire en disant : « Le douloureux destin !
Son père, s’il vivait !.. » Mais doucement la porte
Sur ses gonds a tourné. Qui vient ? – la Charité. –
Jésus – car c’est son heure – à minuit, vous apporte
Jouets et vêtements – le plaisir, la santé !
Charité, n’es-tu pas la chaîne tutélaire
Qui relie ici-bas heureux et malheureux !
Les roses de Noël fleurissent sur la terre
Pour le pauvre et le riche, et vos salons joyeux
Auront des soirs plus doux et des femmes plus belles
Quand les déshérités, pauvres petits enfants,
De vos mains recevront les étrennes nouvelles
De vos cœurs généreux – et ces dons bienfaisants
Ne seront pas perdus – Dieu rend avec usure
Ce que la Charité sait produire ici-bas ;
Sa semence est féconde, elle est jeune, elle est pure,
C’est la manne céleste et qui ne tarit pas ;
La Charité nous suit dans l’ombre et le mystère ;
Ainsi qu’un laboureur traçant droit ses sillons,
Rien ne peut l’arrêter. Sa marche salutaire
A sous ses pieds vainqueurs fait sortir les moissons.
Quelle brillante gerbe et quelle aube sereine !
Saluons son réveil, et, formés en faisceau,
Marchons en rangs serrés sans sortir de l’arène,
La Charité conduit au port notre vaisseau !
Eugénie CASANOVA (fin XIXe siècle).
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