J'ai fait un cauchemar !
Je me demande, en effet, si la progression des nationalismes un peu partout sur la planète n'est pas tout simplement inévitable. Je vois deux raisons à cela :
1) Il y a les pays qui ont du mal à s'adapter à la mondialisation.
La remise en cause des systèmes de protection sociale, la montée du chômage dans les couches de population les moins qualifiées, l'affaiblissement des institutions qui assurent un minimum de cohésion sociale, tout cela entretient la méfiance de l'opinion, invite à se retrancher derrière ses frontières, à se replier sur la nation.
N'est-ce pas là un des enseignements à tirer du "non" au référendum sur la Constitution européenne ? Et comment ne pas se rappeler aussi un certain 21 avril. Partout en Europe, dans les pays où la croissance demeure molle, progressent les partis de l'extrême.
De nouveau, battre sa propre monnaie, retrouver sa pleine souveraineté, voilà les signes d'un renouveau nationaliste.
Le nationalisme, pour sortir du monde.
2) Il y a les pays qui s'adaptent à la mondialisation.
La maîtrise et le développement des nouvelles technologies, les découvertes dans le domaine de la recherche, l'acceptation de la mobilité professionnelle et la perception du risque comme une chance et non comme une menace, voilà qui construit une société à l'aise dans le monde tel qu'il va.
En contrepartie, l'acceptation de la précarité sociale, de la privatisation de pans entiers du service public, à commencer par la santé et l'éducation, passent par le renouveau de l'idée nationale : c'est bien parce qu'elle a conscience de travailler à l'essor de la nation tout entière que l'opinion accepte la remise en cause de certains avantages.
N'est-ce pas la fierté nationale, le culte de sa propre puissance, qui donnent aux Américains, comme aux Chinois, le désir d'avancer, en dépit de conditions sociales parfois douloureuses?
Le drapeau comme antidote à la douleur. Le nationalisme, pour vaincre dans la mondialisation.
Ainsi, que l'on désire s'écarter du monde ou, au contraire, s'y déployer avec force, il me paraît, j'ai bien peur, que cela soit, à chaque fois, au bénéfice d'un idéal dont on sait qu'il porte en germe les pires malheurs.