A propos de Malveillance de Jaume Balagueró 3 out of 5 stars
Luis Tosar
En Espagne, César exerce le peu gratifiant métier de gardien d’immeuble. Serviable, disponible, souriant, il est aimé de tous excepté un vieux grincheux et une petite fille. Mais César est seul et triste au fond de lui et mène une double vie. Ne trouvant de joie personnelle que dans le malheur des autres, il harcèle Clara, une habitante de l’immeuble par mail, courrier, téléphone, etc… La nuit, il s’introduit chez elle, l’empoisonne et lui fait subir toutes sortes de méchancetés et de vilains coups du sort dont elle ne comprend ni l’origine ni l’accumulation…
Voilà un film qui ne peut pas laisser indemne le spectateur, tant il y flotte un parfum de malsain. Mal traduit par le mot « malveillance » en français, le titre espagnol du film de Jaume Balagueró : Mientras Duermes (« Pendant que tu dors ») insiste beaucoup plus subtilement sur le côté sournois et insidieux du personnage de César (Luis Tosar, faux air de Romain Duris dans le menton, non ?).
Filmé depuis le point de vue de César, Malveillance décrit en quelque sorte les origines d’un psychopathe, ou comment un type à l’existence aussi plate et ordinaire que César va devenir un authentique tueur en série.
César est en fait secrètement amoureux de Clara mais son caractère introverti et la misogynie qu’il éprouve à son égard (« je lui enlèverai ce sourire qu’elle a ») l’empêchent d’avoir des contacts autrement que cordiaux avec elle.
César est un personnage tout en violence contenue et en perversion. Mais ces traits de caractère ne sont pas assez mis en valeur hélas. Voyeur, César n’hésite pas à s’immiscer la nuit dans le lit de Clara. Dommage que le traitement des personnages verse un peu dans la caricature et l’exagération avec ce vieil Espagnol qui s’acharne sur César comme César sur Clara.
On aurait aimé que le réalisateur des Rec développe et décrive davantage le profil psychologique et la frustration de César, qu’il approfondisse l’étude de caractère et le portrait de ce triste sire qui a accumulé les échecs professionnels, vit seul dans son monde et sa loge, tient un journal de bord dont le réalisateur ne nous montre pratiquement rien de ce qu’il contient !
Ces manques sont compensés par un scénario habile à instaurer un suspense, à réserver des retournements de situations dont la chute constitue l’atroce paroxysme. La mise en scène de Balagueró, tendue, un brin amorale (voir la chute et le destin de César), permet aussi de maintenir en haleine le spectateur jusqu’au coup de théâtre final.
Au milieu du film, la scène où César est coincé dans l’appartement est aussi un grand moment et un bijou de plan séquence.
Dans son côté bizarre et gore (scène de la baignoire), malsain et fantastique (lumières, ambiance baroque de l’immeuble, yeux de loup de César), Malveillance verse plutôt du côté d’Almodovar (Parle avec elle, La piel que habito) que d’Hitchcock.
Si le but de Balagueró était de mettre mal à l’aise le spectateur voire de lui retourner le ventre, une chose est sûre, c’est qu’il y est parvenu…
www.youtube.com/watch?v=odHggFJEtkM
Film espagnol de Jaume Balaguero. Avec Luis Tosar, Maria Elura, Alberto San Juan (01 h 42).
Scénario : 3.5 out of 5 stars
Mise en scène : 3 out of 5 stars
Acteurs : 3.5 out of 5 stars
Dialogues : 2.5 out of 5 stars