« Rêves à tous les engrenages » pourrait-on dire de ce merveilleux film destiné encore plus aux amoureux du cinéma qu’aux enfants.
Un film d’une beauté plastique étonnante, pour lequel la 3D se justifie enfin pleinement parce qu’elle nous entraîne à l’intérieur d’une énorme mécanique grouillante et dangereuse, la gare Montparnasse, puis plus loin à l’intérieur de ses horloges mécaniques, en un temps de misère et d’incommunicabilité …déjà.
L’histoire est tirée du roman graphique de Brian Selznick, « L’invention de Hugo Cabret », mais elle est magnifiée par l’immense talent de Martin Scorsese, magicien moderne du cinéma, qui en profite pour rendre un hommage superbe au père français du film fantastique, Georges Méliès. Nous sommes fiers d'apprendre que le film a été en partie tourné à Paris, dans des décors réels transformés pour les adapter à l'époque du film ....Et les décors me font aussi penser aux prisons du Piranèse ….
L’histoire est triste durant la plus grande partie du film. Scorsese lui-même définit ainsi son héros : « Le plus frappant, c’était la vulnérabilité et la solitude de cet enfant. Hugo vit tout seul dans une sorte de machine géante, la gare, tout en nourrissant l’espoir d’établir un contact avec son père disparu... »
Le lien qui unit le petit garçon et son père, disparu trop tôt, c'est le cinéma. Et moi, je ne peux m'empêcher d'évoquer mes parens qui assistèrent pour la première fois de leur vie à une séance de cinéma en janvier 1932, à la veille de leur mariage.
Bref, on a peur, on pleure, les enfants ont du mal à tenir la distance, et sortent un peu « groggy », comme Camille (10 ans). En revanche, les plus âgés y apprennent, comme Jean-Baptiste, comment naquirent les premiers films.
La reconstitution des tournages dans des décors de « rêve » sont extraordinaires. J’ai adoré les costumes de crevettes roses et le dragon soufflant des flammes, tenu par des filins.
Le casting et l’interprétation sont absolument remarquables. Le jeune Aza Butterfield, avec ses grands yeux bleus ainsi que la mignonne Chloë Moretz (Isabelle) nous enchantent.
Mais j’ai adoré aussi le personnage de l’Inspecteur chargé de la sécurité de la gare, grand blessé de la guerre de quatorze, joué par Sacha Baron Cohen (rappelez- vous : l’ignoble Borat !) et suité de son dobermann nommé Maximilien, la prestation fugace de Jude Law, le regard perçant de Ben Kingsley ….et même Christopher Lee, sous les traits du libraire Monsieur Labisse.
Ce sera sans conteste un très gros succès au box office, mérité. Peut-être même le film deviendra-t-il un classique ...
Les vues de Paris sont belles, poétiques, c’est évidemment truffé de clins d’œil comme l’accident du Granville-Paris en 1895 où la locomotive a plongé à l’extérieur de la gare, les films d’Harold Lloyd …entre autres. Pour moi, qui, comme vous le savez, me considère avoir toujours treize ans, ce fut un enchantement.