Cette nuit-là, qui précéda l’Epiphanie,
Eut, au pays lorrain, une telle douceur,
Qu’elle laissa la terre embaumée et bénie.
L’ombre était rassurante, et les bois sans terreur ;
Les anges qui marchaient au fond du paysage
Laissaient voir par moment un peu de leur blancheur.
Un souffle printanier animait les branchages,
Et les arbres de loin se faisaient signe entre eux,
Comme pour se transmettre un merveilleux message.
Bien avant que le jour apparût dans les cieux,
Hantés par on ne sait quel songe de lumière,
Les coqs se renvoyaient leur qui-vive joyeux.
Eveillés en sursaut, se frottant les paupières,
Les hommes se levaient, et sans savoir pourquoi,
Transportés d’allégresse, ils sortaient des chaumières,
Et se hélaient, d’un seuil à l’autre, à pleine voix :
« Bonjour, voisin ! – Bonjour ! – Ça, qu’est-ce qui se passe
Que nous nous trouvons tous réveillés à la fois ? »
Soudain, l’on vit glisser une étoile… Sa trace
Semblait un fil fragile où pend un fuseau d’or ;
Doucement, elle vint des confins de l’espace,
Comme on fait en marchant vers un berceau qui dort ;
Ainsi dut cheminer l’étoile qu’ont suivie
Les mages Balthasar, Gaspard et Melchior.
Puis comme elle éclairait une humble métairie,
Dans la nuit radieuse, un branle surhumain
Fit sonner tout à coup les cloches réjouies.
« Noël ! Noël ! » chantaient toutes leurs voix d’airain,
Et sans qu’on pût savoir qui les avait sonnées.
Leur benoît carillon dura jusqu’au matin.
Or, c’est cette nuit-là que la Pucelle est née.
Louis Mercier, revue « Le Noël » n°1455.
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