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Casanova, l’homme qui aimait les lettres

Par Paulettedemymuseum @mymuseum

J’ai rencontré Giacomo Casanova… Là, je sens que je fais des envieuses !

Il suffit de prononcer son nom et l’on entend aussitôt «plaisirs» et «séduction». Mais prenez garde, le vénitien ne se réduit pas à ce cliché !

L’exposition sur Casanova qui a lieu en ce moment à la BNF fait l’impasse sur son libertinage amoureux et nous montre l’écrivain, le voyageur, le savant et l’homme épris de liberté absolue.

Bref, un Casanova encore plus séduisant !

A Venise j’ai croisé sa grande silhouette et je l’ai suivi. Il m’a d’abord échappée mais j’ai fini par le retrouver, et par l’interroger !

Casanova, l’homme qui aimait les lettres

Paulette : Vous êtes né à Venise de parents comédiens. De santé fragile, vous étiez condamné à mourir jeune. Qu’est-ce qui vous a sauvé ?

Casanova : Vers l’âge de 8 ans, j’étais si malade que ma grand-mère, dont j’étais le bien aimé, me fit monter avec elle dans une gondole et me mena chez une vieille sorcière à Murano, une île près de Venise. Après avoir reçu de ma grand-mère un ducat d’argent, la vieille ouvrit une caisse, me prit entre ses bras, m’y mit dedans et m’y enferma. Ensuite, cette femme extraordinaire, après m’avoir fait cent caresses, me déshabilla, brûla des drogues et me récita des conjurations.

Paulette : Et cela a suffi à vous guérir ? 

Casanova : La nuit suivante j’ai vu ou cru voir descendre de la cheminée une femme éblouissante qui vint à pas lent s’assoir sur mon lit. Après m’avoir tenu un long discours auquel je n’ai rien compris ; et m’avoir baisé, elle partit par où elle était venue.

Il serait ridicule d’attribuer ma guérison à ces deux extravagances mais les remèdes aux plus grandes maladies ne se trouvent pas toujours dans la pharmacie.

Casanova, l’homme qui aimait les lettres

Paulette : Un de vos grands faits de gloire, qui constitue comme un acte de naissance de votre personnage, c’est votre évasion de la prison des plombs. Pouvez-vous nous raconter comment vous vous en êtes échappé ? 

Casanova : En 1755 j’ai été emprisonné pour mes pratiques anti-religieuses. La République de Venise se méfiait aussi de mes activités frauduleuses et ma capacités à ruiner les praticiens. Elle a donc puni le mauvais garçon que j’étais en m’enfermant dans une prison, sous les toits du palais ducal constitués de lames de plombs. Mais cette captivité m’était insupportable. Je tombais dans la pensée de mon évasion, et une cervelle toujours occupée dans une même pensée parvient facilement aux confins de la folie. Heureusement, avec mon voisin de cellule, nous avons percé le mur, grimpé sur le toit et réussi à sortir du palais ducal. C’était un exploit dont j’ai tiré une grande notoriété. Malheureusement j’ai dû quitter ma chère Venise et je ne l’ai point revue pendant 19 ans.

Paulette : En effet, vous avez alors traversé l’Europe. Vous avez été tour à tour ecclésiastique, militaire, avocat, franc-maçon, joueur, flambeur, noceur…  Votre vitalité et votre soif de connaissances n’avait pas de limites.

Casanova : J’ai parcouru presque 65 000 kilomètres et dépensé près de 24000 livres par an !

Il m’a donc fallu beaucoup d’inventivité pour vivre cette vie de plaisirs et d’aventures. Grâce au jeux, à quelques missions officielles ou secrètes, grâce aux dons de mes hôtes et surtout grâce à ma ruse, j’ai pu vivre dans les capitales européennes au milieu des élites, dont je recherchais la compagnie.

Paulette : Des élites intellectuelles notamment ?

Casanova : J’ai toujours eu la passion des livres. J’ai dévoré les auteurs anciens, surtout Horace et Virgile. Mais j’ai aussi beaucoup lu les auteurs plus récents : Hobbes, Rousseau, Spinoza… Et, en effet, dès que j’en avais l’occasion, je rencontrais les grands hommes de mon temps.

 Paulette : Comme Voltaire par exemple ?

Casanova : J’ai rencontré Voltaire à Genève dans sa propriété des Délices

Je lui ai récité des stances de l’Arioste, mon poète préféré. Je les ai récitées comme si ça avait été de la prose, les animant du ton, des yeux, et d’une variation de voix nécessaire à l’expression du sentiment. On voyait et on sentait que je me faisais pour retenir mes pleurs, et on pleurait… et Voltaire courut pour m’embrasser !

Casanova, l’homme qui aimait les lettres

Paulette : Cette vie extraordinaire vous l’avez consignée dans des milliers de pages. Finalement, votre vrai désir n’était-il pas d’être écrivain ?

Casanova : Il est vrai que très tôt on sema dans mon âme l’amour de la gloire qui dépende de la littérature. Mais, j’ai surtout écrit pour ne pas m’ennuyer. En m’occupant à écrire dix à douze heures par jour, j’ai empêché le noir chagrin de me tuer ou de me faire perdre la raison.

Et puis, pour un écrivain j’avais la meilleure des matières : ma vie… dont j’ai été l’artisan acharné !

Pour écrire cette interview je me suis librement inspirée des écrits de Casanova Histoire de ma vie (éditions Robert Laffont collection Bouquins) et Histoire de ma fuite des prisons de la République de Venise (éditions Allia).

En 2010, la BNF a acquis Histoire de ma vie (que Casanova a écrit en français) et a commencé sa numérisation.

L’exposition Casanova, la passion de la liberté a lieu du 15 novembre 2011 au 19 février 2012 à la BNF François Mitterrand

 Giacomo Casanova né le 2 avril 1725 à Venise et mort le 4 juin 1798 à Dux en Bohême


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